Chroniques


MINGARELLI Hubert
La Terre invisible
Editions Buchet Chastel (192 pages)

Réalité derrière une photo
La Terre invisible est une série de scènes simples et authentiques qui s’affichent sous forme de photos séparées sur la pellicule d’un photographe de guerre. Elles reflètent le style séduisant de Mingarelli. Ces photos, le photographe-narrateur les prend pour leur trouver un lien commun. Après avoir vu un camp de concentration fermé par les Anglais, notre narrateur entreprend de photographier les gens de cette Allemagne d’après mai 1945, pour essayer de comprendre ce qui s’était passé, pourquoi ils avaient laissé faire. 
Le photographe est accompagné d’un jeune soldat anglais O’Leary qui n’avait rien vu des atrocités de la guerre, vêtu d’un uniforme, armé d’un fusil.
Cette modeste tâche est exposée sous forme de phrases simples, courtes dans lesquelles un lexique très clair serpente avec fluidité entre les lignes. La description de l’Allemagne est quasi absente, les lieux n’étant pas importants. Les dialogues avec les Allemands n’existent presque pas, l’obstacle de la langue est insurmontable. Il n’y a que les photos pour comprendre. En effet, le négatif des photos enregistrées nous permet de révéler un secret. Celui des personnages photographiés ? Celui du photographe ? de son compagnon ? « Que cherchent-ils ? », « Pourquoi, de qui et de quoi fuient-ils ?
Ils cherchent l’identité et la vérité « Quel drapeau ? », la terre ou le pays, « Et où est-ce qu’on va aller ? » ; mais aussi la sérénité absolue parce que leur esprit est hanté par des souvenirs et des cauchemars mortels : « rêva aux bâches avec lesquelles nous avions recouvert les morts » qui les poussent à halluciner, « Personne n’osait dire que c’étaient les morts qui poussaient avec leurs jambes ».  Ils se mettent en route pour s’éloigner de cette réalité affreuse, protégés par leur équipement qui est la source de leur force : le fusil et la caméra, mais en vain.
Le lecteur découvre, avec les personnages, que si la guerre ne tue pas la personne directement, ne laisse pas de cicatrices ni de traces, elle contribue évidemment à torturer son âme, vivant. 
Najah Matar
Université de Balamand
Département de Littérature et Langue française


APPANAH Natacha
Le Ciel par-dessus le toit
Editions Gallimard (nrf), (125 pages)
    
     Un lecteur non averti trouvera le titre familier, mais dès l’incipit il se souviendra. Le Ciel par-dessus le toit de Natacha Appanah fait sans aucun doute écho au très célèbre poème de Verlaine (Sagesse, 1881) qui porte le même titre.
Le ciel est, par-dessus le toit,
Si bleu, si calme !
Un arbre, par-dessus le toit,
Berce sa palme.
La cloche, dans le ciel qu’on voit,
Doucement tinte.
Un oiseau sur l’arbre qu’on voit
Chante sa plainte. […]
     Le roman s’ouvre sur une description des « prisons » ou « cellules de détention » … dans « un pays qui avait construit des prisons pour enfants parce qu’il n’avait pas trouvé mieux que l’empêchement, l’éloignement, la privation, la restriction, l’enfermement et un tas de choses qui n’existent qu’entre des murs pour essayer de faire de ces enfants-là des adultes honnêtes, c’est-à-dire des gens qui filent droit ».
    Loup, jeune adolescent « un peu différent » est en prison pour avoir roulé à contresens, mettant la vie de quelques passants en danger. Il observera « le ciel par-dessus le toit ». Le narrateur s’accapare des souvenirs de l’enfant, de l’inconscient familial collectif et nous emmène en flash-back pour nous décrire la prison enfermant chacun des membres de ce petit groupe. Des prisons aux murs élevés érigés par les prisonniers eux-mêmes ou par leurs familles. Nous faisons tout d’abord connaissance des deux « oiseau[x] sur l’arbre qu’on voit [et qui] chant[ent] leur plainte » (Verlaine). Ces deux oiseaux du roman ne sont que les deux figures féminines principales du roman et dont l’existence donne un sens à la vie de Loup, l’une lui ayant donné la vie réellement à savoir sa mère Phénix (celle qui s’appelait Eliette), comme répète souvent le narrateur, et l’autre c’est sa sœur Paloma – pigeon en espagnol – qui représente la vie, la paix « une sœur douceur chaleur » (p. 122-123). Ces deux oiseaux chantent leur plainte, ou sa plainte à lui, chacune à sa façon. Phénix, quand elle s’appelait Eliette, chantait, elle chantait beaucoup dans des spectacles et était souvent applaudie. Ses parents lui ont construit une prison pour l’enfermer, le corps d’une poupée de porcelaine et l’ont mise dedans, l’obligeant à chanter. Elle se construisait sa propre prison, une cabane en draps, et s’y enfermait pour se délecter d’une liberté révolutionnaire où elle échapperait à la tutelle de ses parents. Victime d’un baiser pédophile étouffant, une fois sur scène – une de ses prisons – elle perd la tête et au lieu de chanter, elle libère sa vraie voix, ses cris, de sa prison, son ventre. Un cri qui lui a valu une nouvelle prison, un asile. Mais désormais elle est libre, elle est un oiseau qui renait de ses cendres, Phénix se fit-elle baptiser, et mit au feu la maison-prison. Sa fille, elle la prénomma Paloma, lui donnant ainsi des ailes, pour être libre. Mais la pauvre fille ne l’est pas, parce que justement elle n’a pas besoin d’une telle liberté, elle a besoin d’être bercée, embrassée … dans les bras, le giron maternel, giron prison. 
    Paloma usa enfin de ses ailes et partit, sans jamais revenir. Sans ailes, Loup n’avait que ses cris, ses crises, et ses pattes, ses pieds. A chaque crise, il criait fort, il sortait courir courir courir jusqu’à épuisement. Et c’est ainsi qu’il s’échappa à son tour de sa mère, rouler rouler rouler jusqu’à l’accident, jusqu’à la prison, rouler pour rejoindre Paloma.
     Le roman se ferme – la vie des personnages ne se ferme plus – dans un espace ouvert, sans murs, sans toit… au bord de la mer, avec un cerf-volant qui remplace le palmier de Verlaine, avec les regards de Phénix et de Paloma sur Loup.
    L’auteure essaie-t-elle dans son style poétique et fluide, de nous dire que les vraies prisons ne sont pas celles qui possèdent des murs et des toits ? Veut-elle nous faire comprendre que nous construisons nous-même nos prisons ? Sommes-nous nos prisons et nos bourreaux ?
Chantal Bitar
Université de Balamand
Département de Littérature et Langue française
Extérieur Monde
Olivier Rolin
Edition Gallimard, 2019 (302 p.)


L’anti-Odyssée universelle

        « Je suis un Ulysse au petit pied, et sans espoir en plus, car je n’ai pas d’Ithaque, aucune Pénélope et ce retour est sans fin ».
C’est uniquement ainsi qu’Olivier Rolin décrit son personnage.  Ce livre, qui n’est pas un roman, s’ouvre sur le projet littéraire de l’auteur, qui est encore flou pour lui comme pour nous lecteurs.
Dans un style simple, interactif et ludique, Rolin explore ses souvenirs enfuis au plus profond de sa mémoire et ses vieux carnets de voyage, tendant la main au lecteur qui pénètre dans cet univers intime de pensées et d’images. Il se tisse alors entre l’auteur et le lecteur un lien fou d’amitié, d’intimité et de compassion réciproques. Ils ne font plus qu’un, raison pour laquelle Rolin s’amuse à alterner sa narration entre première et deuxième personne, créant ainsi un effet de miroir.
C’est un récit de voyages multiples, à l’échelle spatiale, temporelle mais aussi intellectuelle : téléportés un demi-siècle en arrière, nous témoignons d’aventures et de rencontres vécues par l’auteur dans les quatre coins du globe : Japon, Chine, Russie, Egypte, Liban, Argentine, Nouvelle Zélande etc. C’est un tour du monde en 300 pages où chaque coin éveille un souvenir perdu, un amour oublié ou même un auteur aimé. Proust, Kafka, Nabokov, Dante, et tant d’autres cités et référés pour l’amour des langues et du savoir. Le vécu de l’auteur est si imprimé de la littérature qu’il rencontre multiples personnages, une « Andromaque », une « Esmeralda » et tant de « Lolitas » … Cette fusion singulière entre réel et littérature est si passionnante qu’elle anime et donne vie aux personnages romanesques fictifs tant lus et étudiés.
Loin du romantisme de ses aventures, ce livre porte des valeurs profondes et importantes.
Par son évocation de multiples guerres, du terrorisme, des camps du Goulag, mais aussi par le fait que l’auteur ait vécu certains conflits et s’est mis dans la peau des civils traumatisés, Rolin exalte la paix et le calme dans un monde qui bouillonne encore.
L’auteur défend aussi les droits de la femme, surtout dans les pays orientaux, où elle est encore considérée comme une créature honteuse toujours voilée derrière la dominance masculine. Au fil de ses pensées imprimées sur le papier, Olivier Rolin dédie son livre à deux jeunes étudiantes soudanaises, Rabaa et Razaz, encourageant l’éducation des femmes qui, selon lui, tiennent l’avenir de leur pays entre leurs mains.
Dans son parcours à travers le temps et l’espace, l’auteur dénonce farouchement la mondialisation, voire la montée de l’impérialisme américain, un fantôme géant qui étrangle la planète. En comparant les mêmes paysages, il y a quarante ans et actuellement, le narrateur ouvre l’œil sur la perte du patrimoine mais aussi de l’authenticité des paysages et des cultures. Par la même occasion, Rolin remet en question la société de consommation et les désirs croissants des gens de toujours consommer davantage, c’est pourquoi il cite des grandes entreprises, des boutiques, des services et des restaurants qui ont remplacé les anciens monuments, comme les distributeurs de billets, H&M et McDonald’s… Sans oublier l’invasion des technologies, des ordinateurs (que dit l’auteur ne pas aimer) et le monde virtuel dont Internet et Wikipédia.
Ce voyage qui était alors une quête de l’identité s’avère sans espoir : Comment pouvons-nous forger notre identité dans un monde dépourvu de la sienne ?
Extérieur Monde prêche la diversité, qu’on peut remarquer dans le multilinguisme. Certes écrit en français, il comporte toutefois maintes citations et expressions gardées dans leurs langues d’origine allant de l’espagnol, … vers l’arabe, sans oublier l’évocation de divers pays, de leurs traditions et de leurs cultures.
Dans ces pages, chaque individu peut s’identifier et trouver une part de lui. Ce livre est une miniature du monde, auquel nous appartenons tous et où nous tous avons une place.
Ce n’est pas le livre qui est long mais le monde qui est si grand.
Entrés dans l’intimité de l’auteur, nous comprenons que Rolin, à la veille de ses 75 ans, revoit défiler devant lui des images, des paysages, des amours et des amitiés qui l’ont marqué et qu’il a gardés avec lui tout au long de sa vie, mais aussi et surtout des souvenirs qu’il regrette. Sa vie, qu’il compare à un arbre, semble être arrivée à l’automne, il perd un à un ses amis, comme les arbres leurs feuilles mortes.
L’auteur est hésitant dans ses premières pages, il se demande souvent s’il pouvait croire en la parution de ce livre, et s’il serait le dernier… mais après avoir purgé toute son angoisse, Rolin défie le monde, se rebelle dans l’écriture et achève ses pensées sur une nouvelle résolution.

                                                                    Eliana Abou Chabké - USEK

NOTHOMB Amélie
Soif
Editions Albin-Michel (152 pages)           

Soif, Amour, Mort

Ce roman narre l’histoire qui a bouleversé l’humanité : celle de Jésus Christ, ses dernières heures avant la crucifixion plus précisément.  Une histoire dont on connaît les protagonistes, les péripéties et surtout la fin, et pourtant, on est incapable de laisser passer une phrase sans la lire et la relire. Un livre impressionnant, à effets vertigineux, racontant les dernières heures de Jésus, à la première personne du singulier. 
Amélie Nothomb, avec sa plume inimitable, nous raconte l’histoire de Jésus, telle qu’elle la conçoit. Loin des dogmes traditionnels, elle démontre le côté humain de Jésus : elle parle de ses petits plaisirs éprouvés en marchant, en mangeant, et surtout en buvant pour « étancher » la Soif, l’ultime preuve de la vie. On revoit des scènes racontées dans les quatre Évangiles, on rencontre les évangélistes, les disciples et même les miraculés de Jésus qui portent plainte contre Lui, malgré tout.
« Accepte et tu souffriras moins » : Nothomb, à travers 152 pages, nous invite à savourer la vie tant que nous le pouvons, à éviter les gens négatifs comme Judas, à accepter la colère ressentie, à pardonner et à se pardonner.
Ses propos sont si désinvoltes, qu’elle dépasse parfois les bornes, arrivant jusqu’au blasphème : elle critique Dieu et son choix atroce de mettre fin à la vie de son fils, elle le blâme d’avoir été injuste, et elle crée sa propre image de trinité : Soif, Amour, Mort.
Ce livre percutant est souple par son style, profond par ses idées, choquant par ses propos, déroutant par son point de vue, méritant par-là d’être lu … mais avec précaution !
Zeina Dagher
Université de Balamand 
Département de Littérature et Langue françaises


DUBOIS Jean-Paul,
Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon,
Edition de l’Olivier, 2019 (245 pages)


L’art de gâcher sa vie

Jean-Paul Dubois est un écrivain et journaliste français. Il a suivi des études de sociologie. Il a publié plusieurs romans où il pose un regard distancié sur le monde et les rapports humains. Et le voilà de retour, après trois ans, avec un de ses plus beaux romans « Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon ».
Comme toujours, le héros de ce roman est nommé Paul. Il s’agit d’un homme qui possédait une vie calme et conventionnelle. Puis, il se trouve enfermé dans une cellule en prison avec Patrick, un rebelle membre des Hell’s Angels[1] incarcéré pour meurtre. Les deux hommes se comprennent bien malgré les différences entre eux. L’histoire se déroule entièrement dans une même unité de lieu, dans la cellule de la prison à Montréal. Pourtant les personnages nous emmènent vers des paysages variés de l’histoire en utilisant toujours la technique du Flashback.
Dans ce roman, Paul Hansen, le protagoniste, nous raconte son enfance depuis son ascendance Danoise, sa vie en France et ensuite au Canada. De même, il nous parle de ses parents -Johannes, un pasteur protestant et Anna, la propriétaire d’une salle de cinéma- et de leur mariage drôle qui se termine plus tard par le divorce, à la suite du scandale provoqué par sa femme qui a projeté un film pornographique dans son cinéma.
Le père décédé après sa faillite à cause des dettes et la mère suicidée, Paul a commencé à travailler comme superintendant à l’Excelsior[2] dont la vie des résidents ressemble beaucoup à sa vie rigide et austère en prison. Ensuite, il nous raconte sa relation avec son épouse Winona, pilote d’avion qui l’emmène au-dessus des nuages dans leur temps libre. Bientôt tout change quand Edouard Sedgwick a pris le contrôle de l’Excelsior et le compte à rebours commence en suscitant des problèmes qui feront tout basculer et qui jetteront notre protagoniste en prison.
Comme la plupart des œuvres de Jean-Paul Dubois, ce roman traite des idées mélancoliques telles que la mort brutale, l’injustice et la prison avec un style humoristique et poétique particulier. L’écrivain y critique notre société moderne inhumaine et obsédée par la rentabilité et l’efficacité. Nous constatons donc que l’altération entre passé et présent, entre les années 1960 et les années 2000, est bien réussie.
Par ailleurs, Dubois fait nous entrer dans cette histoire d’une manière harmonieuse,  avec une écriture magnifique pleine d’animation et un choix attentif de vocabulaire et de registre qui varient d’un personnage à l’autre. Bien que son roman abonde de descriptions détaillées de la prison, des personnages, des lieux et même du climat, nous ne nous ennuyons jamais de la lecture et nous sommes spontanément transportés jusqu'à la dernière page. De plus, les personnages avec lesquels le lecteur oriental peut s’identifier sont infiniment touchants et sont traités avec beaucoup de profondeur.
En somme, « Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon, c’est un livre qui mérite bien son titre, un roman qui vous montrera  beaucoup de philosophies de vie qui s’opposent, un livre fort, émouvant et étrangement consolateur qui va vous laisser en admiration de tous les aspects de la vie humaine avec sa beauté et même avec ses moments de cruauté.
Mennatallah Waguih Ali
Faculté des Langues (Al-Alsun) 
Université Ain-Shams, Egypte






[1] Club de motards criminalisés et mondialement connus
[2]  Immeuble d’une soixantaine de résidents


Jean-Luc COATALEM
La part du fils
Éd. Stock, 2019 (262 p.)
Motif d’arrestation : Inconnu
            Le livre dont il est question est un récit intime, un récit familial, un récit collectif, un récit de mémoire, un récit investigateur. L’audace et le saisissement se dégagent du livre. Le point le plus percutant est le côté paradoxal du roman où le chagrin et l’espérance se rejoignent : l’auteur tente de resusciter un homme disparu durant la deuxième guerre mondiale. L’auteur a pour intention de rendre hommage aux personnes courageuses disparues, de susciter les lecteurs à réfléchir sur le silence transmis d’une génération à une autre, de recréer cet homme disparu afin de le faire revivre, et de réconcilier le passé omis et le présent pénible. Le narrateur essaye de divulguer l’histoire de son grand-père qu’il n’a jamais connu, et de combler le vide qui l’anéantit. Ce roman radoucit les cicatrices du silence, provoquées par le malheur et la détresse de la guerre. Il embrasse les lacunes que nous vivons.
            1er septembre 1943. Finistère. Une voiture de la Gestapo arrive et emporte un homme qui ne réapparaitra plus. Cet homme est le grand-père de l’auteur. Ce dernier décide de partir à la quête de son aïeul. Mais, il est confronté au silence familial. Il enquête, plonge dans le silence, le secret : il inspecte les lieux, les dates, les papiers, s’interroge sur le passé, et fouille ses origines pour rétablir les attaches familiales et notamment le lien père-fils ; ce qu’ils ne savaient pas le hantait, lui, et ce qui était tu, effacé ou presque, l’assaillait encore.
            Coatalem se transforme en perquisitionneur d’archives, en explorateur du passé, jusqu’à l’obsession : cette quête pour d’infimes particules que le temps avait dispersées, et pour laquelle il se dépensait sans compter, était devenue dévorante... Le silence s’installe autour du grand-père qui devient un sujet tabou. Jean-Luc Coatalem dédie ce roman à son père Pierre, fils d’un homme, d’un père déporté, et qui face au traumatisme du décès de son père, refoule sa peine pour entraver la propagation de cet évènement atroce.
            Le livre que l’auteur nous fournit est un roman concret dans lequel l’auteur mentionne des lieux, des dates et des circonstances de cette époque. Cependant, il insère des scènes fictives mais possibles pour combler le manque. Dans les passages où il parle de son voyage vers de nouveaux paysages, Coatalem utilise un style superbe de lyrisme. On a l’impression que les endroits et les maisons sursurrent des secrets.
Lisez ce roman. Vous allez peut--être le trouver un peu long , mais l’énigme qu’il nous offre en  vaut la peine.    

Léa KASSAB, Liban
Université Saint-Joseph 
Faculté des lettres et des sciences humaines, branche Saida
 
Dominique BARBÉRIS
Un dimanche à Ville-d’Avray
Éd. Arléa, 2019 (125 p.)
Une aventure tumultueuse

     Un dimanche à Ville-d’Avray. Un dimanche de confession. Un dimanche de révélation. C’est le tourment, c’est la confusion, c’est le doute, c’est l’angoisse. Ce roman montre les troubles de l’être humain. Ce roman montre les conséquences d’un rêve irréalisable lorsqu’on est condamné à vivre une telle ou telle vie.Tout simplement, un roman émouvant.
     La narratrice nous dévoile la vie de sa sœur Claire Marie. Elle nous incite à assister à un film dans lequel Claire Marie avoue à sa sœur son histoire avec un homme hongrois qu’elle ne connait pas, au cœur d’une relation vivement désastreuse.
    Un dimanche à Ville-d’Avray est une combinaison, une mise en abîme de deux histoires. La première est celle de la narratrice qui vit à Paris avec son mari Luc et qui décide, un dimanche, d’aller à Ville-d’Avray pour rendre visite à sa sœur Claire Marie. Elle arrive chez sa sœur et elles commencent à parler du passé et de leur enfance. Ici, s’intègre une deuxième histoire : Claire Marie confesse à sa sœur son aventure avec un homme inconnu qu’elle a rencontré pour la première fois dans la salle d’attente de la clinique de son mari, Christian, qui est médecin. Cet homme invite Claire Marie à plusieurs rendez-vous qu’elle accepte mais sans savoir vraiment pourquoi. Mais, Mélanie, la fille de Claire Marie, arrive et interrompt le discours de sa mère. A la fin du roman, on revient à la première histoire quand la narratrice décide de retourner à sa « vie ordinaire » à Paris avec son mari.
     Dominique Barbéris insère le thème de la trahison, et le thème de la sensualité. Son intention est de présenter un sujet qui constitue une énigme. L’auteure nous montre l’état de Claire Marie, nous confronte à la psychologie de l’être humain, à sa complexité, à sa confusion, et à ses rêves qui parfois le consternent et l’écrasent. Elle mélange mystère et affliction.
     L’histoire de ce roman est simple, mais la manière dont elle est racontée est un peu complexe. Le présent et le passé se réunissent. Le mystère réside dans la description détaillée des lieux où Claire Marie et cet homme se retrouvent et dans sa description.
     Lisez ce roman, plongez dans sa thématique, admirez le personnage féminin que l’auteure vous offre, mais…

Léa KASSAB, Liban
Université Saint-Joseph
Faculté des Lettres françaises et des sciences humaines, branche Saida


Nathacha APPANAH
Le ciel par-dessus le toit
Éd. Gallimard,2019 (125 p)                  

La confusion

            Le récit commence par l’histoire de Loup qui est un petit garçon. Mais son caractère ne ressemble pas à celui de l’animal car trop timide. Puis il y a l’histoire d’Elitte. Ses parents sont surprotecteurs, ils lui donnent beaucoup de compliments pour favoriser sa confiance en elle. Elitte est gênée par les comportements de ses parents. Il y a aussi le récit de la sœur de Loup, Polama. Quelle est la relation entre Elitte et Loup? Comment se définit la relation entre Loup et Polama ? Est-elle une relation frère-sœur ou frère-mère?
            Il n’y a pas de chronologie dans l’histoire. Il y a une alternance ente le récit de Loup et celui d’Elitte. On n’a pas le temps de se poser des questions concernant les personnages et les événements. Ce changement entre les récits peut conduire à la confusion. Quand on veut savoir ce qui s’est passé avec Loup, on lit le récit d’Elitte, et quand on veut comprendre le récit de Elitte on se voit lire le récit de Loup. Les personnages sont complexes comme le récit.
            La lecture de ce roman est rapide. Le récit de Loup et celui d’Elitte sont intéressants. Cette alternance entre les récits, créée la curiosité et l’envie de poursuivre le récit.
C’est un roman qui parle de la façon dont les enfants sont influencés par leur environnement. Si vous êtes intéressés par ce sujet lisez ce roman.

         
Leila BAYRAM
Université Saint-Joseph
Faculté des Lettres françaises et des sciences humaines, branche Saida

Natacha APPANAH
Le ciel par-dessus les toits
Éd. Gallimard, 2019 (125 p.)

Un Phoenix par-dessus les toits

Le ciel par-dessus les toits est un roman de Natacha Appanah, romancière et journaliste mauricienne descendant d'une famille d’immigrés indiens de la fin de XIX siècle. Une écrivaine douée qui s’est tournée vers l'écriture lorsque le quotidien, L’Express, lui offre un prix littéraire et la possibilité de publier nouvelles et chroniques dans ses colonnes. Elle a écrit de nombreux romans dont nous pouvons citer les Rochers de Poudre d’or, Le Dernier Frère et Tropique de la violence, lesquels ont tous remporté des prix.
Dans son dernier roman intitulé Le ciel par-dessus les toits, la romancière braque la lumière sur 3 personnages en décrivant leurs traits psychologiques, leurs histoires et le flux de leurs pensées les plus intimes. Elle commence son livre par nous présenter “Paloma" une fille, et son frère “Loup". Paloma était en prison depuis 10 ans ; son frère lui était très attaché et par la suite très touché par son incarcération. Voulant rejoindre sa sœur, mais à sa manière, il a fait un accident de voiture. À noter que ce petit garçon souffrait d'une maladie de nerfs, il a été accusé d'avoir conduit sans permission et blessé d'autres personnes et a été jeté en prison.
Puis, l’auteure introduit un personnage qui joue dans le roman un rôle très important, à savoir la mère des 2 enfants, “Phénix". En utilisant la technique du flashback, Appanah nous parle de l'enfance de cette dernière pour comprendre l'idée profonde du roman. Prénommée à cette époque “Éliette", elle était une enfant si belle et si talentueuse avec une voie très agréable. Ses parents la traitaient avec un amour exclusif et exagéré. Ils voulaient la pousser sous les lumières de la célébrité. Cela se passait malgré ses pensées et son désir de vivre l'innocence de son enfance. Elle était obéissante à leur volonté. Ainsi, sa mère la faisait s'habiller comme une petite femme sans ressentir, par naïveté, ni la souffrance de sa fille ni les regards malsains que les hommes portaient sur elle en chantant sur scènes. Un jour, elle a été agressée sexuellement et dès ce moment, elle s'est complètement transformée de cette fille douce à une autre pleine de haine. Son enfance a été ruinée. Et là voilà après des années, elle est devenue “Phénix”, la femme indépendante, solitaire et alcoolique!
 Ayant beaucoup souffert pendant son enfance, Phénix était incapable de donner de l’amour à ses enfants. Elle s'est promis de ne jamais reproduire l'éducation qu'elle a reçue. Par conséquence, elle ne leur manifestait ni son intérêt ni ses émotions. C'est pourquoi elle leur a donné les noms de “Paloma" pour être libre et “Loup" pour être fort afin de tout affronter. Bien que les enfants se soient enfermés dans une solitude, chacun cherche à se reconstruire et à trouver l'amour en méditant le ciel par la fenêtre.
En fait, l'auteure a choisi le titre de son roman tout en s'inspirant du poème de Verlaine intitulé « Le ciel par-dessus les toits » qu’il a écrit pendant son emprisonnement. De ma part, je crois que la prison, dans le présent roman, concrétise la solitude cruelle des enfants, laquelle image a pris naissance dans le poème de Verlaine, qui était enfermé dans sa cellule et qui gardait un regard sur le monde grâce à une fenêtre. Il était absorbé par son lyrisme et avait une soif intérieure de liberté.
 En lisant ce roman, nous nous trouvons face à deux questions psychologiques assez complexes : Est-ce qu'on renaît de nos cendres comme le fait un Phoenix ? Ne devrions-nous pas laisser le passé douloureux de côté? En réponse, l'auteure résout cette controverse en deux mots, dès les premières pages du roman : “Parce que ce pays croit en la réconciliation du passé et du présent” (P.11). À en croire Natacha Appanah, on doit se débarrasser de nos souvenirs malheureux et mettre en avant l’intérêt de nos enfants. Sinon, on ne va que récolter des générations anormales ! Pourquoi alors les faire souffrir ? Quelle faute ont-ils commis pour mériter le malheur ?
Ce roman psychologique est visiblement louable parce qu’il traite un thème original et à la fois contemporain qu'on peut remarquer dans notre société tels que l'impact de notre éducation sur nos enfants et la rupture des relations familiales. De plus, la technique du retour en arrière crée un effet de suspense. De même, Appanah a réussi à nous attirer par la beauté des descriptions et des images filées. Elle a également bien utilisé le vocabulaire pour adoucir l'aspect morne et la noirceur des événements. En somme, il serait bien regrettable de manquer un tel plaisir de lecture.

Irini Ossama FAYEZ
Faculté des Langues (Al-Alsun) 
Université Ain-Shams, Egypte

Santiago Amigorna
Le Ghetto Intérieur
P.O.L éditeur, 2019 ,192 pages

Le ghetto intérieur, ou le mal-être

     Vicente, un jeune homme juif, a vécu son enfance en Pologne avec sa famille. Se sentant toujours différent en raison de ses croyances, il s’était passionné pour la Pologne en tant qu’Etat natal, ignorant le regard que portait la société sur les juifs. Il a tant aimé l’allemand, or celui-ci ne partageait pas cet amour vu les circonstances prévalues sur la scène. Soutenant son chef d’armée puis choqué par son retrait, il a reconsidéré sa position en tant que citoyen polonais. Aspirant à se libérer des contraintes familiales dites suffocantes, il a décidé d’émigrer en Argentine en 1928 laissant ainsi sa mère et sa famille là-bas.
    Devenant un citoyen argentin, il s’est marié à Rosita et a eu d’elle trois enfants. Quant à sa mère, elle ne se lassait point de lui envoyer régulièrement des lettres afin d’avoir ses nouvelles. Négligeant pour toujours sa mère, Vicente a été choqué par la nouvelle situation mondiale puisqu’Hitler dirigeait l’Allemagne et il avait pour obsession de se débarrasser des juifs. C’est à ce moment-là qu’il voulait le plus contacter sa mère pour pouvoir l’emmener en Argentine, mais en vain. Cet échec s’était traduit ainsi par un silence profond et continu, par une torpeur, par un état de somnolence ainsi que par une culpabilité qui rongeait sans cesse son âme. Plus qu’Hitler plaçait les juifs dans des ghettos, plus le silence et l’angoisse de Vicente s’accentuaient. La fin s’avère bouleversante : l’auteur intervient et révèle que Vicente était son grand-père.
    Une expérience personnelle se mêle ainsi à des faits historiques : l’écrivain a présenté méticuleusement la situation des juifs qui pâtissaient des mutilations commanditées par Hitler. Les ghettos, les pénuries d’aliments et d’eau, les camps, les centres d’exécution… nombreux sont les moyens auxquels le nazi Hitler a recouru afin d’exterminer les juifs. Le Shoah n’a épargné personne même les ascendants de l’auteur. C’est le côté sombre qu’il nous peint en partageant une partie de sa vie intime avec nous.
    S’ajoute à ces faits historiques répréhensibles la perte et la confusion de l’auteur. Auparavant, il adorait la Pologne et n’envisageait guère en partir. Une fois émigré et bien intégré à la société argentine, il est cessé d’être un citoyen polonais à proprement parler. De surcroît, son regard à l’égard de sa religion a beaucoup changé. Plusieurs questions éclatent : est-il polonais, juif ou argentin ? Quelle était sa vraie identité ? Et s’il n’appartenait à aucun des pays déjà cités, à qui appartenait-il ? Des interrogations sans cesse hantaient son esprit sans parvenir à une réponse rassurante et adéquate.
     La part psychologique dépeinte par l’auteur nécessite également une certaine réflexion. D’abord, Vicente négligeait complètement les lettres envoyées par sa mère et ne pensant jamais que la situation pourrait prendre subitement un cours différent. Une fois Hitler survenu sur scène, les doutes de Vicente se sont affirmés et ont influencé sa vie. C’est maintenant lui qui envoyait inutilement des lettres à sa mère pour l’approcher et essayer de la faire venir en Amérique latine. Tracassé par un sentiment de culpabilité cuisant, il ne partageait pas ses soucis et ses peurs ni avec sa femme ni avec ses amis. Il s’est éloigné peu à peu vivant ainsi dans son propre Ghetto Intérieur, s’infligeant ainsi une punition à lui-même, semblable à celle de sa mère.
      Ce livre, qui a déjà reçu plusieurs prix tels que le prix littéraire, Le prix des Librairies de Nancy, se distingue par un style simple, concis mais sombre et douloureux montrant ainsi l’incapacité de l’homme face aux changements extérieurs auxquels il ne peut rien. L’auteur, silencieux, a fait de ce livre les confessions qu’il n’a jamais osé exprimer. Pour ceux qui aiment goûter la douleur et la valeur des moments difficiles, pour ceux qui sont à la recherche de la réalité et de l’authenticité des faits, pour ceux qui veulent faire part des sentiments de l’auteur, ce livre leur sera le guide et la lumière vers une expérience exceptionnelle.
Julie Joseph
Faculté des Langues (Al-Alsun) – Département de Français
Université Ain-Shams, Egypte

JEAN-PAUL DUBOIS
Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon
Ed. Editions de l’Olivier, 2019, (196 p.)

Je suis l’Autre

  " Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères, sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots." Cette citation de Martin Luther King pourrait donner un bon résumé de l’histoire de Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon.
  L’histoire du dernier livre de Jean-Paul Dubois se déroule autour de la vie d’un personnage qui s’appelle Paul Hensen, un prisonnier né d’un père danois et une mère française. Le livre commence en prison provinciale de Montréal. Paul Hensen décrit sa condition en prison, là où la mort est répandue. Le personnage-narrateur raconte toute sa vie depuis son enfance. A travers les va-et-vient entre le passée et le présent, on fait connaissance avec beaucoup de personnages qu’avait rencontrés Paul pendant toute sa vie et ceux qui sont maintenant avec lui en prison, et leurs visions du monde si diversifiés. Il nous parle du mur d’incommunicabilité tiré entre sa mère et son père à cause des différences religieuses et idéologiques qui aboutit à la séparation, du son voyage au Canada et sa vie dans ce pays, de sa résidence dans un immeuble baptisé L’Excelsior, ainsi que son mariage avec Winona, une jeune femme d’origine différente de lui. Enfin, dans les dernières pages du livre, il raconte aux lecteurs l’histoire et la cause de sa détention, restée jusque là comme un mystère.
  Ce n’est pas pour la première fois que Jean-Paul Dubois nous partage son aventure dans le monde de la littérature. Il a fait ses études en sociologie. Déjà l’auteur de plusieurs romans et lauréat de divers prix littéraire, il commence sa carrière de l’écrivain en tant qu’un journaliste au service des sports. On voit la trace de cette expérience de manière parfaite dans ses œuvres.
  Le dernier livre de Dubois, comme son titre l’indique de manière très explicite, nous offre un tableau cosmopolite, mettant en scène les personnages de quatre coins du monde. Il nous y présente leurs attitudes, leurs points de vue et leurs modes de vie. C’est une occasion favorable pour connaître l’Autre, tout comme un long voyage. Pour cela, l’auteur délègue le personnage principal au Canada, connu comme le pays des immigrants. Ainsi, le grand immeuble dans lequel il réside, L’Excelsior, représente la vie collective dans la société, malgré toutes les différences idéologiques, religieuses ou intellectuelles.  Au fur et à mesure qu’on s’avance dans le livre et qu’on se rend compte de la raison de la détention de Paul, on saisit qu’il est condamné de ne pas être comme les autres ; comme « Meursault » que son indifférence l’a fait mourir, pas le crime qu’il avait commis. Paul aussi, est un étranger que personne ne le comprend.
   D’ailleurs, par les indices que met le texte à la disposition des lecteurs, on comprend le mécontentement de l’auteur de la situation présente du monde. La cellule de Paul est un refuge dans lequel il s’écarte du présent, projeté dans le monde des souvenirs. Il s’y enfuit de la réalité actuelle de sa vie (et même celle du monde). 
  Dans la situation présente du monde, qu’on a tant de conflits, tant de guerre et tant de crises, seulement à cause des différences entre les gens, la question de la reconnaissance de l’Autre, qui est le sujet de Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon, occupe une grande place dans les rapports humains. Mais le rôle de Dubois dans ce livre reste, malheureusement, comme un observateur. Il s’approche de son ancienne carrière du journaliste, et restreint parfois l’histoire à un simple compte-rendu mal développé (et même parfois trop fatiguant) des évolutions socio-historiques. Les scènes présentées et les incidents racontés restent comme un collage mal fait de divers événements, attachés forcément l’un à l’autre. Dubois ne nous offre pas une image approfondie de ces actions ; ce qui rend la lecture de ces deux centaines de pages très ennuyeuse.  Est-ce pourrait être un bon choix pour la lecture ? C’est à vous de décider !

Hanieh Raeiszadeh 

Université de Téhéran


MIANO Léonora
Rouge Impératrice
Editions Grasset,
2019 (603 pages)

Rouge impératrice : Un roman Afro-futuriste

Rouge Impératrice est à vrai dire tout un univers. Dès les premières pages nous nous ouvrons sur un récit qui nous projette dans une dystopie où, 100 ans après notre époque, l'Afrique est un continent uni et puissant, intitulé « Katiopa ». L’auteur y noue une histoire d’amour palpitante entre un couple que tout est censé opposer et séparer... Cette histoire d’amour se tisse sur une toile de fond marquée par des mutations identitaires et des enjeux politiques qui s’y mêlent.
Un roman captivant signé Léonora Miano, écrivaine qui ne cesse de nous surprendre par la diversité de ses thématiques et par ses choix romanesques. Caractérisée par sa vision afro-européenne, panafricaine et féminine, Léonora situe son roman dans un futur qui répond aux aspirations d’une grande partie de la jeunesse africaine actuelle qui rêve de panafricanisme, d’une fédération africaine puissante qui puisse se faire entendre et respecter partout dans le monde, et qui soit complètement autonome. Du fait qu’elle vit en France, Léonora est intéressée par les questions qui agitent la société française, dont notamment le nationalisme français contemporain qui est obsédé par l’idée d’une éventuelle invasion africaine. Par suite le continent africain les affolera et ils se verront, dans l’avenir selon le récit, noyés par les Africains qui n’auraient pour objectif que de se rendre en France. Dans ce récit d’anticipation, Léonora fait converger imaginaire et réalisme, et elle nous apprend que les Français, se sentant dépossédés de leur pays, ont décidé de le quitter et de se diriger vers l’endroit du monde qui leur est le plus favorable, l’Afrique subsaharienne. C’est ainsi que chaque population va s’installer sur le territoire de l’autre et que la balance du pouvoir se verra irréversiblement inversée.
Léonora nous met en scène une histoire d’amour entre l’héroïne Boya (la Rouge Impératrice), qui enseigne à l’université, et Illunga, le chef de l’Etat Katiopien unifié. Une histoire interdite, qui circule à contre-courant, et qui risque de devenir une affaire d’Etat. Pourquoi ? Car Boya l’héroïne s’est rapprochée des descendants d’immigrés français qui avaient quitté leur pays au cours du XXIème siècle. Par contre, son bien-aimé, le chef d’Etat, et ses ministres, envisagent d’expulser ces populations inassimilables. La Rouge Impératrice Boya, va-t-elle pouvoir désarmer la main du chef d’état comme elle a désarmé son cœur et fasciné son âme ? Pour les « durs » du régime, il faut à tout prix séparer ce couple.
En effet, l’aspect féminin est visiblement omniprésent dans le roman. Même le nom de l’héroïne Boya dérivé de Boyadishi, réfère à une ancienne guerrière qui s’est battu contre l’empire romain et dont le nom est devenu une légende en Angleterre.
Dans ce roman on témoigne d’un grain d’indépendance et de liberté féminine, d’une sororité, d’une charge d’intellectualité et d’une émancipation incarnée par Boya, qui bouleverse les considérations politiques et identitaires d’un continent en entier.
C’est Léonora qui raconte au discours indirect, en y intercalant quelques dialogues. Les pensées des personnages nous sont rapportées dans un récit qui se construit lentement car il est sans cesse enrichi par des discours informant sur le continent Katiopa, son histoire et sur le parcours de chaque personnage. Le style est vif, perçant et allant droit au but. Le roman met en exergue également la dimension spirituelle qui se noue soit entre les êtres humains, soit entre eux et la terre. Ainsi, le respect et l’égalité entre les êtres humains sont les seules règles qui comptent et tout différend peut être surmonté.
Ce roman vient ébranler nos réflexions sur l’identité, et proclame que les normes raciales ne doivent plus avoir de place dans notre monde, dans la mesure où nous sommes tous issus d’une même terre et avance que le concept de l’origine et de l’identité ne sont qu’une illusion infondée.
En fin de compte, ce roman nous plonge dans un monde africain fascinant, fier, prêt à dépasser tous les défis et les enjeux qu’il affronte, et qui est régit en premier lieu par l’amour et la réconciliation. L’amour entre les gens, l’amour de la Terre Mère, la réconciliation entre le passé, le présent et le futur, et l’amour de l’Autre abstraction faite de son origine parce que nous sommes tous dans le même bateau. Un roman qui mérite l’attention et l’hommage, et qui expose avec autant d’ardeur et de lyrisme le rêve Africain de l’unité et de la puissance.

Ghadir Hossam Saad
Université de Ain-Chams

Jean-Luc Coatalem
La part du fils
Editions Stock, 2019 (262 pages)

La part du fils : Une conquête du passé

Jean-Luc Coatalem est un écrivain français d’origine bretonne, et rédacteur en chef adjoint à Geo. Romancier et voyageur, il parcourt près de 80 pays à pied, à cheval, en ULM et en brise-glaces. Sa passion aux voyages apparaitra bien dans le déroulement du livre.
« Cette Brest blanche et grise, que Paol a aimée, a été aplatie, quasiment rayée par les bombardements, puis redessinée après guerre. Qui l’inventera de nouveau, avec lui, dedans ? » page 53. C’est facile de reconstruire une ville détruite mais il est impossible de reconstruire une famille déchirée par la guerre. Paol, grand père de l’écrivain, était un ex-officier colonial qui a fait la Grande Guerre (1914-1918) puis, comme la plupart des Français, mobilisé à la 2ème guerre mondiale (1939-1945). Il a passé une durée pacifique entre les deux guerres jouissant de son temps avec Jeanne, son épouse, Lucie, sa fille et ses deux fils, Ronan et Pierre. Mais lorsqu’une guerre commence tout change. Brest, là où vit Paol avec sa famille, a été occupée par l’Allemagne nazie. En 1943, sous le régime de Vichy, Paol a été arrêté par le Gestapo pour motif « inconnu » au début, mais dévoilé plus tard ; c’était à cause d’une lettre de dénonciation en faveur de la résistance. Pierre, qui avait alors 12 ans, a assisté à la scène d’arrestation pleine de frappes infligées à son père et des cris de sa mère. Suite à l’arrestation, la mort de Lucie et le départ de Ronan à Londres, la famille misérable composée seulement de Jeanne et Pierre, a vu Paol pour la deuxième et la dernière fois à la prison brestoise.
Dans « La part du fils », Jean-Luc ira à la recherche de son grand père. Il pose une enquête comprenant la cause de son arrestation, les camps, les prisons, les villes où il a été incarcéré(en France et en Allemagne) et son sort. Il a trouvé ces informations dans les archives microfilmées de la guerre mondiale en Allemagne et parfois à l’Unesco, par les témoins et les copains du même camp qui étaient tous français, et dans les musées de guerre qu’il a visités. En parallèle avec cette recherche et ces découvertes, l’auteur nous décrit la vie de Paol,  Jeanne,  Pierre et Ronan avant et après l’arrestation. Il présente aussi les évènements de la deuxième guerre mondiale avec toute sa sévérité et sa violence.
En lisant ce livre, nous avons l’impression que nous regardons un film documentaire dont les scènes se transposent entre le passé qui dépeint les événements de la guerre et la vie des personnages, d’une part,  et le présent qui décrit les rencontres de l’écrivain avec les témoins et ses voyages d’un pays à l’autre pour découvrir une nouvelle vérité et pour voir les camps devenus maintenant des  sites touristiques, d’autre part.
Dans ce livre, Jean-Luc fait l’honneur de son grand père dont il a ancré le nom dans l’histoire après avoir déployé beaucoup d’efforts dans ses recherches. C’est un livre très émouvant et touchant qui dévoile la brutalité et la barbarie de la guerre. La famille de Paol est une de milliers de familles qui sont complètement détruites par la guerre. Le style clair et attirant de l’écrivain vous oblige de sentir le malheur et la misère provoqués par la guerre. La fin du livre est très logique et pas si triste ; parfois il vaut mieux accéder à la vérité.

Iriny Georges Samir,
Université Ain-Shams, Egypte

Amélie NOTHOMB,
Soif,
Albin Michel, 2019, 152 pages

« Pour éprouver la soif il faut être vivant »

Dès 1992, la romancière belge, Amélie Nothomb, publie de façon régulière un livre chaque année. Contrairement à sa famille strictement catholique, cette fille n’a pas accepté les principes astreignants du catholicisme, elle les a jugés autoritaires. À l’âge de 12 ans, Amélie, victime d’une agression sexuelle causée par quatre hommes à la fois, elle a dû endurer un traumatisme foudroyant qui allait gravement perturber son équilibre psychologique : « J’ai soudain eu le sentiment de vivre avec un ennemi intérieur. Une sorte de monstre générateur d’angoisse. Ma vie a totalement basculé ». Conséquence : elle s’isola et commença à vivre un cauchemar qui, à l'âge de treize ans, l’entraîne à l'anorexie. 
Son 28ème roman, Soif, raconte les derniers jours de Jésus Christ sur terre, avant d’être crucifié. Par ses écritures et son style littéraire épique et assurément explicite, Amélie plonge imaginairement au fond de la tête de Jésus en tant qu’un être humain en chair et en os, et essaie d’extraire et de deviner son apophtegme intérieur, ses pensées, ses sentiments, ses craintes durant les dernières heures précédant la crucifixion.
Pourtant, et sous tous les aspects, il s’agit d’une focalisation interne du personnage, une récitation qui émane de sa sensibilité et de sa vision. En lisant ce livre, on peut entendre non seulement cette parole interne, silencieuse, secrète de Jésus, mais également celle de l’écrivaine qui a choisi de parler en utilisant le déictique subjectif « Je », ce qui nous permet de déduire les sensations et les sentiments à la fois de Jésus et surtout d'Amélie Nothomb.
Elle a toujours cherché le message le plus sublime de Jésus : l’amour. « Je suis une personne qui a soif », il s’agit, selon moi, d’un autre type de soif, d’un vif désir d’aimer et d’être réciproquement aimée par autrui, ou quiconque : parents, amis, collègues, amant… elle-même.
Soif, une histoire originale et unique, porte en elle beaucoup de zones épineuses, que ce soit pour les croyants ou les mécréants. Cette incarnation de Jésus a faussé la réalité historique des événements, et ce au niveau religieux, historique, et spirituel. L’écrivaine belge a contré le message évangélique effectivement mentionné dans la Bible, et proclamé par l’église jusqu’à nos jours. Elle considère donc dérangeante et paradoxale cette vision, étroite à ses yeux, raison pour laquelle elle démontre cette philosophie par son objection personnelle au verset biblique : « Aimer ton prochain comme toi-même », donc si Jésus a décidé de se sacrifier pour la rédemption de l’humanité, cela aurait vénéré sa propre souffrance, corporelle et morale, et en conséquence il dit implicitement « déteste-toi ». Dans cette optique, elle voit que la philosophie existentielle des religions en général, nous apprend à nous détester et donc à ne pas avoir la capacité d’aimer autrui.
En outre, à partir de la moitié du roman, le lecteur éprouve beaucoup de difficultés à suivre les événements rapportés par Amélie Nothomb. Jésus s’incarne en être humain pour une précise mission : le salut de toute l’humanité, ce qui rend anodins ses derniers instants, que Jésus radote et tergiverse exagérément. Cette anarchie de sujets et de sentiments nous égare dans un medley crée par Nothomb et portant sur l’humanité, la liberté de choisir, Dieu, la Sainte Trinité, l’amour, la haine, le sacrifice, l’humiliation et le pardon.
Le Jésus d’Amélie Nothomb est un être humain insurgé et révolté étant donné qu’il ose manifester aisément la colère envers le Père pour la mission fieffée que celui-ci lui a confiée pour un objectif ultime. Cette audace d’imagination qui se trouve chez notre écrivaine a sévèrement été critiquée par les ecclésiastiques et les clergés catholiques, qui ont considérablement considéré ce livre une déformation odieuse de Jésus Christ. Or, il y a un prêtre qui a désigné le personnage dessiné par Amélie par « Jésus-là » ce qui marque sa séparation entre Jésus d’Amélie, et le vrai Jésus Christ.
Quand on contemple profondément cette histoire, tout en dépassant les quelques premiers horizons qui nous viennent à la tête par une simple lecture, et on plonge autant dans la ficelle morale liant cette écrivaine à ce roman, on peut constater que cette femme cherche quelque chose qu’elle avait déjà perdu, peut-être c’est l’amour, elle aime trop son Jésus, ce jeune homme, tellement gentil et sympa, qu’elle a soigneusement dessiné pour qu’elle soit sa coqueluche. Nous tous avons également soif, les genres pourraient varier d’une région à l’autre, d’une culture à l’autre, etc. Il y a ceux qui ont soif d’amour, oui c’est tellement juste, mais pas forcément en Orient, notamment ces jours-ci où les peuples sont sollicités pour plus de sécurité, de protection, de famille, de liberté, d’abri…
Si Amélie y a projeté une soif d’amour, un quelconque être humain peut y projeter une toute autre soif. Si Amélie se distanciait d’elle-même en se glissant dans la peau de Jésus, pour y trouver refuge en contant, tout un chacun peut faire de même et mettre de son être dans ce roman.

Youssef Adel,
Université Ain-Shams, Egypte


Hubert Mingarelli
La Terre Invisible
Edition Buchet Chastel, 2019, (192 pages)

Une Terre Invisible enfin démasquée

Comme l’annonce l’intitulé de l’œuvre, ce roman nous envoie à la découverte de l’inconnu. Les événements  se déroulent, en 1945, dans l’Allemagne occupée. Le narrateur est un photographe de guerre qui ne parvient pas à regagner son pays natal, l’Angleterre.
Hanté par le souvenir de la libération d’un camp de concentration, notre protagoniste décide d’aller au hasard  des routes pour photographier les gens devant leurs maisons ;  une tentative entretenue de sa part pour comprendre  ce qui s’était passé et pourquoi ils cédaient toujours. Le reporter est accompagné d’un jeune soldat anglais nommé O’leary qui n’avait point vécu des horreurs de la guerre et qui va lui conduire la voiture tout au long de ce voyage mystérieux.  Le photographe errant déjà dans ce pays, se greffe à sa situation une indécision d’intentions.  D’où cet extrait illustrant un dialogue entre les deux voyageurs : « et où est ce qu’on va aller ? » Je lui répondis comme à moi-même : « je ne sais rien encore ».
Par un déclic sur le déclencheur, il semble que Hubert nous dresse une série d’anecdotes distinctes enregistrées dans la pellicule du photographe. En fait,  le lecteur aussi bien que le narrateur sont invités à établir des liens entre ces photos afin de déceler tous les éléments de l’histoire.
Ce roman nous révèle un trait humanitaire susceptible de figurer lors de ces guerres.  L’auteur nous permet de ressentir la sensibilité de son porte-parole vis-à-vis des cadavres ensevelis et des actes sanguinaires qui dénotent la cruauté et la barbarie de la Seconde guerre mondiale. Hubert Mingarelli a voulu nous transmettre sa conception de ces guerres atroces. S’ils s’en sortent vivants, les victimes, les mutilés et les survécus ploieront toujours sous le joug de la terreur et des traumatismes. Malgré le style inédit de l’auteur et le plan à la fois énigmatique et attrayant de la rédaction, « la Terre Invisible » nous laisse tourner en rond pour comprendre l’intrigue.


Christine fawzy,
Université Ain-Shams, Egypte
APPANAH Natacha
Le Ciel par-dessus le toit
Editions Gallimard (nrf), (125 pages)

Renaissance

       Natacha Appanah est à la fois journaliste et romancière française. Elle a écrit environ dix romans comme Le Dernier frère et Les Rochers de poudre d'or. Son dernier roman Tropique de la violence a eu un succès retentissant et a ainsi remporté quinze prix littéraires tels que le Prix France Télévisions et Prix Femina Lycéens.
      L’auteure a emprunté le titre du roman Le Ciel par-dessus le toit au fameux poème de Verlaine, composé durant son incarcération. Dès le titre, le lecteur est bien conscient que les personnages seront en quête de la liberté puisque le terme « ciel » connote l’ambition ou la délivrance alors que le substantif « toit » symbolise l’obstacle ou la prison.
La narration commence par « Il était une fois », ce qui nous donne l'impression qu'il s’agirait d’un conte de fées, mais à notre surprise, la réalité sera toute autre. Loup, enfant de 17 ans, qui est à la fois doué et talentueux « Ce garçon n'est pas comme les autres », souffre d'une crise d’angoisse qui le perturbe. Il décide de prendre la voiture de sa mère afin de rendre visite à sa sœur aînée, Paloma, qui a quitté la maison depuis longtemps et qui lui manquait tellement. Soulignons que Paloma s’est enfuie de la maison afin de s’éloigner de sa mère acariâtre. Substitut du sein maternel, Paloma représente la sécurité et peut être l’affection pour son frère. Loup décide donc d’entreprendre un long voyage en voiture alors qu'il n'a pas encore l'âge d’avoir un permis de conduire. Par conséquent, il a été emprisonné dans une maison d'arrêt. C'est ainsi que la romancière met en relief la solitude de l'enfant emprisonné et sa souffrance. De même, elle souligne le contraste entre l'enfant, incarnation de l’innocence, et la prison, symbole de la cruauté, par le biais de la description minutieuse de la cellule et des murs qui l’emprisonnent et l’étouffent.
     Appanah s’ingénie en choisissant les noms de ses personnages. L’enfant incarcéré s’appelle Loup, nom d’un animal féroce qui ne peut jamais être apprivoisé. Sa mère lui a donné ce nom pour qu’il ait de la force, une autorité naturelle et une position sociale remarquable, or, elle ne savait pas que « ce garçon allait être le plus doux et le plus étrange de ses enfants ». Il faut citer que la mère de Loup s’appelait Eliette, mais elle a choisi comme prénom, Phénix, le nom d’un animal légendaire qui a le pouvoir de renaître de ses cendres. Elle a fait une table rase de son passé infernal espérant ainsi entreprendre une nouvelle vie loin de ses souvenirs d’enfance qui la tourmentaient.
      A travers les retours en arrières, la romancière fait un zoom sur le passé peu glorieux de Phénix. Dotée d’une beauté époustouflante et d’une voix exceptionnelle, Eliette ou plutôt Phénix ensorcelait son entourage. Ses parents qui souhaitaient qu’elle soit la plus chanceuse et la plus joyeuse des filles et qu’elle profite de chaque occasion qui se dresse devant elle, exploitaient ses talents pour garantir une certaine position sociale.
APPANAH se révèle un fin psychologue en décrivant avec minutie l’état d’âme de la jeune fille qu’était autrefois Phénix.  Joues roses, cils recourbés, lèvres rouges, cheveux bien coiffés, Eliette, âgée de 11 ans, privée de son enfance, est alors livrée à la convoitise des hommes. L’accent est mis sur les regards du public et surtout ceux des hommes. « (…) ces regards-là l’atteignent, la salissent. Ces regards-là disent des choses qu’elle ne connaît pas encore mais dont elle pressent la violence et l’étrangeté ». Eliette déploie tous ses efforts afin de supporter les regards d’autrui aux dépens de ses sentiments. Elle monte sur scène et chante admirablement afin de rendre ses parents fiers d’elle.  Or, elle est prise d’hystérie à la suite du baiser sensuel de l’ami de son père, juste avant de monter sur scène pour divertir le public, lors d’une fête organisée par l’entreprise où travaillait son père. Une nausée soudaine s’empare d’elle, et elle se met à pousser des cris stridents qui provoquent l’effroi de l’audience et de ses parents. Elle se déshabille sur scène, commence à vomir et à arracher ce masque de femme dans une tentative de se débarrasser de l’odeur de cet homme grossier et antipathique. Eliette subit une métamorphose radicale à la suite de cette scène cauchemardesque : elle se recroqueville, repeint les murs et la porte de sa chambre en noir et s’habille en noir, couleur qui reflète sa mélancolie, son angoisse et son désespoir.
        L’accent est mis sur la relation mère-enfant. D’une part Paloma et Loup reprochent à leur mère son comportement envers eux. D’autre part, Phénix qui a dû élever ses enfants seule et a enduré des douleurs atroces surtout le jour de l’accouchement de Loup, souffre de ne pas être une bonne mère.  
Est-ce que Phénix sera finalement capable de se libérer des contraintes de son passé ? Est-elle la cause de la perte de ses enfants ? Sera-t-elle capable de sauver Loup, incarcéré dans la maison d’arrêt, et Paloma qui a abandonné sa maison ?

        Bref, Le Ciel par-dessus le toit met en scène des enfants victimes de leurs parents et d’agressions sexuelles. La romancière vise à dénigrer les abus des adultes notamment les parents. Elle critique également la société qui enferme les enfants dans des prisons sombres, tout en mêlant poème et prose, et en optant pour un style léger, attachant, à la fois rapide et haché. En effet, Natacha APPANAH se présente comme une écrivaine à la fois sensible et méticuleuse.  A vrai dire, le roman en question est un hymne à la liberté.

Fatma Mohamed IBRAHIM
Université d'Alexandrie

Nathacha APPANAH
Le ciel par-dessus le toit
Éd. Gallimard,2019 (125 p)

La confusion

            Le récit commence par l’histoire de Loup qui est un petit garçon. Mais son caractère ne ressemble pas à celui de l’animal car trop timide. Puis il y a l’histoire d’Elitte. Ses parents sont surprotecteurs, ils lui donnent beaucoup de compliments pour favoriser sa confiance en elle. Elitte est génée par les comportements de ses parents. Il y a aussi le récit de la sœur de Loup, Polama. Quelle est la relation entre Elitte et Loup? Comment se définit la relation entre Loup et Polama ? Est-elle une relation frère-sœur ou frère-mère?
            Il n’y a pas de chronologie dans l’histoire. Il y a une alternance ente le récit de Loup et celui d’Elitte. On n’a pas le temps de se poser des questions concernant les personnages et les événements. Ce changement entre les récits peut conduire à la confusion. Quand on veut savoir ce qui s’est passé avec Loup, on lit le récit d’Elitte, et quand on veut comprendre le récit de Elitte on se voit lire le récit de Loup. Les personnages sont complexes comme le récit.
            La lecture de ce roman est rapide. Le récit de Loup et celui d’Elitte sont intéressants. Cette alternance entre les récits, créée la curiosité et l’envie de poursuivre le récit.
C’est un roman qui parle de la façon dont les enfants sont influencés par leur environnement. Si vous êtes intéressés par ce sujet lisez ce roman.

         
Leila BAYRAM ,Liban
Université de Saint-Joseph

Santiago H. AMIGORENA
Le Ghetto intérieur
Edition P.O.L., (192 pages)


Un silence assourdissant

Santiago H. Amigorena est un écrivain scénariste Argentin du XXIe siècle. Né en 1962 à Buenos Aires, il est récompensé au Festival de Cannes pour ses écritures filmiques et remporte le prix des libraires de Nancy pour Le Ghetto intérieur -édition P.O.L- publié en 2019 et sélectionné à la fois pour le Goncourt et le Renaudot.
Dès 1998, l’auteur signe, à travers son écriture autobiographique, un pacte de sincérité avec ses lecteurs. En effet, Amigorena se lance dans son projet littéraire comme le révèle les titres de certaines de ses œuvres tels Une enfance laconique (1998), Une jeunesse aphone (2000), Le Premier Amour (2004), La Première Défaite (2012), Des jours que je n’ai pas oubliés, (2014), Mes derniers mots (2015) et Les premières fois (2016). Ces romans sont publiés presque selon une chronologie de son parcours de vie.                                       
Cependant, Le Ghetto intérieur se distingue par son titre métaphorique. En réalité, le mot « ghetto » renvoie aux quartiers dans lesquels on assignait les juifs ou toute autre minorité ethnique. Or, Le Ghetto intérieur a une autre dimension allégorique : Il nous appelle à penser à un deuxième ghetto, caché, dissimulé, presque invisible et inaudible ! Pourquoi un tel titre ? Comment peut-on en expliquer l’ambiguïté et la profondeur ? Est-ce pour créer un horizon d’attente ou pour annoncer un évènement majeur ? Horrible ? Émouvant ?
 L’histoire se déroule durant la Deuxième Guerre mondiale (1940-1945) en Argentine à Buenos Aires qui est le lieu de naissance de l’auteur. Il raconte la vie de son grand-père, Vincente Rosenberg, qui fuit la Pologne, en 1928, délaissant mère, frère et sœur pour migrer en Argentine. Vincente acquiert alors une nouvelle identité. Il va jusqu’à oublier sa langue maternelle, le yiddish et apprend l’argentin. Il ne réagit plus comme un juif, il n’est plus humilié et raillé ni par son entourage ni par sa propre famille. Il n’est même plus le jeune officier qui voulait défendre son pays natal, la Pologne. Il s’en libère. Libéré du fardeau politique, du fardeau identitaire et religieux. Mais peut-on, à n’importe quel moment, être capables de modifier nos origines qu’elles soient religieuses ou sociales ?                                                                        
En 1940, les premières égratignures surviennent.
La couverture du livre, choisie par l’auteur, reproduit presque les barreaux d’une prison d’où les mots silencieux, désespérés dans l’obscurité honteuse, ont hâte de s’enfuir. En effet, l’œuvre est formée de six parties plus ou moins égales, dans lesquelles l’auteur nous raconte la vie tragique de Vincente. Ce dernier est bouleversé par un sentiment de culpabilité qui l’accable tout au long du roman. Ses petits sanglots s’expriment dans des cris muets et déchirent lentement une âme qui cherche un repos difficile sinon impossible. Comme toutes les victimes impuissantes de la Deuxième Guerre mondiale, Vincente Rosenberg se mure dans un silence qui devient de plus en plus justifié au fil de la lecture. Les monologues poétiques spontanés du protagoniste sont écrits avec une théâtralité qui nous ancre dans sa propre réalité, celle de la guerre. Il semble que ses lamentations, du bout de l’Argentine, sont semblables à celles des milliers de victimes qui continuent à subir les conséquences de cette guerre.  
         À la fin du roman, la Victoire s’annonce ! Une double victoire : l’armistice puis la naissance. Mais y a-t-il encore un signe de vie ? Si oui, lequel ? Comment vivre avec cette culpabilité qui le rongera encore jusqu’à sa mort ? Seule, l’écriture semble être un refuge, une thérapie qui pourrait guérir du mal « intérieur » !


Diana SKAYEM
Université Libanaise
Jean-Luc COATALEM
La part du fils
Stock,2019 (261p.)

À la recherche du déporté numéro 38676
       
       Sous le régime de Vichy, Paol, le grand-père de l’écrivain est arrêté le 1er septembre 1943 par la Gestapo suite à une lettre de dénonciation : motif “inconnu.” Il sera conduit à la prison de Brest puis à Dora, à Bunchenwald et à Bergen-Belsen, aux camps de concentration nazis où il subira de la torture et fera du travail forcé. Malheureusement, il n’apparaîtra jamais. Après 70 ans de silence de la part de la famille ne voulant pas revenir au malheur, l’auteur-narrateur décide de partir à la recherche de son grand-père défunt. Il fouille, pendant des années, les archives en France et en Allemagne. Il a enfin trouvé dans un registre la fiche d’arrestation de son aïeul. En effet, cette fiche a été mal classée dans un dossier intitulé “Juifs, apatrides, romanichels et autres.” Malgré le fait que son grand-père n’était ni juif ni apatride ni romanichel, il n’y a aucune justification de classer la fiche d’un ex-officier dans ce dossier.  Dans une toile de fond historique rappelant la Deuxième Guerre Mondiale, l’auteur retraçant la vie de son grand-père nous fait découvrir en détail la torture subie par les déportés ainsi que l’exploitation de la main-d’œuvre française dans l’industrie allemande.
      
        À travers les recherches, les archives, les rencontres avec des témoins encore vivants, les enfants d’autres déportés et des gens qui avaient connu des gens qui connaissaient des gens que Paol avait côtoyés, Coatalem a en quelque sorte inventé le personnage de son grand-père qu’il n’a pas en effet connu “Et ce que je ne trouverai pas, de la bouche des témoins ou dans les registres des archives, je l’inventerai. Pour qu’il revive.” C’est un récit de mémoire et également une quête personnelle qui sert à libérer et à soulager l’écrivain de ses souvenirs douloureux. Coatalem constate que c’est son devoir de résoudre l’énigme de cette disparition devant le mutisme de Pierre, le père de l’écrivain, qui enfant, a vu l’arrestation de son père par la Gestapo au moment où il allait jouer avec son ami. Pauvre enfant ! Cette scène est ancrée dans sa mémoire. Portant le poids de l’absence paternelle, Pierre ne veut jamais parler de la vie de Paol. Alors, l’écrivain veut trouver le fil perdu pour que la famille” se refasse.” À cet égard, l’écrivain a mentionné dans une vidéo présentant son roman la ressemblance entre “fils” et “fil” parce qu’il s’agit de tisser les fils ensemble pour découvrir le secret de la déportation de Paol. Ce trou de la biographie constitue un puzzle à compléter, une mémoire à ranimer, une histoire à renouer et un mystère à déchiffrer. Chaque détail trouvé est comme une toile d’araignée qui commence à se tisser.
 
   Amateur de voyages et de reportages, Jean-Luc Coatalem nous emmènera dans un voyage sur les pas de ses aînés entre le présent et le passé en France, en Allemagne et en Indochine. Il nous délivre ses peurs, ses hésitations et sa souffrance.  C’est un récit nostalgique où la description minutieuse du parcours des indices trouvés lors de cette quête est à la fois émouvante et touchante évoquant chacun de nous ayant perdu un proche ou un parent dans les guerres. Que de morts et de massacres provoqués par la guerre ! Pour moi, ce n’est pas une simple quête personnelle mais c’est une tragédie universelle et une cause humaine rendant hommage à tous ceux qui étaient victimes des conflits meurtriers. Dans la postface, l’écrivain a rendu un très bel hommage à son grand-père bien-aimé “En dépit de sa fin tragique, il s’est agi pour moi de lui rendre, par-delà silence et oubli, un peu de sa vie forte et fragile.”
      Je vous conseille de lire ce roman qui vous fera suivre un chemin douloureux pour déchiffrer l’énigme de la disparition d’un homme qui a été déporté pendant la seconde guerre mondiale.
                                                                                                      Hania Ahmed.
Université d’Alexandrie, Egypte


Jean-Luc Coatalem
La Part Du Fils (2019)
Stock


PAOL : LE DEPORTE INCONNU

                    Jean-Luc Coatalem, né à Paris en 1959, est journaliste et écrivain français. À partir des titres de ses ouvrages Je suis dans les mers du sud et la consolation des voyages, nous pouvons admettre que cet auteur est voyageur dans l'âme. Le titre La Part Du Fils évoque le lien entre les deux termes (fils) et (fil) : cet ouvrage est une énigme à déchiffrer, un puzzle à compléter. La parenté entre ces deux termes révèle l’intrigue de ce roman : la recherche d’un grand-père perdu. Ce dernier nommé Paol a été arrêté et déporté violemment par la (Gestapo) en 1943. Coatalem a trouvé la fiche d'arrestation de son aïeul ayant pour motif (inconnu) ce qui a suscité sa curiosité. Dans ce roman Coatalem dépasse les limites du romancier et devient un détective privé qui mène sa propre enquête. Il veut dévoiler la vérité cachée depuis des années.
                 L’auteur- narrateur se sent alors responsable de cette quête personnelle que son père Pierre a négligée à cause de son deuil continuel. Mais est-ce-que Coatalem sera à la hauteur de l'enjeu ? Une question à laquelle il faut répondre et pour ceci il faut lire cette œuvre originale. L'écrivain a décidé de combattre le mutisme de son père. Nous trouvons dans La Part Du Fils la quête de soi, le petit-fils se demande incessamment qui il est et qui est ce mystérieux Paol
            L'auteur est très subtil en parlant des sentiments dans son ouvrage, il décrit minutieusement le silence de son père, sa souffrance et les difficultés que la famille a subies. En plus, dans plusieurs extraits, Jean-Luc Coatalem admet qu'il voudra bien ressembler à son grand-père Paol et que plus les années passent plus les visages des ancêtres se ressemblent. N'est-ce pas très sensible de la part d'un petit-fils qui n'a jamias vu son grand père.  L'amour de Jean-Luc Coatalem envers Paol se manifeste dans cette phrase "et ce que je ne trouverai pas de la bouche des derniers témoins, je l'inventerai pour qu'il REVIVE"
           Au début du roman, les lecteurs voient un style romantique dans la description de Brest et de son patrimoine tangible et intangible montrant ainsi l'amour dédié à la ville d'origine du romancier. Plus tard, le style théorique apparaît peut-être grâce aux recherches et aux déplacements que Coatalem a fait pour découvrir l'histoire de son grand- père. Ce style prédomine le reste du roman.
                          L’écrivain a parcouru tous les chemins pour déchiffrer l’énigme de la disparition de son grand- père Paol:  il est allé voir les prisons où Paol a vécu, il a voyagé jusqu'en Allemagne afin de trouver la moindre réponse qu'il cherchait (qui était son grand père et pourquoi ce soldat a été déporté?)       
       Il est à noter que l'auteur a fait de son œuvre une description historique et politique racontant de nombreux faits pendant la première et la seconde guerre mondiale.  
      En fin de compte, je voudrais bien mentionner que ce roman est extraordinaire, nous n'avons pas l'habitude de rencontrer chaque jour un auteur qui raconte l'histoire de son aïeul arrêté lors de la deuxième guerre mondiale. J'ai beaucoup aimé le fait que Jean-Luc Coatalem ressuscite les membres de sa famille même après le décès de beaucoup d'entre eux. Il faut aussi apprécier le mal que s'est donné l'enquêteur en prenant en charge la recherche de son grand père, alors que cela devrait être le devoir absolu de son père Pierre.
     Une histoire surprenante, des événements historiques, avec un style et des mots simples et efficaces forment à la fin un chef-d’œuvre très important. Je recommande donc vivement ce roman.

Mariam Mohamed Fathy
Université d'Alexandrie
     (Egypte)                    
MINGARELLI Hubert
La Terre invisible
Editions Buchet Chastel (192 pages)


Un style de narration discontinue

L’écrivain, à travers des dialogues inachevés et des moments de silence dominants et récurrents, présente au lecteur une atmosphère romanesque aussi sombre que les conséquences inévitables de cette guerre dévastatrice, la seconde Guerre mondiale autour de laquelle se déroulent les événements de ce roman. Il s’agit d’un roman de sensation : à la méthode de Proust, les protagonistes principaux sont très attachés à leurs souvenirs : un simple spectacle ou une mauvaise odeur, par exemple, fait revivre ces personnages des moments de mémoration : "- A Lowestoft quand j’allais dormir dans les dunes, je regardais la mère, comme ça aussi". Le photographe qui accompagne les Alliés envahissant l’Allemagne pendant la seconde Guerre mondiale, devient lui aussi un homme grossier qui se comporte méchamment et autoritairement avec le jeune chauffeur chargé de le faire visiter un vaste terrain de ce pays. Ce photographe-narrateur défile devant nous une grande série de photos variées et sans un vrai lien l’une avec les autres : on a l’impression, en suivant la description de ses multiples photos, de se trouver devant un tableau de collage surréaliste basé sur la juxtaposition inattendue des choses différentes et même opposées. Si chacune de ces photos raconte le plus souvent une histoire anodine ou banale, mais un regard plus large sur l’ensemble de ce tableau pourrait donner plusieurs significations, selon l’arrière-plan culturelle de chaque lecteur-spectateur. C’est pour cette raison que le photographe qui nous dessine les spectacles de ses photos, est incapable lui-même, de déterminer l’objectif de ses choix : "-  ….mais je voudrais te demander, la photo tout à l’heure, c’est pourquoi faire ? - Pour rien de particulier, comme ça." En parcourant cette Terre vaincue, l’Allemagne, ce jeune photographe en ramène tout ce qu’il voit pour le présenter tel quel au lecteur. Ce dernier s’attend, en feuilletant les pages de ce roman, à une péripétie qui annoncerait le début d’une vraie intrigue et la fin de la monotonie d’une narration descriptive sans but précis, mais le roman se termine sur un petit incident aussi banal que les autres. La déception que crée cette fin anodine chez le lecteur ressemble à celle qui s’empare des esprits des gens à la fin de chaque guerre : une fois que celle-ci se termine, les vaincus, et peut-être même les vainqueurs, se rendent compte de l’absurdité et de la nullité de ce choix atroce.          

Hussein AL MAHYAWI      
Université Al Mustansiriyah
Bagdad/ Irak                  
Amélie Nothomb
Soif
Edition Albin Michel (152 pages)

Soif

L’histoire de Soif est une révision du « dernier jour de la vie de Jésus Christ ». C’est un long monologue intérieur raconté par un Jésus recréé par Amélie Nothomb ; l’auteur bénéficie non seulement des évènements des évangiles canoniques, mais aussi ceux des évangiles non-officieux (comme l’histoire de l’amour de Jésus et Marie de Magdala). Elle ne sort pas du cadre chronologique présenté pour la vie de Jésus, alors la structure du récit reste la même que celle que l’on connaît de sa vie ; mais elle tâche de faire une nouvelle interprétation de la vie de Jésus et c’est là qu’elle fait entrer son imagination ; elle met elle-même à la place de Jésus et elle raconte sa propre interprétation par la bouche de Jésus. Elle n’a pas souci de vraisemblance, elle présente Jésus comme quelqu’un qui est omniscient, quelqu’un qui cite des citations des personnages d’avenir (Paul Valéry, Pascal, Proust, Malherbe etc.) quelqu’un qui utilise des expressions exclusivement françaises (C’est l’hôpital qui se moque de la charité : p.48) ; elle s’efforce pas du tout de cacher sa subjectivité dans la narration ; pendant la narration, Jésus plaisante beaucoup avec les apôtres, il les décrit très sincèrement, il critique leur comportement, il accuse même Jean l’évangéliste de mentir ; et ainsi elle critique implicitement les fondements du christianisme. A partir de la deuxième moitié du livre, la tonalité change d’un ton humoristique à un ton plus sérieux, mystique et philosophique, c’est pourquoi la deuxième moitié se lit un peu plus lentement. Dans la deuxième moitié l’auteur aborde une question principale : « pourquoi Jésus accepte-il d’être crucifié ? » la réponse selon les autorités du christianisme c’est qu’il accepte pour purifier l’homme du péché originel, l’auteur critique cette notion par la bouche de Jésus, et accuse implicitement ceux qui la présentent. Cette polémique et ce questionnement existent tout au long du livre, parfois avec ironie et parfois directement.
En conclusion, Soif est un œuvre d’art engagé, dont l’auteur par sincérité ne ferme pas ses yeux sur la vérité ; même si elle respecte le christianisme, elle n’accepte pas les notions illogiques attribuées à Jésus Christ et au christianisme.
Amirali Zolfaghari Varzaneh
Université de Téhéran

APPANAH Nathacha
Le ciel par-dessus le toit
Editions Gallimard (NRF), 125 pages

Dialectique de la révolte


« Il était une fois un pays qui avait construit des prisons pour enfants… »
Il était une fois un enfant, un garçon de douze ans qui était mis en prison parce qu’il conduisait la voiture de sa mère sans avoir permis de conduire. Sa mère, Phénix, dans le sens propre du mot – s’appelant autrefois Eliette-, s’était à l’époque, élevée contre ses parents et maintenant, c’est le tour de ses enfants, Loup et Paloma !
Loup (c’est un mot bien polémique pour un garçon si doux, n’est-ce pas ?) et Paloma (un pigeon !) abandonnent leur mère l’un après l’autre. Et qu’est-ce que nous pourrons prévoir lorsqu’on met un loup en prison et un pigeon loin de son nid ?
Le Ciel par-dessus le toit dont le titre évoque déjà un célèbre poème de Verlaine, est simplement basé sur l’idée de la prison, de la révolte, de la liberté. Un lecteur curieux demandera à la fin de ce livre : où se terminent les frontières de la prison ?  Est-ce que chacun de ces personnages ne se trouvent pas parmi les barreaux de leurs pensées mêmes ? Parmi leurs vies du passé ?
La lecture de ce livre nous mène à se poser un tas de questions, pourtant elle nous permet de vivre dans une famille bien que troublée, mais en tout cas humaine. Une vie apparemment tranquille et douce, tout comme les mots qui la décrivent, mais dans laquelle on est entré à l’incipit du roman par un poème en prose angoissant signé sous le nom d’écrou numéro 16587, que l’on ne reconnaît qu’à la fin du roman.
En lisant cette histoire familiale, nous nous trouvons face aux personnages enfermés dans la prison qu’à leurs avis, leurs parents ont bâtie. Donc, c’est là que la question de la révolte se pose. Les personnages principaux (Loup, Phénix, Paloma) sont toujours en train de dire « Non ». Mais ce qui fait ce livre intéressant, c’est qu’il nous fait vivre avec les personnages pour répondre à cette question : Est-ce qu’on devient heureux en disant « non » ? Est-ce qu’en nous enfuyant d’une prison que nos parents nous ont construite, nous serons libres ? Pourquoi on ne peut pas voir ce ciel bleu qui est par-dessus le toit de notre prison intérieure ?
L’intrigue de ce roman d’une centaine de pages est si émouvante qu’un lecteur curieux ne peut le laisser de côté que lorsqu’il l’a terminé à travers un excipit brillant, contenant un long discours de Loup, où il se sent ému, touché par le ciel bleu qui est par-dessus le toit…
Amirhossein Tasdighi
   Iran, Université d’Ispahan

Olivier ROLIN
Extérieur monde
Editions Gallimard (304 p)


Un cheval sans cavalier
« Quand je pense que lorsque je mourrai, avec moi mourront mon doute, ma lutte avec moi-même et avec les autres, toute ma curiosité et toute ma passion, je pense vraiment que le monde devra à ma mort une grande simplification. » (P.36)
Qu'est-ce qu'un homme sauf son propre narratif? Sauf les traces qu'il laisse dans son monde et dans le monde de ses interlocuteurs ? C'est la question indispensable à laquelle chacun de nous, répondrons au moment où nous nous trouvons face à la mort. C'est en effet, la question de la « récapitulation ».
Extérieur Monde essaie de répondre à cette question par la récapitulation des souvenirs. C’est l’histoire d’un homme qui est entouré par le brouillard des souvenirs au milieu d'un monde, des vies et des regards; un homme du passé, un homme qui ne veut pas se réveiller de son rêve et qu'un élan beaucoup plus fort que lui, un élan brutal qu'on nomme « le temps », le pousse vers un avenir indéfini, vers la mort. C’est l’histoire - si on peut le dire- d’un cheval sans cavalier, qui se perd au milieu du brouillard de l'avenir, qui essaie de garder à tout prix, ce qui lui reste défini, ce qui s’avère être en apparence vrai, mais qui n’est paradoxalement qu’un rêve, le rêve d’un passé perdu.
Le seul fil auquel il pourrait s’accrocher, c'est la mémoire « volontaire », la concrétisation de son vécu contre un monde tout à fait abstrait. Et c’est ainsi qu’il essaie de rassembler toutes les rencontres, les visages, les odeurs, les regards, les paroles et les livres lus, tous dans une boîte secrète qui est ce livre. Quand on ouvre cette boîte, on voit l'explosion des souvenirs. Hanté par la mort, et saisi par le regard pénétrant de la fatalité, l’auteur raconte tout avec une vitesse vertigineuse qui donne une apparence incohérente à l’écriture et c'est dans cette écriture spontanée que se manifeste l'explosion des mémoires, évoquée par une simple image d'un cheval sans cavalier, perdu dans le brouillard.
L'histoire nous mène dans une géographie personnelle. L’auteur cherche à « rabouter, coller des dizaines d’éclats de souvenirs, en recomposer un vase imparfait, fracturé, dont il ne serait que le vide central ». Le "je" peut donc facilement être modeste ; un lecteur qui devient l'ami proche de l'écrivain dont on sent la présence cachée derrière chaque mot et chaque souvenir. Le lecteur honnête comptabilisera quantité d’exemples comme « tressée de toutes celles qu’il a rencontrées » dans ce ni roman ni récit mais « écrit » comme l’auteur le précise, fabriqué par une plume élégante.
Enfin, la lecture de ce livre magnifique, nous sert à entrer dans une vie pleine de sens, pleine de mémoires, qui nous fait penser après tout à nos vies mêmes, à ce que nous avons vu, à ce que nous avons lu, aux traces que nous avons laissées dans notre monde et dans celui de nos proches.
Mina SHARIFI–Amirhossein TASDIGHI
Université d'Ispahan
Hubert MINGARELLI
La Terre Invisible
Éd. Buchet CHASTEL, 2019 (182 p.)

« Dites ouistiti »
Né le 14 janvier 1956 à Mont-Saint-Martin en Lorraine, il arrête l’école pour s’engager dans la marine à 17 ans, qu’il quitte trois ans plus tard. Hubert Mingarelli a reçu le prix de Médicis en 2003 pour son roman Quatre Soldats. Il a également reçu le prix Livre & Mer en 2006 pour Henri-Queffelec et prix Louis-Guilloux en 2014 pour L'Homme qui avait soif.  Cette année, la publication de son nouveau roman mystérieux La Terre Invisible nous a ému.
L’histoire parle d'un photographe anglais qui a participé au dernier combat et maintenant la guerre est finie, mais il reste en Allemagne et il n’arrive pas à rentrer chez lui. Il a l'idée de traverser l'Allemagne et d'aller faire sortir les gens de chez eux, des familles entières, de les aligner dans leurs portes et les photographier. Désespéré et triste, il cherche quelque chose pour calmer son âme. Mais qu'est-ce que cela pourrait être? Il commence cette mission avec un jeune chauffeur anglais, appelé O’Leary.
Le titre paraît tout d’abord significatif : l’adjectif donné au mot « Terre », fait référence aux sujets cachés. Les sujets que nous ne voyons pas et ne comprenons même pas correctement, et lorsque nous lisons toute œuvre, petit à petit nous avons saisi des choses évidentes et complètement concrètes, comme les photos prises et enfin c’est à l’interlocuteur de découvrir le secret du roman.
L'histoire se déroule en Allemagne, à Dinslaken. Parfois, l’espace change, de champ au champ et de maison en maison ! Nous sommes en juillet 1945, un an après la Guerre. La dimension spatio-temporelle de l’histoire est considérable et l'action est basée sur une chose : la photographie.
Nous sommes confrontés ici à une très grande problématique. Dans cette histoire, nous voyons très bien les contradictions, même dans le titre, La Terre invisible et les photos visibles, le fusil qui était toujours à la main du chauffeur est l'appareil photo, l'opinion d'O'Leary selon laquelle il a toujours voulu se battre, mais c'était trop tard, la guerre était finie et la pensée du photographe : pourquoi on tue quelqu'un ? pourquoi on doit voir des cadavres ? pourquoi on ne peut pas avoir les familles ensembles comme dans les photos prises ? L’idée du photographe devient enfin évidente : pourquoi la GUERRE ?
Les phrases ont une structure très simple. La maîtrise de la langue de l'auteur est ainsi appréciable. Cadavres, colonel, allemands, nourriture rationnée, fusil, drapeaux, il a touché énormément par ces mots, Mingarelli.

Zahra BAMPOURI
Université d’Ispahan, Iran
ROLIN Olivier
Extérieur monde
Editions Gallimard, 304 pages

Un retour de vie

Il y a des lectures qui s'avalent d’une traite et puis d’autres qui épuisent, ou plutôt, comme dans le cas de cet écrit, qui vous impatientent malgré la richesse de la langue. Ce livre d’Olivier Rolin est certainement à classer dans la seconde catégorie. Il impatiente le lecteur, le fatigue et le laisse à la traîne. Mais ce dernier s’accroche tant qu’il peut voir cette lumière du style d’écriture.
Plus d’une quinzaine de chapitres pour aborder cette question de la «mémoire» (bien que lui se refuse ce mot, je l’utilise volontairement car pour moi, ce sont des mémoires qu’il écrit ici). Il retrace sa vie en abordant ces choses : multitude de souvenirs littéraires, incessantes tribulations géographiques, bribes de vie décousues ou les femmes et le voyage ont tenu une place particulière dans sa vie, digressions de toutes sortes, remises en question de pas mal de choses constantes, rencontres des personnes qui ont eu de l’importance, livres et lieux qui l’ont vraiment particulièrement marqué, absences et absents tellement nombreux aussi.
S'il y a une chose à retenir de ce récit sur la forme, c’est la beauté de la plume d’Olivier Rolin oscillant entre humour, autodérision, poésie et nostalgie. C’est un plaisir de lire cet écrit pour quelqu’un qui aime les tournures, les digressions poétiques et les rencontres inattendues. Une forme certes belle mais qui peu à peu devient tellement alambiquée que l’on en perd le fond. Faut tenir bon pour pouvoir suivre une telle œuvre ou, comme dans mon cas, se laisser porter facilement vers le néant de compréhension. C’est incroyable, on saute de phrase en phrase, de paragraphes en paragraphes, de chapitre en chapitre, de lieux en lieux sans aucune logique apparente. Beaucoup trop de livres cités aussi, de noms et un grand nombre de listes de petites choses, listes que l'on apprécie au début (j’ai découvert que c’est original de mettre tant de «rien» en avant, en valeur) mais qui très rapidement lassent et que l'on saute cherchant (très souvent en vain) ce qu’il faut ressortir de cet écrit en fin de compte.
Pour conclure, j'ose commenter une phrase à la page 115 «Je sens que je perd des lecteurs». Vous avez vu juste. Parce qu’en effet oui, vous êtes en train de les perdre. Moi personnellement, j’étais à chaque chapitre à la limite de l’abandon mais j’ai tenu bon jusqu’à ce que la boucle soit bouclée, comme on dit. J'ai terminé ce livre en me disant : Ok ça se lit, le style est très beau mais tout ça pour quoi en fin de compte ? Les lecteurs ont-ils un réel besoin de le lire ?
Mohamed Yagoub Hanafi
Université de Khartoum

MINGARELLI Hubert
La terre invisible
Éditions Buchet Chastel, 192 pages

À découvrir

Après la Deuxième Guerre Mondiale, un photographe britannique n'arrive pas à quitter l'Allemagne pour aller chez lui. Il participe à la libération d'un camp de concentration. Il reste hanté par ce qu'il a vu et décide d'aller photographier ce peuple qui était complice d'un des épisodes les plus noires de l'histoire. Un jeune soldat qui n'a rien connu de la guerre est envoyé avec lui. Ils partagent tout dans ce voyage, les rations, l'inconfort des nuits passées dans la voiture. Mais ils semblent garder leurs plus profonds secrets pour eux-mêmes. Ils rencontrent beaucoup de gens pendant leur voyage, certains gentils, d’autres hostiles, des enfants et des grands. Ils étaient tous pris en photo.
Hubert Mingarelli, né le 14 janvier 1956 à Mont-Saint-Martin en Lorraine, est un écrivain et scénariste français. À 17 ans, il arrête l'école pour s'engager dans la marine, qu'il quitte trois ans plus tard. Il s'installe à Grenoble, où il exerce de nombreux métiers, puis commence à publier, vers la fin des années 1980. Il est lauréat du Prix Médicis en 2003 pour son roman Quatre Soldats. Il vit aujourd'hui dans un hameau de montagne de Matheysine dans les Alpes françaises.
Avec très grand talent, l'auteur de cette œuvre nous fait vivre le voyage de ses héros. Il nous crée une ambiance pour découvrir les surprises, le drame et la tragédie auxquelles ils étaient exposés. Dans ce roman, les personnages ne font que nous raconter ce qu'ils ont vu, avec beaucoup de transparence. Ils nous décrivent parfaitement ces passages et les gens rencontrés et nous laissent le dernier jugement. C'est un roman plein de mystère. Un mystère qui semble persister jusqu’au bout. Même les personnages principaux semblent avoir quelque chose de caché. Pourtant, ce n'est pas le genre de mystère qui rend la lecture impossible. Au contraire, il nous pousse à réfléchir, à faire des hypothèses pour en tirer une conclusion.
La description prend une très grande part du livre, la description du temps, des gens et des lieux, beaucoup d'images données, des phrases longues. Ce style d'écriture fait que ce livre devient comme une énigme à déchiffrer, ce qui peut plaire à beaucoup de lecteurs

Aïsha Hashim
Université de Khartoum


 Dominique BARBERIS
Un dimanche à Ville-d’Avray
Edition Arléa (125p)


« Est-ce qu’il arrive, à toi, de rêver d'autre chose ?»

« Elle a levé ses bras trop minces, ses coudes osseux, elle a ramené ses cheveux en arrière en essayant de les arranger. Elle a dit : le dimanche, on pense à la vie. » (p. 37)
Le dimanche, le jour qui nous réveille les souvenirs de l’enfance ; l’ennui, l’inquiétude, la pluie, les devoirs scolaires inachevés ; le jour où nous voulions tomber malade ; à la fois, le dernier et le premier jour de la semaine ; le jour de commencer, de cesser, de prendre les décisions difficiles.
Un dimanche à Ville-d’Avray, dixième roman de Dominique Barbérie, raconte l’histoire de deux sœurs, semble-t-il, issues de deux mondes différents, mais avec un passé identique, un passé qui n’est pas encore passé. Les souvenirs de leur passé, la vie en Belgique dans une famille sous tension, avec une mère nerveuse qui n’a rien d’autre que les rêves brisés. La réalité de la vie conjugale, l’ennui et les tâches ménagères ont changé la définition de l’amour chez cette femme rêveuse et maintenant, la vie de ses filles a également été confrontée à cette défaite.
L’histoire nous mène dans l’atmosphère humide de Ville-d'Avray, une ville au bord de la Seine. Le personnage principal, Claire-Maire, la sœur aînée qui cherche toujours un bonheur factice comme ceux des romans. Elle confie à sa sœur, l’histoire d’un amour interdit, d’un amour caché, d’un amour qui n’est pas permis. Elle parle d’un homme ténébreux, exilé de soi-même, d’un homme dont elle n’a rien su et dont elle ne sait jamais. La soif d’éprouver un amour dans les contes de fées, le désir de vivre les rêves au lieu de rêver la vie, pousse le personnage principal du roman vers un monde en clair-obscur et mystérieux qui est basé sur les questions fondamentaux : « Est-ce qu’il arrive, à toi, de rêver d’autre chose ? » La question qu’on s’interroge soi-même jusqu’à la fin du roman. Cette question peut faire remonter les coins sombres et oubliés de l’esprit, les passions révoltées contre la raison et les normes ou même, les décisions qu’on a dû prendre à cause des exigences de la société, de la maturité et de l’âge.
Un dimanche à Ville-d’Avray est un beau livre de 125 pages avec un style simple et délicat qui attire l’attention sur les divers aspects de la rêverie qui s’avère être l’élément le plus important de la vie humaine.
Mina Sharifi
Université d’Ispahan – Iran


MIANO Léonora
Rouge impératrice
Editions Grasset, 602 pages

Un monde captivant mais épuisant

Katiopa, un continent africain futuriste, unifié et prospère, se situe au XXIIème siècle. Une Afrique qui ressemble plus à des Etats-Unis du futur. Ilunga, chef de cette Afrique unifiée et Boya, professeure dans une université, sont les deux personnages qui travaillent à défendre des idées et des valeurs qui se contrarient. Rien ne les prédisposait à s’entendre, et pourtant, une histoire d’amour va naître entre eux deux.
Nous voilà jetés dans une Afrique qui n’est plus tout à fait la nôtre, que ce soit par culture, traditions, mode de vie, etc. C’est un nouveau monde qui vogue entre utopie et dystopie. A point que l’auteur utilise plein de vocabulaire camerounais (qui est expliqué dans une petite section Glossaire à la fin du livre) qu’on devrait apprendre et se familier avec progressivement. Le style est joli et c’est toujours intéressant de voir la créativité déployée pour construire un nouveau monde. Mais le livre ne tient pas ses promesses. Petit à petit, l’histoire devient fade et trop ardue. On passe extrêmement de temps à comprendre les passages complexes du livre qu’on peut facilement finir par se perdre. Alors, attention, ce roman n’est pas aisé à lire et il vous faudra rester actif pendant toute votre lecture. Des fois, le temps d’intégrer les mots africains crée une césure dans le rythme de lecture.
Ce roman mérite d’être recommander à quelqu’un qui n’est pas seulement intéressé par ce genre d’histoire et ce vocabulaire très local mais aussi qui est prêt à confronter ce nouveau monde étrange et distant.
Musab Masri
Université de Khartoum

DUBOIS Jean-Paul
Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon
Editions L’Olivier, 246 pages

Tragédie et Solitude

C’est l’histoire de Paul Hansen, un danois d’un père danois et une mère française. De sa cellule de prison, Paul nous raconte les difficultés qu’il a éprouvé dans sa vie et comment il s’est enfin trouvé emprisonné. Il nous raconte la vie de ses parents, comment ils se sont séparés et comment Paul a trouvé la femme de sa vie, et comment il l’a perdue.
Jean-Paul Dubois est né en 1950 à Toulouse. Il est non seulement écrivain mais aussi journaliste. Il a commencé par écrire des chroniques sportives et puis est devenu reporter pour l’Obs jusqu’à finalement finir par écrire de nombreux romans. Il a obtenu plusieurs prix pour ses livres.
Dubois a un style intéressant ou il mélange de l’humour noir avec de la dépression et du désespoir. Il nous attache à ses caractères complexes d’une façon vraiment unique, et il ne lâche pas jusqu’à la fin. Ce monde, dans lequel Dubois nous met, est un monde tragique, vulgaire et solitaire. Mais son sens d’humour nous fait sourire avec les personnages différents et réels, cela allège le sentiment dépressif qui nous entoure. C’est un antidote à la dureté de la vie.
Tout cela, c’est le côté eau chaude du roman. De l’autre côté, l’eau froide du roman est sa lenteur et son usage excessif de détails qui non seulement ralentit l’histoire mais aussi peut faire perdre la concentration. Il y a aussi beaucoup de découpages qui peuvent dérouter le lecteur un peu (par exemple, un moment Paul nous raconte ses souvenirs d’enfance puis soudainement il commence à parler de sa vie de prisonnier et de ses mésaventures).
En conclusion, ce roman est bien écrit et saisissant. Du coup, ceux qui connaissent et aiment Jean-Paul Dubois et ses œuvres, spécialement son roman La Succession, aimeront ce roman qui vaut la peine d’être lu.
Musab Masri
Université de Khartoum

BARBÉRIS Dominique
Un dimanche à Ville-d’Avray
Éditions Arléa, 125 pages

Balançoire de la vie

Les êtres humains sont attachés à leurs parents, leurs amoureux, leurs maris ou femmes, leurs enfants, ou par des événements soit heureux, soit tristes ou par des jours, des dates qui font notre mémoire et notre identité. Grâce à cela, nous sommes vivants. Imaginez un homme amnésique, qui est sans mémoire, sans passé, sans souvenir de son enfance, adolescent, sans famille, sans identité. Cet homme devient fou petit à petit et dans quelques années il ne va pas accepter d'être vivant. Au commencement du récit apparait un flash-back de l'enfance de deux sœurs. Une est la narratrice et l'autre s'appelle Claire Marie. Elles étaient mignonnes, elles aidaient leur maman aux tâches ménagères qui remplissaient sa vie. Elles aiment la poésie et regardent la télé. Elles sont hantées par M. Rochester et Jane Eyre, leur amour qui défend les obstacles et la discrimination de la classe. Claire Marie et sa sœur ont rêvé d'un homme qui ressemble à Rochester et d’un amour éternel. Elles jouent le rôle de Rochester et Jane Eyre. Elles ont rêvé d'une vie excitante qui est remplie de surprises. Tous les dimanches, leur mère fait une querelle avec son mari, le père est resté froid, il lit le journal et ne dit mot. Les deux sœurs les regardent et restent angoissées, la mère les surveille de loin quand elles font leurs devoirs. Donc, les deux sœurs n'aiment pas les dimanches du tout : elles voudraient une vie qui est le contraire de la vie de leurs parents.
Ensuite, la narratrice raconte leur vie, elles ont épousé de bons hommes, ils ont des maisons, de l'argent, mais ils manquent d'une chose essentielle. Elle relate que sa sœur, Claire Marie est la femme de Christian. Elle habite à Ville-d'Avray, mène une vie monotone, elle s'occupe de la maison, de sa fille Mélanie (qui joue du piano) et de son mari qui travaille comme docteur dans son cabinet. La femme du docteur travaille quelquefois comme secrétaire au cabinet. Sa sœur lui rend visite rarement le dimanche parce qu'elle habite à Paris qui est loin de Ville-d'Avray. Mais il y a une raison cachée, ce sont les terribles souvenirs que les dimanches leur ont apporté. Aussi, son mari Luc n'aime pas aller à Ville-d'Avray qui est ennuyeuse et très tranquille.
Enfin, Claire Marie a raconté une rencontre qu’elle a faite il y a quelques années. Comme d'habitude, elle travaillait au cabinet, un de patient a parlé avec elle de fixer le rendez-vous avec le docteur Christian. Il l'a regardée et a posé une question : « vous êtes la secrétaire ? » Elle lui a répondu : « Non, je suis la femme du médecin. » Puis, il est parti et elle a vu son prénom, Hermann. Le lendemain, elle est allée se promener et a croisé le patient. Il lui a dit : « quel hasard ! » (Mais est-ce que le hasard existe ou on l'a créé ?) Il lui a proposé de l'amener chez elle et de l'inviter au café, elle a accepté. Ils ont parlé de choses générales, il a dit qu'il est marié et il était immigré de son pays à cause du communiste à Budapest. Quelques heures plus tard, il l'a amenée chez elle et lui a donné sa carte et lui a dit qu’elle pouvait lui téléphoner si elle voulait quelqu'un avec qui partager une conversation. Sur la carte, il est écrit : Hermann, directeur d'une société d'export import. Des jours ont passé et les sensations de manque, de peine, de vide et de solitude les rattrapent. Elle a regardé sa carte et lui a téléphoné, elle lui a dit qu’elle avait vu sa carte par hasard. Il lui a dit le hasard existe mais on a le choix de l'accepter ou de refuser. Est-ce qu'il va la rencontrer encore ? Et quel type d’homme est cet homme-là ? Bien sûr, il n'est pas un homme normal, il sait beaucoup de chose sur elle. On le saura en fin de récit.
Le roman est écrit par Dominique Barbéris, romancière française, auteur d'études littéraires et enseignante à l'université, née en 1958 au Cameroun dans une famille d'origine nantaise, d'un père diplomate. Dominique Barbéris fait ses études à l'école Normale Supérieure de Sèvres et à l'université de la Sorbonne, après une enfance à Nantes puis à Bruxelles. Elle est passionnée de littérature, elle publie son premier roman en 1996. Sa production romanesque se caractérise par une peinture des atmosphères de province ou de l'enfance. Elle a obtenu le prix Jean Freustié / Fondation de France pour le roman L’année de l’éducation sentimentale (2018).
C'est une belle lecture de seulement 125 pages, un petit roman empli de mystère mais très réaliste. Aussi, l'écriture est délicate, empreinte de douceur. J'ai eu la sensation de tourner les pages d'un album photos à la couleur sépia… Qui n'a pas senti cette ambiance si particulière quelque peu triste du dimanche soir ? Ce qui m'étonne c'est que Claire Marie n'a rien su sur Hermann. Un homme étrange, mystérieux, louche et inquiétant. Tout juste a-t-elle appris qu'il est d'origine hongroise. Mais pourquoi donc s'est-elle alors engagé dans une telle histoire ? Pour tromper son ennui ? Casser le rythme d'une vie bien ordonnée ? Retrouver ses rêves de jeune fille où elle s'inventait des histoires de cœur avec Thierry la Fronde et Rochester ?
Ce livre va avoir un merveilleux avenir. Si vous cherchez la plaisanterie d'une histoire inattendue, allez lire ce livre. Croyiez-vous au hasard ? Vous n'êtes pas sûr de votre réponse ? Dans ce cas-là, lisez ce livre. Votre vie est monotone et vous êtes actif et quelqu'un qui a un imaginaire frais, vous devez le lire !
Nidal Mohammed
Université de Khartoum
Département de français – 4ème année


COATALEM Jean-Luc
La part du fils

Éditons Stock, (272 p.)

À rebours vers l’ancêtre
On voyage pour partir à la découverte de l’autre, affirme Olivier Follmi. Jean-Luc Coatalem décide de voyager pour « aller à la recherche d’[un autre], comme à sa rencontre » (p.16). Qui est cet autre ? Son grand-père, Paol. Le 1 septembre 1943, Paol a quitté à jamais ses enfants. Paol a été arrêté. Pourquoi ? Silence. Pourquoi ? Sujet tabou. « Qui était Paol, qu’avait-il fait ? » (p.32). Le besoin atavique d’une réponse pousse Jean-Luc à entreprendre ses recherches. Le bilan de ses investigations fera l’objet de son roman intitulé La part du fils paru aux Éditions Stock.
Suivre l’itinéraire du grand-père constitue le fil conducteur de l’histoire, la trame narrative de celle-ci. L’auteur a un défi à relever : Retrouver l’introuvable. Quelle audace !
L’enquête qu’il mènera n’est pas une tâche facile. Il redessine le parcours de son grand-père en partant de « quelques bribes arrachées, de miettes » (p.23). Il fait une récolte de journaux de l’époque, de dossiers, de mémos d’inspecteurs, de notes aux préfets, etc. Puis, il se met au travail.
Certes, un travail accablant ; cette quête est devenue une quête intime, une raison d’être.
Quête et enquête lui feront-elles perdre la tête ? OUI ! Tellement poussées à l’extrême qu’ « il [lui] fallut à un moment consulter un psychologue » (p.80).
Le cadre spatial joue un rôle primordial dans le déroulement de l’histoire. De l’Occident jusqu’à l’Extrême-Orient, l’auteur décrit minutieusement les villes qui jalonnent l’itinéraire de l’ancêtre et en particulier, Brest, Kergat, Compiègne (France) et Dora (Allemagne), lieux où Paol a passé le reste de sa vie, le reste de sa détention. La description des lieux est si authentique, l’effet du réel est si fort que le lecteur est projeté sur la route aux côtés du narrateur et impliqué dans l’évocation du passé de Paol.
Coatalem choisit ses mots avec sagesse. Mots simples, mots droits, mots justes, qui vont droit au cœur. Son style fluide coule sous les yeux du lecteur tel un doux jet d’eau. Et quand il s’agit de sentiments, Coatalem franchit les limites de la fiction et accède au monde réel, celui de son lecteur. Comment ? À travers les phrases simples et les questionnements intimes.
Coatalem a-t-il rapporté la vérité telle quelle ? Ou a-t-il cédé la place à son imagination ?
La réponse vous la trouverez vers la fin du livre. Au cas où vous douteriez de ses propos, il se prêtera volontiers à vos investigations.
Parviendra-t-il à réaliser son projet ? Restituera-t-il la vraie histoire de son ancêtre ?
À vous de le découvrir …
Aimée G. Salamé
Université Libanaise
JEAN-PAUL DUBOIS
Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon
Editions de l’Olivier, 2019 (256 p.)


Des âmes fragiles


« L’homme naît bon, c’est la société qui le corrompt », cette citation de Jean-Jacques Rousseau illustre la voie dans laquelle l’auteur emmène le lecteur. Le misérable Paul Hansen est emprisonné depuis deux ans pour une raison qui n’est pas précisée au début du roman. Tout ce qu’on sait c’est que le héros-narrateur a commis un crime qu’il ne regrette pas.
Hansen, comme le reste des prisonniers, mène une vie misérable au sein de la prison. Il partage une cellule de six mètres carrés avec un agressif membre des Hells Angel, Patrick Horton, incarcéré pour meurtre. Il souffre de la présence des rongeurs et de la manière inhumaine avec laquelle les prisonniers sont traités.
Hansen, qui a tout perdu - sa femme, ses parents, sa chienne et son travail - est très attaché au passé. Bien que décédés, des membres de sa famille continuent à lui rendre visite de temps en temps et hantent son esprit. Il ne cesse de penser à « l’Excelsior » où il était surintendant. Cet immeuble était son principal souci et il pouvait y déployer son énergie et ses talents de gardien, de concierge en plus de consoler et d’aider les résidents.
Tout au long du roman, il y a un va-et-vient permanent entre le présent et le passé, ce qui donne une épaisseur au temps. Ces sauts dans le temps, annoncés typographiquement par des blancs, permettent au lecteur de partager la souffrance du prisonnier pour qui le temps passe très lentement. Chaque minute dure jusqu’à l’infini. Ce passé permet aussi au héros de revivre des moments où il a senti le bonheur et la sérénité ce qui lui permet d’endurer la peine et le chagrin qui le torturent.
Ce qui caractérise cette œuvre c’est l’analyse psychologique subtile qui se dégage de chaque page. Les personnages de Dubois incarnent la faiblesse de l’être humain. L’auteur nous peint la faiblesse d’un corps exposé aux accidents et rongé par la maladie par le truchement de tous ces vieux et ces mourants dont Hansen recueille les dernières paroles. Cette vulnérabilité se manifeste aussi sur le plan moral. On rencontre un pasteur qui détourne les fonds de son église à cause des paris hippiques. L’enquêteur d’assurances négocie à la baisse « la valeur d’un défunt » et use de tous les moyens possibles pour diminuer la somme que la famille encaisse. L’auteur nous décrit également une personne qui a le goût du lucre et qui trouve normal de maltraiter ses homologues. C’est Edouard Sedgwick, le patron, qui ne cessait de tourmenter Paul Hansen et qui l’a entraîné, en quelque sorte, dans le gouffre où il est.
Cependant, le roman n’est pas exempt de ces moments lumineux qui procurent le bonheur et le bien-être comme les pages qui décrivent les moments passés en compagnie de sa femme et de sa chienne ou encore un séjour passé au Danemark avec ses parents.
C’est en ce sens que le roman reflète les deux aspects contradictoires du monde où nous vivons : l'injustice, la cruauté, la souffrance mais aussi l’amour, le dévouement, la tendresse, l’amitié. Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon est un appel à « minorer les fautes de chacun ». Malgré tout, c’est un message de tolérance et d’espoir qui se dégage de ce roman qui semble dominé par la tristesse et la cruauté.
L'écrivain possède un style fluide et unique. Le roman est parsemé de métaphores envoûtantes, de descriptions détaillées, de noms de marques, d’allusions à des auteurs, de phrases en latin, en anglais voire en danois. Le style est un mélange de précision qui frôle la scientificité, d’humour et de poésie.
A la lecture de cette œuvre, on se met en colère, on verse des larmes mais il nous arrive aussi de sourire. Quoi qu’il en soit, on a hâte de terminer la lecture de ce roman pour découvrir ce que fera Paul Hansen à sa sortie de prison.

Habiba Khaled
Université d’Alexandrie  
Hubert MINGARELLI
La Terre Invisible
Editions Buchet Chastel (180 pages)

L’art muet

Dans « la Terre Invisible », Hubert Mingarelli nous transporte vers l’Allemagne à l’époque antérieure à la seconde guerre mondiale. Notre protagoniste est un photographe anglais qui sera obligé de rester en Allemagne à cause de certaines circonstances. Ce dernier a assisté à un camp de concentration formé par les Anglais dont les images ne lui échappent pas. Lors de son séjour involontaire, il désire photographier les gens de cette Allemagne, cherchant une réponse dans ces images. Le photographe relate son voyage dans cette terre invisible plutôt inconnue, accompagné d’un jeune soldat anglais O ´leary. Ils portent sans destination, sans but: c’est tout à fait l’errance. Le voyage est traduit par un style très modeste et fluide. Il n’y a rien qui bloque la compréhension du lecteur. Ceci fait allusion au mouvement souple d’un automobile. L’écrivain adopte une économie de mots où les longues descriptions des paysages, les portraits et les dialogues sont quasi absents. Les répliques aux questions sont toujours incomplètes : « Je ne sais pas » ; « on verra ». On ne sait rien. C’est ainsi que le lecteur est emmené dans une ambiance de guerre très réaliste. Le silence et l’errance sont deux mots- clés qui reflètent l’état d’âme des gens après une guerre. Nous sommes traumatisés après l’atrocité vécue. La guerre est capable de torturer l’âme à jamais. À ce moment, la mort n’est qu’une clémence. Le lecteur découvre ainsi le pouvoir de l’image ayant la capacité de pénétrer au fond de l’âme. Cet art muet dévoile les émotions qui ne sont pas à la mesure des mots. 
 
Manale Hassan,
Université d’Alexandrie, Egypte



BARBÉRIS Dominique
Un dimanche à Ville-d’Avray
Éditions Arléa, 125 pages.
                                                                          Un rêve oublié
Résidant d'un quartier tranquille et beau à quelques kilomètres de Paris, Claire Marie mène une vie monotone, avec très peu de distraction. Femme au foyer, elle a comme seule occupation l'éducation sa fille et aider son mari dans son cabinet médical si besoin. En surface, cette vie ne semble point la déranger. Mais tout au fond d'elle, elle attend que quelque chose se produise. Un dimanche, surprise par sa sœur qui vient de Paris pour lui rendre visite, Claire Marie prend son courage à deux mains pour lui raconter sa rencontre avec un inconnu. Comme une pierre lancée dans un lac, cette rencontre ne l'a pas laissée indifférente. Brisant cette chaîne d'habitudes qu’était sa vie et lui donnant un goût nouveau qu'elle n'a jamais eu la chance de connaître. Aussi grave que lui paraissait cette rencontre, Claire Marie se sentait poussée par quelque chose d'incompréhensible à aller jusqu'au bout. Une histoire mystérieuse et violente comme notre insatiable besoin de romanesque.
Dominique Barbéris, née en 1958, est une romancière française, auteure d'études littéraires et enseignante universitaire. Elle est l'auteur de neuf romans dont La Ville (1996) et L'année de l'éducation sentimentale (2018) qui a reçu le prix Jean Freustié.
Ce livre est un récit auquel beaucoup de nous peuvent s'identifier. Le titre peut tout résumer en un mot. Dimanche. Et pourquoi parmi tous les jours, un dimanche ? Peut-être parce que le dimanche c'est le moment libre, loin des devoirs et des occupations, on a le temps de penser à autre chose, à nos propres vies, nos rêves, nos desseins oubliés. Pour Claire Marie, rien n'était plus redoutable que ces dimanches. Depuis son enfance, elles les avaient détestés. Ayant une éducation très traditionnelle, Claire Marie était rêveuse. « Elle n'a pas les pieds sur terre » comme la décrivait sa mère. Elle ne cessait de rêver qu'un jour elle s'envolera de là où elle était, qu'elle mènera une vie pleine d'aventure. Le temps passe et ces rêves d'enfance tombent dans l'oubli. Pourtant, on dirait qu'elle attend toujours quelque chose en silence. Avec grand succès, l'auteur nous transmet l'image de son personnage principal. Elle nous fait comprendre le déchirement face auquel elle se trouve entre ses rêves et sa vie réelle. Une vie dont elle a toujours rêvé ou la sécurité de sa vie actuelle.
Le style d'écriture est plutôt simple, fluide avec assez de description pour les lieux, les personnages et l'atmosphère. On y trouve aussi des dialogues. Il est sans doute un livre intéressant que je conseillerais de lire.
Aïsha Hachim
Université de Khartoum


Santiago AMIGORENA
Le ghetto intérieur
Édition P.O.L (191 pages)

Un malheur hérité

Né à Buenos aires en 1962, Santiago Amigorena est un écrivain Argentin qui a vécu en France. Il a produit une série d’œuvres afin de « combattre le silence » qui l'étouffe depuis sa naissance et de chasser toute interrogation sur la vie. L'auteur offre aux lecteurs une méditation sur l'exil et le poids du silence.
Le Ghetto intérieur est un roman qui trace la vie de Vincente, le héros, et reflète son état d’âme ainsi que celui du narrateur. En effet, le lecteur découvre à la fin du récit que l'écrivain Amigorena part sur les traces de sa propre vie à savoir l'histoire de son grand-père suivant un long cheminement. Il a donc hérité le silence imposé à son grand père.
Vincente est un jeune juif polonais arrivé en Argentine en 1928 abandonnant derrière lui sa famille polonaise sans jamais répondre aux lettres de sa mère. Et en Argentine, il a fondé une famille et a mené une nouvelle vie autonome.
À la suite du déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, la communication épistolaire a été quasi achevée entre Vincente et sa mère. Et pourtant, au moment de l'ampleur de la situation lors de l'arrivée de Hitler, Vincente a vainement tenté plusieurs fois de convaincre sa mère de le rejoindre à Buenos aires. Il entend enfin parler du Ghetto de Varsovie imposé aux juifs de Pologne où sa famille résidait.
Tiraillé entre des sentiments mitigés : culpabilité, impuissance et confusion, Vincente devient un spectre, et il s'enfonce dans un silence amer, noir et épais. Celui-ci permet à Vincente de se remettre en question, et d'examiner son identité jonglant entre la religion et l’éthique.
« Vincente était un jeune juif ou un jeune polonais ou un jeune Argentin. En fait, le 13 sep 1940 Vincente R. Ne savait pas encore ce qu’il était » P.14
Le protagoniste se perd donc sous l’effet de cette pensée déroutante sur l’identité ainsi que sur le sort de sa famille en entier. Il devient tout court un homme frustré, sans âme.
Le narrateur a donc réussi par un style fluide, simple mais assez profond et émouvant à imprégner le lecteur dans son récit ayant une clôture dynamique et une note finale qui fait appel à une nouvelle réflexion : espoir ou suicide ?
Le roman est assez intéressant à décrypter, truffé d’événements aussi bien historiques tels que la Shoah, le régime nazi, et l'antisémitisme que sociaux voire même parfois psychologiques ; ce qui nous plonge dans une véritable aventure à travers le temps.

Lina Ahmed et Mariam Abdel Messih
Université d’Alexandrie 


Natacha APPANAH,
Le ciel par-dessus le toit.
Gallimard, 2019, (125 pages)

Une faute de jeunesse

Il était une fois un endroit ouvert sur la mer, le ciel et la terre. Dans cet endroit, chaque chose avait une histoire et chaque chose contenait une promesse. (p.125)
C’est la clausule de ce roman de 125 pages édité chez Gallimard et rédigé par Natacha Appanah. L’écrivaine d’origine indienne a connu tourmentes et désarroi durant sa jeunesse, elle ne savait pas quelle était son origine ni dans quelle terre elle avait pris racine. Elle commence son récit par un poème semblable à celui de Paul Verlaine. Le titre lui-même « Le ciel par-dessus le toit » est significatif. La référence au poème de Verlaine programme d’emblée le discours narratif.
Le poète a souffert durant toute sa vie de l’incompréhension de son entourage et s’est retrouvé en prison après une tentative d’assassinat (tout comme Loup, un des personnages du roman).
                                               Si je dis le vrai nom des choses […]
La beauté et la tendresse et l’imagination s’envolent par la fenêtre
[…] Je ne suis qu’un garçon de l’ombre.
Il s’agit d’un jeune homme de 17 ans qui prit l’initiative de fuguer au bord d’un véhicule afin de retrouver sa sœur et de renouer avec elle. Ce jeune homme est encore loin d’une conduite sensée et sereine. Ses idées tumultueuses et embrouillées semblent incohérentes au lecteur.
Les protagonistes du roman racontent chacun son histoire selon son propre point de vue et jettent un regard panoramique sur leur vie et celle des autres membres de la famille.
Eliette, surnommée plus tard Phénix, se rebelle contre l’avenir tout tracé que ses parents lui destinent en mettant le feu à leur domicile. Elle s’autocritique d’ailleurs dans le récit. Elle évoque le mur d’incompréhension qui s’est dressé entre eux :« Ses parents la regardaient désormais, avec un mélange de pitié et d’incompréhension et plus d’une fois, elle a cru qu’ils allaient la secouer, lui demander de leur rendre maintenant, tout de suite, leur petite fille chérie » (p.23)
Le désarroi d’Eliette dû à un événement qui bouleversa sa jeunesse se manifeste par un cri de détresse, des silences, des élans de tendresse et d’amour que le lecteur perçoit au fil du texte.
Loup son fils, désemparé lui aussi, Paloma sa fille, le grand-père maternel, le gynécologue, chacun jouera un rôle primordial dans la vie de l’autre et orientera sa conduite.
Les souvenirs douloureux teintés d’amertume sombre sont amortis par des passages descriptifs aux couleurs vives. Loup est emmuré dans son incapacité d’exprimer haut et clair ses désirs. Il s’acharne à sa manière et tente de recoller les lambeaux d’une vie familiale brisée. Réussira-t-il à rapprocher les deux personnes qui comptent le plus pour lui ? Sa mère et sa sœur pourraient-elles un jour se retrouver ? Dialoguer ? Eliette connaitra-t-elle enfin le goût du bonheur ? Pourra-t-elle enterrer son passé ?
La simplicité et la poésie du discours narratif donnent au lecteur l’impression d’évoluer dans un conte de fée.
                                                                                              Emmy Fricke
                                                                                              Université Libanaise
                                              

Amélie NOTHOMB
Soif
Edition Albin Michel (152 pages)


Evangile selon Nothomb

Le fait de publier un roman dont le personnage est Jésus nous paraît déjà un acte courageux ; et Amélie Nothomb nous semble beaucoup plus courageuse en écrivant un monologue intérieur de Jésus intitulé Soif publié en 2019 par l’Edition Albin Michel. L’auteur, élevée dans une famille catholique, trouvait quelque chose d’inadmissible dans l’histoire de Jésus : le fait que celui-ci avait accepté d’être crucifié. La seule justification connue par tous les chrétiens, c’est-à-dire, le sentiment du sacrifice chez Jésus, n’est pas, d’après Nothomb, tout ce que ce dernier avait ressenti au chemin de la Croix.
Dans ce roman, toute l’histoire est racontée par Jésus. Nous sommes confrontés avec les pensées mystiques, les sentiments intérieurs et les angoisses de l’une des grandes figures de l’Histoire avant son destin atroce : la crucifixion. Nous pouvons trouver presque toutes les caractéristiques humaines chez ce Jésus décrit comme un être humain qui n’est pas forcément idéal et légendaire. Le récit se passe autours de trois notions majeures : Soif, Amour, et Mort ; et cela représente respectivement trois caractères du personnage, c’est-à-dire, caractère mystique, amoureux, et vraisemblable. Par exemple, quand le narrateur explique sa propre conception de la soif en disant que le moment de boire pour l’assoiffé est exactement ce qu’on appelle l’amour de Dieu et qu’il faut retarder ce moment de boire pour prolonger cet amour ; nous constatons l’aspect mystique que l’auteur attribue à Jésus. En plus, nous voyons un Jésus amoureux de Marie-Madelaine et un Jésus qui éprouve des sentiments de peur vis-à-vis de sa crucifixion. En effet, nous avons l’impression que Nothomb a essayé de nous décrire sa propre image, vraisemblable, de Jésus.
Précisément, ce qui est marquant dans cette œuvre est cet aspect de mélange dans le personnage de Jésus. Dans ce roman, le personnage-narrateur est une figure sacrée et sublime sur qui on écrivait durant les siècles mais il est en même temps ordinaire comme tous les hommes. En plus, ce caractère sacré est caricaturisé, pour ne pas dire désacralisé, par l’auteur car de temps en temps le narrateur évoque des remarques sur les Evangiles et sur les figures savantes postérieures comme Blaise Pascal. Donc derrière cette voix narrative accordée à Jésus, nous entendons la voix de Nothomb qui écrit son propre Passions du Christ, mais de manière plus moderne et plus littéraire.
Cet œuvre mérite d’être lu pas forcément à cause de son intrigue qui concerne Jésus, mais pour découvrir la complexité d’un personnage sublime qui est le héros de notre temps et que l’on peut accepter et croire. En outre, l’auteur a réussi de revivre encore une fois la figure de Christ et son aspect mystique en s’appuyant sur la notion de Soif qui n’est d’ailleurs pas une notion absente dans la poésie mystique iranienne, à savoir le célèbre vers de Rumi dans son chef-d’œuvre, Masnavi-I Ma'navi, qui dit « Ne Cherche pas l’eau, mais deviens assoiffé, pour que l’eau puisse jaillir d’en haut et d’en bas. » (Vers 3210, Livre troisième, La quête de l’absolu). En effet, ce roman se rattache thématiquement et grâce à son personnage à plusieurs autres chefs-d’œuvre de l’histoire littéraire. D’où le caractère original et universel de cet Evangile selon Nothomb.

Shaghayegh OROUJI

Université de Téhéran
BARBERIS Dominique
Un dimanche à Ville-d’Avray
Edition Arléa, (125 pages)

Rêve ou réalité ?

La nostalgie de ces moments d’insouciance, ces moments où les enfants rêvaient d’être des héros d’amour, surtout les dimanches soir, derrière les rideaux de leurs chambres, des pages de leurs romans et les écrans de leurs télés, deviennent toute une vie. « Le dimanche, on pense la vie » (p.37), la vie de Claire-Marie, la sœur de la narratrice du roman, de la romancière française Dominique Barbéris, Un dimanche à Ville-d’Avray, publié et édité chez Arléa en septembre 2019.
Cette stylisticienne de l’université de Paris IV tisse avec finesse les intrigues d’une rencontre à la fois amoureuse et brutale, avec un inconnu, un Hongrois, qui nous accorde l’occasion de dépouiller la trame de la double vie menée par Claire-Marie. Cette dernière qui se confesse à sa sœur, la narratrice, dont l’identité est voilée tout au long du roman, qui lui rend visite « l’autre dimanche » à Ville-d’Avray. « Il y a toujours du jeu dans l’espace et le temps » (p.45), comme affirmait la narratrice. Un jeu qui nous permet de découvrir que l’espace est toujours la « Ville-d’Avray » et le temps est fixe « les dimanches ». Ce qui donne la chance au lecteur de deviner la source d’inspiration de Barbéris. Évidemment, c’est le fameux film français, sorti en 1962, Les Dimanches à Ville-d’Avray de Serge Bourguignon.
            Toutes les deux tenaient dans leurs cœurs les souvenirs d’enfance, le rêve d’un amour fou. Cependant, ce n’est qu’à Claire-Marie que se donne l’opportunité de réaliser ce rêve ! En effet, cette femme semble vivre une vie « ennuyeuse » (p.9), comme la qualifiait Luc, le mari de la narratrice, tout en passant son temps à aider son mari médecin en tant que secrétaire : « elle traite par téléphone un symptôme banal, ou oriente des patients inquiets vers l’hôpital, mais ce n’est pas ce qu’on appelle « travailler » » (p.9). Cette vie ennuyeuse est illustrée également à travers la plume de l’écrivain qui, par les descriptions minutieuses de la Ville-d’Avray, nous laisse dégager le climat humide et pluvieux et l’ambiance morbide qui régnait sur cette Ville. Même les roses, « elles semblaient s’épuiser » (p.11). Le rêve et le besoin du romanesque se concrétisent dans la rencontre avec Marc Hermann, une rencontre qui va rompre l’ennui de la vie de Claire-Marie, tout en nous rappelant l’héroïne de Margueritte Duras, Anne Desbaresdes. Tout comme cette dernière, Claire-Marie « c’est à cause de lui qu’elle mit Mélanie au piano » (p.86). Lui, un Allemand, un homme qui semble maitriser l’art de feindre, tout en réclamant que son entreprise d’import-export est à Versailles : « il n’y avait pas d’Hermann à Saint-Cloud […] ce n’était pas une entreprise et l’adresse ne correspondait pas à celle de la carte » (p.108). Cet espace d’incertitude n’est pas seulement le résultat auquel Claire-Marie est arrivée. Effectivement, la rencontre des deux sœurs a eu lieu un dimanche des dimanches de Ville-d’Avray qui sont des dimanches tristes et fatigants, un des dimanches d’incertitude, de vide et de mélancolie : « le dimanche, tu ne trouves pas, certaines choses vous reviennent davantage ». Par conséquent, le sentiment d’hésitation domine la pensée de la narratrice, qui croit que sa sœur est en train de mentir : « comme si elle ne disait pas la vérité ».  Il serait intéressant de mentionner que l’écrivaine, par le bais de son style éloquent, met en mots cette trame narrative en ayant recours aux prolepses, aux souvenirs d’enfance de ces deux sœurs, qui semblent toutes les deux attachées au rêve, cherchent à le réaliser et à le vivre, à être satisfaites de leurs vies : « si je ne rêvais pas d’autre chose, si ma vie me satisfait » (p.29). Cette satisfaction n’est que la recherche d’un amour fou, d’un Rochester. Cette satisfaction n’est qu’une tentative de clonage de la personnalité de Jane Eyre qui, a un moment donné, laisse le lecteur confus devant l’identité de la narratrice : « Jane, j’ai peur de me mettre à saigner » (p.30). Barbéris transpose la pensée de ces deux personnages, avec un style direct, par le biais du dialogue, qui rend son texte vif et qui rend le lecteur proche de l’histoire. Par les descriptions minutieuses de la nature, des maisons et des personnages de Ville-d’Avray, elle détermine le cadre spatial de l’histoire. Alors que pour la temporalité, la stylisticienne se contente de la représentation des facettes des dimanches de cette ville.
 Dans ce roman, et par le biais de son style exubérant et expressif, l'écrivaine n’incarne-t-elle pas la personnalité de la narratrice ? Se croire vivre librement, avec son mari, qui devrait être son Rochester, son héros du rêve enfantin, serait-il l’argument qui explique les sentiments d’hésitation de cette narratrice entre rêve et réalité face à l’histoire de sa sœur ?

Andrea Mounzer
Université Libanaise – section 2

BARBÉRIS Dominique
Un dimanche à Ville-d’Avray
Éditions Arléa, 125 pages

Balançoire de la vie

Les êtres humains sont attachés à leurs parents, leurs amoureux, leurs maris ou femmes, leurs enfants, ou par des événements soit heureux, soit tristes ou par des jours, des dates qui font notre mémoire et notre identité. Grâce à cela, nous sommes vivants. Imaginez un homme amnésique, qui est sans mémoire, sans passé, sans souvenir de son enfance, adolescent, sans famille, sans identité. Cet homme devient fou petit à petit et dans quelques années il ne va pas accepter d'être vivant. Au commencement du récit apparait un flash-back de l'enfance de deux sœurs. Une est la narratrice et l'autre s'appelle Claire Marie. Elles étaient mignonnes, elles aidaient leur maman aux tâches ménagères qui remplissaient sa vie. Elles aiment la poésie et regardent la télé. Elles sont hantées par M. Rochester et Jane Eyre, leur amour qui défend les obstacles et la discrimination de la classe. Claire Marie et sa sœur ont rêvé d'un homme qui ressemble à Rochester et d’un amour éternel. Elles jouent le rôle de Rochester et Jane Eyre. Elles ont rêvé d'une vie excitante qui est remplie de surprises. Tous les dimanches, leur mère fait une querelle avec son mari, le père est resté froid, il lit le journal et ne dit mot. Les deux sœurs les regardent et restent angoissées, la mère les surveille de loin quand elles font leurs devoirs. Donc, les deux sœurs n'aiment pas les dimanches du tout : elles voudraient une vie qui est le contraire de la vie de leurs parents.
Ensuite, la narratrice raconte leur vie, elles ont épousé de bons hommes, ils ont des maisons, de l'argent, mais ils manquent d'une chose essentielle. Elle relate que sa sœur, Claire Marie est la femme de Christian. Elle habite à Ville-d'Avray, mène une vie monotone, elle s'occupe de la maison, de sa fille Mélanie (qui joue du piano) et de son mari qui travaille comme docteur dans son cabinet. La femme du docteur travaille quelquefois comme secrétaire au cabinet. Sa sœur lui rend visite rarement le dimanche parce qu'elle habite à Paris qui est loin de Ville-d'Avray. Mais il y a une raison cachée, ce sont les terribles souvenirs que les dimanches leur ont apporté. Aussi, son mari Luc n'aime pas aller à Ville-d'Avray qui est ennuyeuse et très tranquille.
Enfin, Claire Marie a raconté une rencontre qu’elle a faite il y a quelques années. Comme d'habitude, elle travaillait au cabinet, un de patient a parlé avec elle de fixer le rendez-vous avec le docteur Christian. Il l'a regardée et a posé une question : « vous êtes la secrétaire ? » Elle lui a répondu : « Non, je suis la femme du médecin. » Puis, il est parti et elle a vu son prénom, Hermann. Le lendemain, elle est allée se promener et a croisé le patient. Il lui a dit : « quel hasard ! » (Mais est-ce que le hasard existe ou on l'a créé ?) Il lui a proposé de l'amener chez elle et de l'inviter au café, elle a accepté. Ils ont parlé de choses générales, il a dit qu'il est marié et il était immigré de son pays à cause du communiste à Budapest. Quelques heures plus tard, il l'a amenée chez elle et lui a donné sa carte et lui a dit qu’elle pouvait lui téléphoner si elle voulait quelqu'un avec qui partager une conversation. Sur la carte, il est écrit : Hermann, directeur d'une société d'export import. Des jours ont passé et les sensations de manque, de peine, de vide et de solitude les rattrapent. Elle a regardé sa carte et lui a téléphoné, elle lui a dit qu’elle avait vu sa carte par hasard. Il lui a dit le hasard existe mais on a le choix de l'accepter ou de refuser. Est-ce qu'il va la rencontrer encore ? Et quel type d’homme est cet homme-là ? Bien sûr, il n'est pas un homme normal, il sait beaucoup de chose sur elle. On le saura en fin de récit.
Le roman est écrit par Dominique Barbéris, romancière française, auteur d'études littéraires et enseignante à l'université, née en 1958 au Cameroun dans une famille d'origine nantaise, d'un père diplomate. Dominique Barbéris fait ses études à l'école Normale Supérieure de Sèvres et à l'université de la Sorbonne, après une enfance à Nantes puis à Bruxelles. Elle est passionnée de littérature, elle publie son premier roman en 1996. Sa production romanesque se caractérise par une peinture des atmosphères de province ou de l'enfance. Elle a obtenu le prix Jean Freustié / Fondation de France pour le roman L’année de l’éducation sentimentale (2018).
C'est une belle lecture de seulement 125 pages, un petit roman empli de mystère mais très réaliste. Aussi, l'écriture est délicate, empreinte de douceur. J'ai eu la sensation de tourner les pages d'un album photos à la couleur sépia… Qui n'a pas senti cette ambiance si particulière quelque peu triste du dimanche soir ? Ce qui m'étonne c'est que Claire Marie n'a rien su sur Hermann. Un homme étrange, mystérieux, louche et inquiétant. Tout juste a-t-elle appris qu'il est d'origine hongroise. Mais pourquoi donc s'est-elle alors engagé dans une telle histoire ? Pour tromper son ennui ? Casser le rythme d'une vie bien ordonnée ? Retrouver ses rêves de jeune fille où elle s'inventait des histoires de cœur avec Thierry la Fronde et Rochester ?
Ce livre va avoir un merveilleux avenir. Si vous cherchez la plaisanterie d'une histoire inattendue, allez lire ce livre. Croyiez-vous au hasard ? Vous n'êtes pas sûr de votre réponse ? Dans ce cas-là, lisez ce livre. Votre vie est monotone et vous êtes actif et quelqu'un qui a un imaginaire frais, vous devez le lire !
Nidal Mohammed
Université de Khartoum

BARBÉRIS Dominique
Un dimanche à Ville-d’Avray
Éditions Arléa, 125 pages.
Un rêve oublié
Résidant d'un quartier tranquille et beau à quelques kilomètres de Paris, Claire Marie mène une vie monotone, avec très peu de distraction. Femme au foyer, elle a comme seule occupation l'éducation sa fille et aider son mari dans son cabinet médical si besoin. En surface, cette vie ne semble point la déranger. Mais tout au fond d'elle, elle attend que quelque chose se produise. Un dimanche, surprise par sa sœur qui vient de Paris pour lui rendre visite, Claire Marie prend son courage à deux mains pour lui raconter sa rencontre avec un inconnu. Comme une pierre lancée dans un lac, cette rencontre ne l'a pas laissée indifférente. Brisant cette chaîne d'habitudes qu’était sa vie et lui donnant un goût nouveau qu'elle n'a jamais eu la chance de connaître. Aussi grave que lui paraissait cette rencontre, Claire Marie se sentait poussée par quelque chose d'incompréhensible à aller jusqu'au bout. Une histoire mystérieuse et violente comme notre insatiable besoin de romanesque.
Dominique Barbéris, née en 1958, est une romancière française, auteure d'études littéraires et enseignante universitaire. Elle est l'auteur de neuf romans dont La Ville (1996) et L'année de l'éducation sentimentale (2018) qui a reçu le prix Jean Freustié.
Ce livre est un récit auquel beaucoup de nous peuvent s'identifier. Le titre peut tout résumer en un mot. Dimanche. Et pourquoi parmi tous les jours, un dimanche ? Peut-être parce que le dimanche c'est le moment libre, loin des devoirs et des occupations, on a le temps de penser à autre chose, à nos propres vies, nos rêves, nos desseins oubliés. Pour Claire Marie, rien n'était plus redoutable que ces dimanches. Depuis son enfance, elles les avaient détestés. Ayant une éducation très traditionnelle, Claire Marie était rêveuse. « Elle n'a pas les pieds sur terre » comme la décrivait sa mère. Elle ne cessait de rêver qu'un jour elle s'envolera de là où elle était, qu'elle mènera une vie pleine d'aventure. Le temps passe et ces rêves d'enfance tombent dans l'oubli. Pourtant, on dirait qu'elle attend toujours quelque chose en silence. Avec grand succès, l'auteur nous transmet l'image de son personnage principal. Elle nous fait comprendre le déchirement face auquel elle se trouve entre ses rêves et sa vie réelle. Une vie dont elle a toujours rêvé ou la sécurité de sa vie actuelle.
Le style d'écriture est plutôt simple, fluide avec assez de description pour les lieux, les personnages et l'atmosphère. On y trouve aussi des dialogues. Il est sans doute un livre intéressant que je conseillerais de lire.
Aïsha Hachim
Université de Khartoum

DUBOIS Jean-Paul
Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon
Éditions de l’olivier, (246 pages)


Une métamorphose digressive

     Détenteur du prix Femina 2004, auteur confirmé du XXIème siècle, Jean-Paul Dubois relate dans son nouveau roman intitulé Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon l’histoire de Paul Hansen, un occulte personnage d’une prison à Montréal. Étant journaliste et sociologue, Dubois est bien placé pour nous révéler la vie derrière les barreaux et surtout l’effet des corruptions dans le système juridique en nous plongeant dans un monde à effets de réel poignants. D’ailleurs, on pourrait se demander pourquoi, dans tous ses romans, le héros est-il toujours un Paul ? Ne serait-il pas possible que l’auteur éprouve le besoin de crier les maux de son monde à travers une forme d’autobiographie éclatée dans plusieurs œuvres ?
     C’est un roman au rythme très lent et qui s’ouvre sur la description d’une cellule de prison et évolue en opérant des flashbacks, créant chez les lecteurs d’infinis horizons d’attente. Avec un registre familier et un style débridé, le roman demeure proche de ses lecteurs. En effet, l’œuvre est audacieuse : l’ironie et le ton sarcastique sont adoptés par l’auteur afin d’évoquer la corruption des juges. Plongeant un peu dans les détails de l’œuvre, on comprend que Paul décide de voyager chez son père au Canada et c’est là-bas qu’il redécouvre la seule phrase qu’il retient : « Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon ». Son père disait cette phrase pour expliquer les erreurs de chacun. Et puisque Dubois relate la vie d’un prisonnier, fautif, il est pertinent que son œuvre porte cette phrase comme titre. La femme de Paul, elle, est une pilote d’avion. Contraste saisissant dans le jeune couple : Monsieur est prisonnier et Madame libre dans le ciel. Cet espace interminablement ouvert ou inexorablement fermé permet de mettre dans un même roman la mondialisation des problèmes et la crise familiale.
     Patrick, l’ami de Paul dans ce monde clos, apporte au roman son caractère spontané, sans aucun embellissement des réalités. Patrick a, dans ses affaires en prison, des revues de pornographie, des objets interdits. C’est l’occasion pour Dubois de remettre en question la nonchalance des geôliers ou l’échec de la diligence en prison. Patrick, unique « divertissement » de Paul en prison, fait une crise à chaque fois que son ami lui coupe les cheveux : l’allégorie du temps qui passe y est montrée de façon bouleversante ! En effet, le temps est à la fois lent et inexorable.
     La réussite de ce roman est donc due à la parfaite liaison entre le passé et le présent de Paul révélant implicitement une métamorphose vers le mal. Dubois se permet de pénétrer dans la prison et de relater les journées de leurs occupants comme un observateur très attentif. L’écrivain y trouve l’occasion d’accuser directement la justice de son terrible échec dû à sa corruption. C’est un roman indiscutablement sociétal et fidèle à la réalité.
     Chacun de nous pourrait un jour être à la place de Paul …. Parce que tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon…

Vanessa Joumaa
Université Libanaise, Fanar, section 2




NOTHOMB Amélie
Soif
Edition Albin Michel (162 pages)

Un « jeu » christique

« La Bible est une fontaine remarquable : plus on en tire et boit, plus elle stimule la soif. » Martin Luther
 Amélie Nothomb n’échappe pas à cette maxime. Pour son dernier roman, elle se penche sur l’œuvre littéraire majeure qui a bouleversé l’histoire de l’humanité : la Bible.
 Avec le « je » christique de la romancière, la critique s’acharne : « pour qui se prend-elle ? Comment ose-t-elle imagier le monologue intérieur du Christ dans ses dernières heures de passion ? ». Nothomb choque, trouble, heurte la sensibilité des uns et attise la curiosité des autres. Elle divague… Judas, traitre, meilleure ami de Jésus ? La si belle Marie Madeleine son amante ? Joseph et Marie ne sont que papa et maman ? Mais un roman n’est pas parole d’Évangile.  
 Pour Nothomb, le Christ, c’est Dieu incarné. Ce roman nous invite à une réflexion, même plus, une méditation sur le mystère de l’incarnation. Cette question du corps et de la chair, Amélie Nothomb la brasse à sa manière et à travers la voix de Jésus Christ. Ce Christ-là est humain, heureux d’avoir été incarné, sûr de son sort mais râlant un peu tout de même de devoir en finir avec la chair. Pour cela, le Jésus d’Amélie Nothomb jouit de chaque instant même les plus insignifiants. S’allonger pour dormir, manger un simple morceau de pain, boire une petite gorgée d’eau, lui « arracherait des soupirs de voluptés ».
 Jésus aime vivre et on ne peut vivre qu’à travers le corps. Jésus aime et grâce à son corps, véhicule de l’âme, il tisse des liens inoubliables. De sa relation avec Judas qui devient le symbole de l’amitié inconditionnelle ; de son amour pur pour Marie Madeleine; en passent par son attachement à ses parents, une vision si enfantine de « maman » et « papa »; jésus aime.  
 Dans cet évangile d’Amélie, la soif apparaît comme un contre-pied à la souffrance. Jésus, sur sa croix, pieds et mains cloués, prononce ces paroles canoniques «J’ai soif». C’est parce que durant sa nuit de veille, il refuse de boire l’eau de la jarre qu’on avait laissée dans sa geôle. Il sait, il dit, que Dieu est tout entier dans la première gorgée d’eau que l’on avale lorsqu’on a soif. Qu’il est même préférable de cultiver sa soif, d’en différer l’«étanchement», afin d’éprouver un plaisir véritable et divin. Il faut, en quelque sorte, se pousser vers l’extrême pour atteindre l’apogée de la jouissance, que ce soit au niveau physique ou métaphysique.
 Voilà un roman qui ose le «je» christique probable, possible, plausible et polémique. Mais il ne faut pas perdre de vue que Soif est un roman qui célèbre la vie vivante, vibrante et qui magnifie la mécanique intriquée du corps et de l’esprit. Ce texte littéraire se repose sur des fondements culturels et civilisationnels pour aborder la dynamique fondamentale de l’être humain : le rapport de la chair et de l’âme.
Vana Berberian
Université Libanaise, Fanar, section 2



NOTHOMB Amélie
Soif
Edition Albin Michel (152 pages)

Amélie Nothomb, ressuscitée

« Pour éprouver la soif, il faut être vivant. J’ai vécu si fort que je suis mort assoiffé. » La romancière belge, Amélie Nothomb vient de publier son nouveau roman Soif. Nous sommes dans la reconstruction de l’Évangile. Elle y donne la parole au « Je » christique. C’est un monologue intérieur de Jésus sur sa vie et sa mort à venir qui commence dès son procès et se termine dans une période indéterminée après la résurrection. Il est enfermé dans une geôle en attendant l’heure de son supplice.
Comme tous les lecteurs d’Amélie Nothomb, avec une grande curiosité, j’ai voulu découvrir son nouveau-né. J’ai été surprise par le sujet qu’elle a abordé avec beaucoup d’audace. De ce fait, je me suis intéressée à sa vie personnelle, ou plus particulièrement à la place de Jésus dans sa vie. Enfant d’une famille catholique, elle était inscrite au catéchisme. Dès son enfance, elle est horrifiée par la crucifixion, qui, pour elle est un acte dégoûtant. Elle se pose alors des questions auxquelles elle répond dans son roman. Pour ce faire, elle s’est mise dans la peau de Jésus afin de comprendre ce qui s’est passé dans sa tête pour qu’il accepte la pire mise à mort possible.
 Soif, ce titre minime, dispose d’une symbolique attrayante. « Retardez le moment de boire » nous demande le Christ d’Amélie Nothomb. Il nous réclame de tenter cet expérience qui consiste à retarder le moment de boire quand nous avons soif, pour rencontrer Dieu qui est tout entier présent dans la première gorgée d’eau. Le sentiment extraordinaire qui succède à cette goutte d’eau, c’est l’élan mystique. CREVEZ DE SOIF.
Graphomane de l’écriture, Nothomb se dote d’un style qui lui est propre. Classés parmi les romans populaires, les romans de cette écrivaine originale sont accessibles aux bibliophiles qui peuvent bénéficier de ses sujets séduisants. Par ailleurs, La plupart des lecteurs de Nothomb, remarquent que ses romans se ressemblent au niveau des thèmes qu’elle aborde. Comme dans la plupart de ses écrits, les thématiques étudiées dans Soif sont l’amour, le bien, le mal, la beauté, la laideur, le mensonge, la vérité et surtout la soif et la mort. Mais dans ce dernier ouvrage, Nothomb crée une nouvelle trinité : l’amour, la soif et la mort.
Dans son livre, Jésus éprouve les sentiments les plus humains comme la faim, la soif, l’amour et la haine. Comment Jésus peut-il haïr ? En fait, Jésus d’Amélie Nothomb se hait lui-même parce qu’il a accepté de souffrir. Ceci a créé un grand questionnement chez l’écrivaine : « comment la crucifixion, cet acte de mépris est-il censé racheter les péchés de l’humanité ? » Jésus est, de plus, amoureux de Marie Madeleine et décrit ses sentiments avec une grande sensualité. D’ailleurs, il s’agirait d’une « vengeance » des quatre évangélistes. Nothomb ne croit pas à tout ce qui est écrit dans les évangiles, donc, elle décide de mettre aux points les choses qui, à son avis ne tiennent pas debout. Ainsi, elle les a réécrites à sa façon.  
Dans la mesure où chacun a son goût de lecture, certains se satisferont de ce roman, tandis que d’autres se défieront pour le découvrir. Cependant, dans les deux cas, cette création originale, proposée dans un style compréhensible engageant à lire, ne peut laisser indifférent.

Youmna Nseir
Université Saint-Joseph de Beyrouth



COATALEM Jean-Luc,
La Part du Fils,

Edition Stock (262 pages)

Un deuil plein de vie

Né à Paris en 1959, Jean-Luc Coatalem est un écrivain et journaliste français d’origine bretonne. Son dernier livre, La Part du Fils, révèle une histoire familiale tragique mais en même temps extrêmement émouvante et influente. Il s’agit d’un récit intimement lié à l’auteur où il nous raconte la disparition de son grand-père Paol, décédé en exil après son appréhension par la Gestapo dans son village du Finistère en septembre 1943 après une accusation incognito. À cet incident familial, Coatalem nous amène à une enquête comblée de tâtonnements et de découvertes bouleversants où se manifeste une profonde fonte entre l’affliction et l’espérance, entre la nostalgie et les souvenirs…
Tout au long de ce roman, le texte est doctement harmonisé, détaillé, et encombré de traits subliminaux désirant portraiturer un grand-père résistant et increvable. Éventuellement, la contemplation de ce texte éclatant dont nous voudrions mémoriser chaque phrase, nous rend conscients à propos de l’axe de cette histoire : les sentiments intimes et pudiquement silencieux qui existent entre le narrateur Coatalem et Pierre, son père orphelin, en les comparant avec ceux qui naissaient entre cet homme et son père, perdu dans la guerre et plus tard, introuvable.
Avec sa plume, l’auteur essaie d’adoucir la peine et la détresse, non seulement de cette perte qu’il ressent toujours envers son grand-père inconnu, et ainsi la nonchalance de sa grand-mère, mais également la douleur de sa souffrance vis-à-vis de l’impassibilité de sa famille en ce qui concerne la disparition de son ancêtre. L’écrivain voulait connaître les moindres détails, les causes, les conséquences, et surtout la vérité de son aïeul. Itinéraire assez long et singulièrement énigmatique surtout que le passager n’était absolument pas sûr à quelle fin il se trouvera.
Indispensable trajectoire. Coatalem fait naître de nouveau une lueur d’espoir de l’intérieur de toute cette mélancolie et de ce pessimisme. Bien qu’il soit extrêmement possible que des résistants, des combattants, et des guerriers soient restés inconnus, isolés, anonymes et morts sans que personne ne se soucient de leur rendre hommage après la guerre, notre écrivain a suivi une différente voie, assurément incertaine et alambiquée, pour atteindre son objectif : vivifier Paol, son grand-père égaré.
Aucune nouvelle de Paol. Disparition. 70 ans de silence. Silence de mort. Deuil inachevé…
Une disparition qui a fait un trou dans l’histoire familiale de notre écrivain et autour duquel le silence s’installe. Un silence qui a incité, voire poussé ce romancier à se lancer à une quête minutieuse et intime et à décider de partir sur les traces de son grand-père dans le dédale de la deuxième guerre mondiale. « Inconnu » est le mot qui l’a bouleversé le plus lorsqu’il est tombé sur la fiche d’arrestation de Paol, d’ailleurs mal classée, en feuilletant les dossiers des archives, espérant de faire de cet aïeul une mémoire qui ne doit jamais s'effacer mais être marquée.
Ce récit relate la pérégrination d'un petit-fils pour redonner voix à son grand-père qu'il n'a jamais connu. Face à cette tragédie son père s'est enfermé dans le silence du souvenir, présumant que c’est inutile de remuer le passé, et son oncle, Ronan a choisi une existence d'aventures en faisant partie du contre-espionnage.
Au sein de cette guerre où régnaient la vengeance et la jalousie, l’écrivain découvre que Paol en était une victime, qu’il fut emmené sur la base d’une lettre anonyme de dénonciation, pourtant il n'était pas le seul, des milliers d'autres ont subi le même sort.
La beauté infinie de l’écriture de Coatalem, sa langue qui enchante, son style efficace en remontant le fil du temps pour imaginer les derniers instants de la vie de son grand-père l’ont servi de calmant pour lénifier cette douleur.
Au terme de notre réflexion, Jean-Luc Coatalem a jeté la lumière sur la part des fils pour retrouver le « fil » qui manque pour que la famille puisse se remettre de son chagrin et pour donner au grand père sa véritable place. Il s’agit d’ores et déjà de raccommoder, de renouer et de tisser une toile qui fait de ce roman une histoire à la fois simple et morcelée.


Youstina Nagui et Youssef Adel
Université Ain-Shams, Egypte.
NOTHOMB Amélie
Soif,
Editions Albin Michel, (162 pages)

« Je vous ai aimés, a dit l’Eternel » (Malachie 1 : 2)

    La passion du Christ au cours des dernières heures…Quels étaient ses sentiments, ses craintes, ses conflits internes dissimulés mais l’obsédant sans cesse ? Jésus Christ, Dieu incarné sur terre, a pris la parole tout au long de l’histoire. Exprimant méticuleusement chaque passion, non seulement physique, mais aussi psychologique. La veille de la crucifixion, Jésus Christ était sûr et certain qu’il allait mourir. Or, venu spécialement pour cette mission sur terre, il ne s’opposait pas à ce destin, mais il était pris par la peur qui le hantait. A chaque fois qu’on endurait la peine, la peur et l’angoisse s’affirmaient considérablement. C’est ainsi qu’il tentait en vain d’échapper à ces sensations en revenant sur le passé : ses disciples, ses souvenirs d’enfance, son premier miracle, sa bien-aimée Madeleine, ses préceptes…
    Des conflits ont pris ainsi place. A quoi valait se sacrifier pour le salut de tout le monde puisqu’on ne s’aimait pas soi-même ? Comment procurer à une personne un bien qu’on ne possédait pas ? La mort pouvait-elle être une source d’amour inépuisable ? Maintes questions accablaient l’auteure et la poussaient à reconsidérer tout le processus de Jésus pour sauver l’homme. L’œuvre s’est achevée conformément aux textes bibliques : la résurrection de Jésus Christ trois jours après sa mort.
     De toutes les méthodes de communication, Nothomb a opté pour celle la plus directe et la plus attrayante : la première personne du singulier je. Si c’étaient les douleurs et les émotions de Jésus Christ, pourquoi ne pas lui accorder la parole en tant que narrateur établissant un contact direct avec chaque lecteur ? Jésus nous dévoilait ainsi les sentiments cachés, les secrets, les souhaits et partageait avec nous les souvenirs écoulés comme si nous étions présents avec lui en chair et en os.
     Ensuite, Amélie a excellé à présenter les sentiments intimes de Jésus surtout la notion de l’amour. Dieu est amour, telle était la mission de Jésus. Cet amour est affiché envers ses disciples, sa mère, son amante Madeleine et tout le peuple. Cet amour est offert aussi pour ceux qui ne l’aiment pas notamment Judas. Judas, une personnalité assez compliquée, pas habituée à l’amour, l’encouragement et à la sérénité, il doutait de l’amour inconditionnel de son maître.
    Ajoutons que le côté humain de Jésus Christ que la plupart du monde ignore mérite notre attention. Jésus, le sauveur de toute âme perdue, éprouvait des sentiments humains semblables à ceux de chaque homme. Il avait faim, soif, peur…Il a été trahi par Judas, nié par Pierre, abandonné par le reste des disciples. Toutes ces situations, subies par Jésus, le rendaient totalement conscient de nos maux et nos souffrances comme l’avait mentionné Saint-Paul dans sa lettre aux Hébreux « et parce qu’il a souffert jusqu’au bout de l’épreuve de sa Passion, il est capable de porter secours à ceux qui subissent une épreuve » (2 : 18)
    Cependant, cette explication du côté humain de Jésus a sombré dans l’excès. Il faut admettre avant tout que Jésus est Dieu ayant pris un corps humain pour pouvoir accomplir sa mission jusqu’au bout. Son corps avait ainsi des besoins élémentaires à satisfaire tels que le manger, le logement, le repos…Même la peur qu’il a éprouvée était liée à son corps et aux souffrances que son corps doit supporter. Mais malgré cette souffrance et cette peur, il était satisfait et content parce qu’il sauvera chaque pécheur et chaque âme perdue. Son amour inconditionnel pour chaque individu l’exhortait à finir correctement cette tâche. On a souvent tendance à glorifier la tragédie de Shakespeare « Roméo et Juliette » en raison de la notion du sacrifice et l’amour ardent. Il en est de même pour Jésus Christ. Jésus, sans péché, a voulu, par son amour et sa pitié envers l’humanité, lui assurer la vie éternelle.
     De même, si on se rend compte que Jésus est Dieu, on saura immédiatement que la vraie relation d’amour était entre Dieu et l’humanité qu’il a conçue et dont Marie de Magdala faisait partie. En comprenant cette réalité, on déduira ainsi que Madeleine était une de la population aimée et adorée par Jésus et non pas son amante. Cette notion qui est récurrente dans plusieurs romans tels que « Da Vinci Code » de Dan Brown et « La Dernière Tentation Du Christ » de Nikos Kazanakis s’avère erronée.
    En somme, cette œuvre, nouvelle en son genre, suscite plusieurs controverses, étant donné que le lecteur n’arrive ni à l’approuver ni à la réfuter. Il convient donc de se doter d’un esprit logique et raisonné apte à trier les vérités des erreurs.

Julie Joseph,
Université Ain-Shams, Egypte.



AMIGORENA Santiago
Le Ghetto intérieur
P.O.L éditeur, (192 pages)

La culpabilité : Un Ghetto intérieur

Vicente est un homme polonais, juif et argentin. Il est né en Pologne où il a combattu auprès de son armée. Puis, il l’a quitté en 1928 pour aller vivre en Argentine, s’échappant ainsi de sa famille, sa mère Gustawa et son frère Berl et choisissant l’indépendance. À Buenos Aires, le commerçant de meubles a passé une vie aisée pleine d’ambitions et de joie avec sa femme Rosita, ses petites filles Ercilia et Martha et son bébé Juanjo. Mais tout a changé lorsque les Allemands nazis ont décidé d’anéantir les juifs. On a construit un mur à Varsovie derrière lequel on a entassé tous les juifs. Les moindres conditions de vie n’existaient pas au ghetto de Varsovie: il n’existe que faim, épidémies, meurtres, sanglots et malheur.
On sait bien ce qui s’est passé avec les juifs au ghetto de Varsovie, on sait qu’ils ont souffert, on sait qu’ils sont morts dans des chambres de gaz, toutes ces informations sont mentionnées dans les livres d’histoire, dans les registres concernant la guerre mondiale mais on ne sait rien du ghetto où Vicente s’était puni : le ghetto intérieur.
Comment vivre avec le sentiment de culpabilité? Combien de fois sa mère lui a envoyé des lettres avant la guerre ? C’était souvent en vain : il ne répondait pas. Même quand il a répondu, il s’est contenté de demander à sa maman de venir en Argentine pour vivre avec lui, sans même essayer de convaincre son frère. Vicente alors s’est puni en se taisant. Il n’a partagé son inquiétude avec personne, ni avec ses amis Ariel et Sammy, ni avec Rosita. Tout le monde a souffert de son silence, tout le monde a été puni.
Santiago Amigorena n’a pas abordé des événements détaillés sur la guerre mondiale ou les massacres infligées aux juifs mais il a seulement mentionné les événements qui servent à comprendre à quel point Vicente a tellement souffert.  Le message de Santiago est plus profond, il s’adresse directement aux sentiments du lecteur. Dans ce roman, nous vivons chaque moment et chaque sentiment avec Vicente : le silence, la culpabilité, les larmes cachées ainsi que les tentations pour s’adapter aux souffrances et retourner à sa vie naturelle. Vicente n’osait pas manger pendant que sa mère avait faim, il n’a pas pu passer de bons moments avec sa femme et ses enfants pendant qu’il ne savait rien du sort de sa famille.
Par ailleurs, l’écrivain traite une autre question importante, à savoir l’identité. À mon humble avis, c’est la partie la plus intéressante et la plus touchante dans le roman : « L’une des choses les plus terribles de l’antisémitisme est de ne pas permettre à certains hommes et à certaines femmes de cesser de se penser comme juifs, c’est de les confiner dans cette identité au-delà de leur volonté » (p.70). Vicente n’était pas juif de croyance : il était juif parce qu’il est né dans une famille juive. Or, à cause de l’antisémitisme, il a éprouvé un certain attachement envers son ethnie juive et sa patrie, la Pologne.
En fait, il ne s’agit pas là d’une simple idée philosophique traitée dans un roman mais plutôt une expérience personnelle que l’écrivain lui même a testée. À la fin de son roman, le voilà Santiago Amigorena le réalisateur, le scénariste, le producteur et l’écrivain argentin vivant en France, s’identifier au protagoniste, Vicente : il annonce que c’est l’histoire de son grand père et que la femme juive vivante au ghetto de Varsovie était sa grand-mère.
Bref, n’hésitez pas à vivre chaque moment avec Vicente, à vous interroger sur son identité, à comprendre comment la guerre peut changer la vie d’une personne de fond en comble... Il serait bien regrettable de manquer un tel plaisir de lecture !

Iriny Georges Samir

Université Ain-Shams, Egypte


BARBERIS Dominique
Un dimanche à Ville-d’Avray,
Edition Arléa, (124 pages)


Les affres d’un dimanche pluvieux

« Le dimanche, tu ne trouves pas, certaines choses nous reviennent davantage. […] Le dimanche, on pense à la vie. » (p.37)
Comme le passage léger d’une plume dans le souffle d’un vent. Une pause. Un temps arrêté, calme et pluvieux. L’écriture de Dominique Barbéris nous transporte au cœur d’une réflexion sur le rêve. Et comme les feuilles d’automne qui se posent sur le bitume mouillé reluisant des reflets jaunes des lampadaires, la plume de Barbéris sous nos yeux, à chaque page tournée, nous crible de réflexions existentielles, métaphysiques à partir de nos vies ordinaires. Souvent comparée à Georges
Simenon et Patrick Modiano, Dominique Barbéris écrit des histoires sur l’infra-ordinaire (concept défini par Georges Pérec), qui permettent l’implosion d’un grand nombre de réflexions. Enseignante en stylistique à la faculté des Lettres de la Sorbonne, elle propose aussi des ateliers d’écriture, partageant ainsi sa passion avec ses élèves. Déjà, l’année passée, elle avait reçu le prix Jean-Freustié pour son roman L'année de l'éducation sentimentale (Collection Blanche NRF). Cette année, en plus d’avoir été sélectionnée pour le Prix Goncourt, elle a fait partie de la liste de sélection du prix Fémina 2019, pour Un dimanche à Ville-d’Avray, roman rappelant évidemment le titre du film de Serge Bourguignon sorti en 1962 : Cybèle ou les dimanches de Ville-d’Avray. Ville-d’Avray, ses étangs, ses résidences pavillonnaires, sa bourgeoisie, ses vies bien rangées, son calme … C’est un dimanche soir d’automne, dans cette ville cossue de la banlieue parisienne. Deux sœurs discutent dans le jardin de la maison de l’une d’elles. En cette soirée, le souvenir d’une rencontre revient à l’une d’elle (Claire Marie). Cette dernière dévoile une histoire inattendue et un peu trouble qui lui est arrivée quelques années plus tôt, et qui est révolue quand elle la raconte ce soir-là à sa sœur (la narratrice). Une histoire aux allures romanesques, inquiétante, digne d’un polar. Claire Marie a fait la rencontre d’un homme mystérieux avec un accent de l’Est, du nom de Marc Hermann, par « un drôle de hasard ». Ils se sont tous deux rencontrés plusieurs fois dans le plus grand secret, dans des cafés, des lieux peu fréquentés etc. Claire Marie ne sait pas où cette histoire va la mener, une chose en elle l’a poussé à continuer malgré le mystère de plus en plus évident dont s’entoure cet homme qui prétend s’être échappé de Hongrie pendant la Guerre Froide, être marié à une française et avoir une société d’import-export de matériel industriel en Amérique du Sud. S’ajoutent à cela, des faits étranges se passant en même temps à Ville-d’Avray et qui renforcent la méfiance dont il est l’objet. Le danger rôde et Claire Marie commence de plus en plus à sentir la peur, mais elle continue à le fréquenter. Jusqu’à quand et où cette histoire va-t-elle la mener ? Après tout, comme le disait Charlotte Brontë dans Jane Eyre (1847), livre adoré par les deux sœurs depuis leur enfance : « Il est vain de dire que les êtres humains devraient se satisfaire de la tranquillité il leur faut de l'action et s'ils ne peuvent la trouver, ils la créeront. » Cet événement sort Claire Marie de sa vie rangée, engluée dans une routine et dont elle ne sait plus quoi attendre. Elle a un mari médecin, une fille qui apprend le piano, une grande maison dont elle s’occupe dans un quartier paisible et agréable. Mais cette histoire permet de révéler encore plus en elle son désir de romanesque comme aux temps où elle et sa sœur s’émerveillaient devant Thierry la Fronde ou Rochester. Claire Marie, est résolument une femme rêveuse, lunatique, qui a le « goût et l’habitude de passer de longs moments sans rien faire devant la fenêtre »… Chez Barbéris, détails et décors ont une importance fondamentale. Décrite comme une auteure de « romans d’atmosphère », elle produit non seulement une ambiance particulière permettant de situer des personnages dans un temps et un espace, mais parvient également à y imposer une présence, des impressions, des sensations, des sentiments liés aux personnages et à l’intrigue. Comme un tableau impressionniste, elle y va par touches de couleur, tout en suggestions et nuances, pour décrire des rues sombres, des étangs profonds, des parcs, des allées, des gares, tous ces lieux que nous fréquentons tous les jours et qui sont tout à coup empreints du « même sentiment de malaise, de légère étrangeté, » que l’histoire de Claire Marie et Hermann le décrit, tout comme on se retrouve dans sa description du dimanche, jour si propice aux épanchements mélancoliques. Ces éléments ont un rôle essentiel, ils sont porteurs d’un message universel, d’une réflexion à caractère poétique. Pour Barbéris, « ce qui se passe n’est pas vraiment important, c’est surtout la contagion que ce récit exerce sur la petite sœur, qui se rend compte tout un coup qu’elle se croyait la plus émancipée, et qu’en fait, c’est sa sœur qui a eu la meilleure part, c’est à elle qu’est arrivé finalement le romanesque. » Ce ne sont peut-être pas les bonnes vies, comme celle de la narratrice, intellectuelle parisienne, vivant « libre », que l’on devrait envier. Le roman écrit du point de vue de la sœur qui écoute nous permet de voir les échos que cette histoire a sur elle, et ce que cette soirée, cette ville, font remonter en elle de souvenirs et de réflexions sur sa vie. Comme quoi, les pavillons de Ville-d’Avray, ses coins sombres, et ses grands arbres à cachettes, alimentent derrière chaque volet tout un monde, du romanesque et une vie intérieure qui n’envient pas l’agitation des grands boulevards parisiens.
Un livre à lire sous son duvet, seul, pendant une soirée de dimanche pluvieux d’un mois d’octobre, bien sûr. Une lecture rapide, mais des réflexions et des mots qui se dégustent dans la longueur. Dans un temps de crise, dans un monde où soufflent les vents des révolutions et des cris de ras-le-bol, n’est-ce pas au final « le rêve [qui reste] dans la vie [ce qu’il y a] de plus important », comme nous le dit l’autrice elle-même (dans une interview faite par la librairie Mollat). Un vent de fraîcheur dans cette sélection Goncourt aux lourds sujets appesantis de la tristesse de l’état actuel de notre monde.

Laëtitia Firoaguer
Université Saint-Joseph


NOTHOMB Amélie
Soif
Editions Albin Michel (152 pages)
Le trajet de Golgotha 
« Petite je veux devenir Dieu. Très vite j’ai compris que c’était trop demander et j’ai mis un peu d’eau bénite dans mon vin de masse : je serais Jésus ».
C’est bien ce qu’écrit Amélie Nothomb en 1999 dans son roman Stupeur et tremblements. En 2019, elle réalise son rêve avec Soif. Avec ce titre bref mais révélateur de la soif de Jésus pour sauver la vie aux autres, l’auteur se met dans la peau du Christ et tente de retracer le chemin de ses pensées peu avant sa crucifixion.
Est-ce que Jésus peut tomber amoureux ? Est-ce qu’il peut mener une vie sexuelle, avoir une progéniture ? … C’est bien ce qu’on trouve dans ce roman.
Nothomb affirme avoir compris « la révolte qui l’animait » (Métaphasique d’étude, 2000). Tout comme son père, elle mène une vie d’expatriée et souffre de la solitude qui l’incite à se replier davantage sur elle-même. Jésus était donc son grand copain, son meilleur ami, son ami imaginaire depuis son enfance. Elle s’identifie donc à lui et nous livre ce roman autobiographique où seul le côté humain de Jésus est mis en avant… Ce fils qui veut vivre, aimer et qui souffre comme le reste de ses confrères.
Sur son chemin pour être crucifié, la seule idée qui lui permettait de s’échapper à ses douleurs et ses souffrances physiques et morales, était de construire une famille avec son amoureuse Marie Madeleine. Mais est-ce que cela est le but essentiel de Dieu dans l’évangile ?
 « Je vous ai dit ces choses afin que vous ayez paix en moi. Vous aurez des tribulations dans le monde mais ayez bon courage, moi, j’ai vaincu le monde. » (Jean 16 :33)
Tout en se focalisant sur le côté humain du Christ, une divinité est attribuée à chaque être humain. L’amour, la soif et la mort – trois activités humaines par excellence – qui reviennent comme un leitmotiv tout le long du roman engendrant un rythme ternaire ne laissent-elles pas penser à la sainte trinité ?
Amélie Nothomb réussit à nous livrer un roman faisant le salut d’un christianisme humaniste où les expériences les plus humaines ont leur propre forme de divinité.
« Celui qui boit de cette eau, n’aura jamais soif »


Youstina Adel et Demiana Takla
Université d’Alexandrie


ROLIN Olivier
Extérieur Monde
Éditions Gallimard, (304 pages)
                            
Trésor de souvenirs

      Extérieur Monde est un récit autobiographique qui dévoile tout un labyrinthe de souvenirs sans issue. Tout au long du roman, l'auteur fraie plusieurs chemins où il extériorise ses sentiments intimes dont l'amour. On découvre ainsi l'apparition de plusieurs figures féminines dans le récit.
      Durant ce long parcours, Rolin note également l'atrocité des guerres en citant le cas de l'Algérie, Daesh, Hodeïda et les guerres mondiales, sans pour autant avouer finalement sa passion pour les cimetières et pour la mort ; une forme par laquelle le passé se manifeste. Lors de cette phase, des réminiscences d'une vie lointaine défilent aux yeux de Rolin : son enfance, son adolescence et sa jeunesse...
     Ce récit se caractérise par l'authenticité de ses propos qui se renforce d'ailleurs en évoquant un grand nombre d'écrivains, de philosophes, d'acteurs, de peintres. L'auteur dépeint toute une fresque de paysages, pays, régions et lieux très divers et assez spécifiques : l'Arabie Saoudite, l'Amérique, l'Allemagne, l'Égypte, le Soudan et le Maroc.
      L'auteur écrit "L'homme se fixe la tâche de dessiner le monde. Tout au long des années, il peuple l'espace d'images, de provinces, de royaumes, de chevaux et de personnes. Peu avant de mourir il découvre que ce patient labyrinthe de lignes trace l'image de son visage" ; phrase-clé qui résume toute sa philosophie et sa vision d'un monde en mutation permanente.
Quant au style de l'auteur, il mérite une certaine admiration… style séduisant, facile à comprendre et à analyser. Une écriture à quatre mains où l'image du lecteur est ancrée dans le texte. Le narrateur utilise des points d'interrogation et d'exclamation pour s'adresser à son lecteur et le plonger dans le moindre détail et souvenir tout en partageant avec lui divers sentiments et émotions.
       La fin du roman ne manque pas d'originalité. Olivier Rolin n'écrit pas une fin à son récit, il laisse cette tâche à son lecteur. Bref, un roman passionnant qui ne fait qu'inspirer le lecteur qui considérerait Rolin comme étant un modèle à suivre.

Lojayna Mostafa

Université d'Alexandrie
BARBÉRIS Dominique
Un Dimanche à Ville- d’Avray
Éd. Arléa, 2019 (125 pages)

À la croisée du passé et du présent

     « En fait, a murmuré ma sœur sans me regarder, j’ai pensé à quelqu’un. J’ai fait une rencontre, il y a des années, je ne te l’ai jamais dit ? Il m’est arrivé quelque chose.

Une rencontre !
     Le mot est tombé bizarrement avec l’ombre. J’ai arrêté tout net de fredonner. Je me rappelais la formule de maman : « Va voir ce que ta sœur fabrique. »
     En réalité, sur certains points, Claire Marie me fait penser à ces canards qui ont l’air de glisser sur l’eau (un glissement d’objets immobiles) mais leurs pattes remuent sous la surface à toute allure. Il y a quelque chose en eux d’un trompe-l’œil. » (p.35)

     Une sorte de tentation d’aventure, de rencontre, sont, toutes, inscrites au cœur d’Un dimanche à Ville-d’Avray, roman signé par Dominique Barbéris. Dès l’incipit, le lecteur est imprégné dans une ambiance alternant le passé et le présent par le biais de quelques scènes de réminiscences.
     Teinté d’imagination, de rêverie, ce roman psychologique voire universel nous fait confronter aux tourments de l’âme humaine qui est toujours à la recherche de la réalisation de ses rêves.
     Ce dimanche d’aveu, de confession, de révélation du secret le plus profond de l’aînée, est témoin de la visite faite par la narratrice, Jane, qu’est la cadette à sa sœur aînée dans son lieu de résidence, à savoir la ville- d’Avray. Cette narratrice parisienne révèle que : « l’autre dimanche, je suis allée voir ma sœur. », (p.9). Dans un cadre verdoyant propre à la ville- d’Avray également nocturne et sombre, Claire Marie, l’aînée, dans un tableau pathétique avoue à sa sœur cette errance avec cet inconnu hongrois rencontré, un jour au cabinet de Christian, son mari. Ce récit dans le récit autrement dit ce récit en abyme constitue la scène essentielle d’Un dimanche à Ville- d’Avray. Tous les cadres de cette rencontre font échos à la personnalité de cet inconnu qui n’est que sombre, lugubre et ténébreuse, preuve en est le paratexte, surtout la 1ère de couverture qui est noire, floue et dit long sur la trame du roman.
 Ces rencontres se suivent avec cet inconnu mais sans de vrai motif. Réside alors l’importance de cette confession, en marge de l’histoire narrée par la cadette, et son influence sur Jane qui déduit que c’est sa sœur non pas elle qui a eu la grande part du romanesque, elle, qui réside dans un lieu favorable aux rêves, elle, qui prouve qu’elle est la plus émancipée et qui a pu vivre une aventure pareille, que c’est elle qui a pu réaliser une partie des rêves de toute jeune fille.
     En bonne psychologue, romancière et passionnée de littérature, Dominique Barbéris nous livre deux tableaux en parfaite correspondance pour nous montrer les sentiments les plus sincères de l’âme humaine. Le titre de son dixième roman, Un dimanche à ville- d’Avray, rappelle celui du film de Serge Bourguignon Les dimanches de Ville-d’Avray, qui a reçu l’oscar du meilleur film étranger en 1963. Grandiose est l’influence de ce film vu lors des années de jeunesse comme le prouve le commentaire de la romancière : « je l’ai eu en tête en imaginant le roman même si je ne l’avais vu qu’une fois, à l’âge de 17- 18 ans. J’avais gardé un souvenir très présent de l’errance autour des étangs notamment. » C’est alors le cadre spatio-temporel qui sera le point commun entre le film et le roman. Déclare ainsi l’écrivaine : « je voulais écrire sur le dimanche, ce jour où on repense à sa vie. Ce roman va très bien avec le paysage de Ville- d’Avray avec d’un côté ses rues pavillonnaires, sa quiétude, ses jardins fleuris de roses et de l’autre côté les étangs et la Forêt de Fausses- Reposes, plus inquiétants. C’est calme, tellement calme qu’on a le sentiment d’une attente. »
     La charpente du roman suit à merveille les maintes étapes de cette errance avec les différentes prises de conscience de l’aînée, ses hésitations, ses moments de satisfaction et au contraire ses moments de refus, de peine et de frustration, et de l’autre côté, la cadette qui analyse la scène, qui fait des comparaisons et aboutit même à des conclusions concrètes et sincères. Un dimanche à Ville- d’Avray met l’accent sur les deux protagonistes, à savoir les deux sœurs de par leur style de vie, de pensée et leur source d’inspiration.  Ce récit sur l’imagination donne au lecteur libre cours pour sortir des rails, pour s’échapper du rythme monotone et routinier de la vie.
     Le style de l’écrivaine est simple, agréable à lire également il suit le mouvement de la confession, une sorte de mélodie triste qui prouve le tiraillement de l’âme entre ses rêves et la réalité.
          Un roman qui vous procure un moment de vous plonger dans les profondeurs de l’être humain. Récit épatant dans lequel tout est bien chaloupé qui tient le lecteur en haleine par la succession des rencontres. Un récit à lire avec plaisir et à ne jamais rater !
  Lilyanne Hany et Aliaa Ali

 Université d’Alexandrie


MIANO Léonora
Rouge impératrice
Editions Grasset, 602 pages

                                                              Un amour interdit

Rouge impératrice est d'abord une histoire d’amour qui se passe au XXIIe siècle à Katiopa, un continent africain presque tout unifié et prospère, entre deux personnages dont les chemins se croisent. L'un, c’est un chef d'état qui s'appelle Ilunga, l'autre professeur à l’université qui s’appelle Boya. À travers Boya, Léonora Miano, l'auteure de cette œuvre nous propose une héroïne qui sait exprimer ses envies, ses besoins, elle est une femme intellectuelle et impliquée dans la vie sociale et politique de son pays, qui ne craint pas de se battre afin de mettre en valeur ce qui lui semble juste.
Il faut à tout prix séparer ce couple contre-nature, car, cette passion menace de devenir une affaire d’état.
Dans ce roman, il est question d'âmes sœurs et de puissances spirituelles. L'auteur nous donne l'image d'un monde futur où les rôles sont inversés. Dans ce livre, l'Afrique de demain est un continent indépendant dans lequel elle reprend ses droits tant sur ses richesses terrestres que sur l'avenir de ses citoyens. La question du racisme est d'ailleurs abordée d'une manière intéressante. Parmi la population du Katiopa se trouve un groupe de marginaux, les blancs qui viennent de France, on les appelle « les sinistrés». Ces gens-là ont fui leur pays à cause de la vermine. Autrement dit, ils se sont réfugiés en Afrique et ils ont été dépossédés des terres et biens qu'ils avaient acquis eux-mêmes. Ne voulant pas mélanger leurs précieux gènes et cultures à ceux des Katiopiens, ils se trouvent isolés. Nous assistons à une nouvelle scène où les Africains dominent bien les Européens.
Née en 1973 au Cameroun, Léonora Miano vit en France depuis 1991. Elle est l'auteur de neuf romans, dont Contours du jour qui vient qui a remporté le prix Goncourt des lycéens en 2013.
C'est un roman qui nous fait réfléchir, puisqu’il est écrit dans une langue travaillée et poétique. Cette œuvre exige une lecture très attentive, sinon le lecteur va rater l’histoire parce qu’elle est pleine d’aventures et d’événements.
Vu que l'auteur emploie assez de mots indigènes pour raconter l’histoire, au début cela m'est paru un peu difficile de comprendre le texte entier, mais les mots se répètent et deviennent compréhensibles au fur et à mesure. Bien que la philosophie politique marque bien ce livre, l'auteur rend hommage aux différents aspects des cultures du continent africain.
Malgré la difficulté du lexique, c’est un roman à la fois beau et épique. L’intellectualité, la liberté, l’audace et les préoccupations de ce personnage féminin m'ont beaucoup plu. Il vaut la peine de le lire plusieurs fois pour nous mettre dans le bain voulu par l’auteur.                 
Elnaz Asna Ashari

Université Alzahra


Extérieur Monde
Olivier Rolin
Editions Gallimard (304 pages)

Olivier Rolin enfin se jette à l'eau et nous écrit Extérieur Monde.
Le livre nous parle des dizaines de souvenirs et de mémoires écrits à partir de plusieurs carnets noircis lors des voyages d'Olivier Rolin autour du monde. Néanmoins, il rejette l'idée d'écrire des souvenirs ou des mémoires à partir de son intérieur mais essaie d'inventer une façon inverse d'écrire partant de l'espace extérieur. Il décrit des paysages, des visages, des voix, des femmes qu'il rencontre, colle des dizaines d'éclats de souvenirs l'une à l'autre ; des souvenirs qui ont tous tresse sa vie au cours des années, il reconstruit sa vie à l'instar des pièces de puzzle. Or il évoque aussi la guerre, le tragique, le catastrophe, la sauvagerie que l’homme est capable de faire lors de la guerre.
Rolin nous parle aussi de ses amis avec la mort desquels s'en vont les pans de notre vie.
Extérieur Monde nous apprend à voir à bien voir le monde à ne pas passer indifféremment autour du monde comme un écrivain.

Zeynab Sadough
Université Alzahra
MINGARELLI Hubert
La terre invisible
Editions Buchet-Chastel (192 pages)

La terre invisible d'Hubert Mingarelli nous emmène en 1945, à la fin de la seconde guerre mondiale, dans une ville d'Allemagne occupée par les alliés, où un photographe de guerre anglais ne parvient pas à rentrer chez lui. Avec la permission de son colonel, il décide de partir et de capturer avec son appareil les gens devant leurs maisons, espérant découvrir la raison de telles atrocités. Un jeune soldat qui vient d’arriver et qui n’a rien vu de la guerre, l’accompagne en tant que chauffeur, sans deviner la motivation du photographe et la fin de ce voyage "- Et où est-ce qu'on va aller ? […] – Je n'en sais rien Encore."
Les 2 personnages partent au hasard sur les routes chacun avec ses cauchemars et ses propres secrets. "Je m'endormis et rêvai aux bâches avec lesquelles nous avions recouverts les morts […] nous les retenions avec nos mains de toutes nos forces mais une force plus grande continuait de les soulever et chacun au fond de lui savait que c'étaient les morts qui poussaient avec leurs jambes grises."  Ils tentent de chasser les fantômes qui les hantent. "Ils sont ce qu'ils sont et je voudrais les oublier"
Le but de ce voyage, c'est de trouver la réponse de la banalité de la vie et la réalité, l'un avec son appareil et à travers les photos, l'autre avec son fusil ; mais tout est en vain, "Vous ne verrez rien, j'en suis sûr" comme son colonel les a déjà prévenus. Peut-être à la fin de ce chemin, ils trouveront la paix, la fraternité et ils arriveront là où li sera possible de dormir sans cauchemars.
Le roman est un ensemble de scènes de deux pages, de descriptions sur les paysages, le ciel, le fleuve, les champs, les rayons du soleil, exactement comme une photo. On peut bien savourer l'état mental des personnages, le silence, la douleur qui crie dans le silence, l'enfer dans lequel ils se trouvent, avec les phrases simples et courtes ou d'autres longues,  et sans ponctuation liée par et. Hubert Mingarelli laisse chacun faire sa propre idée, sa propre photo à chaque instant. "J'estime que le lecteur est plus intelligent que moi, il comprend plus de choses, donc je ne veux rien lui dire, je le laisse découvrir", nous dit-il.

Sadaf Malek Yarand 
Université d’Alzahra

Département de Langue et Traduction  Françaises



AMIGORENA Santiago
Le Ghetto intérieur
Édition P.O.L (191 pages)

Le Ghetto intérieur, le titre du livre, est inspiré de la vie des grands-parents de l’écrivain.
L'histoire se déroule dans les années 1940-1945 mais, il y a beaucoup de retours en arrière. On peut dire que l'auteur raconte l'histoire de ses grands-parents dès la jeunesse de son grand-père avec des descriptions. On l'accompagne pendant toute l'histoire. L'auteur peint très bien le monde et l'état d'âme des gens pendant la Deuxième Guerre mondiale. L'histoire est pleine d’événements tristes mais réels ! Vicente Rosenberg s'est enfui de Pologne. Il s'est installé à Buenos aires en Argentine et il a sa propre famille, ses deux filles et son fils et sa femme (Rosita), à ses côtés. Après avoir ignoré les lettres de sa mère, maintenant c'est son tour à être inquiet pour ne pas avoir des nouvelles de sa mère, sa sœur et son frère. Peut-être qu’il pensait que pour bien avancer dans sa vie, il ne fallait pas se retourner. Peut-être chez Vicente, l’oubli était plus important que la mémoire, ou celui qui oublie jouissait plus que celui qui se souvient. Mais il a été rattrapé par ce qu’il croyait pouvoir ignorer.
À l’époque, la Pologne a été occupée par les Nazis qui ont forcé les Juifs à rester dans des ghettos dans une situation très difficile ils finissent par mourir.
La mère de Vicente n'a pas accepté de quitter la Pologne, c'est d’ailleurs la préoccupation du personnage principal, Vicente. Dans une lettre reçue le 9 décembre 1940 de Varsovie, sa mère lui a annoncé l’histoire des ghettos : Mon chéri, tu as peut-être entendu parler du grand mur que les allemands ont construit. Heureusement la rue Sienna est restée à l’intérieur, ce qui est une chance, car sinon on aurait été obligés d’abandonner l’appartement et de déménager.Il n’était plus possible pour la famille de Vicente de quitter la Pologne, le pays envahi par les Nazis.
  Après avoir immigré en Argentine, on constate qu’il est incapable de s'identifier. Polonais, juif, argentin ou seulement un père de famille ? Il est tellement désespéré qu'il a complètement oublié que la vie s’écoulait encore. En plus, il est si loin de sa mère, de son pays qu’on pourrait se croire en temps de paix.  Se sentant coupable de tout ce que sa mère subit en Pologne, il garde son silence pesant pendant des mois et même des années jusqu’à ce qu’il meure.
 Peut-être qu’ayant beaucoup de choses à dire, il n'arrive à prononcer aucun mot. En effet, il est plongé dans un espace vide de pensées, et finalement, il décide de se suicider. Mais il n’a pas réussi. Quand il a entendu que sa femme est enceinte, il a retrouvé un espoir pour ne pas céder. Mais il se sent toujours coupable à ne rien faire pour sa mère.
Il pensait qu’il pourrait faire autre chose qu'écrire des lettres. Il pourrait insister plus pour que sa mère aussi quitte le pays, pour qu’elle vienne vivre avec eux en Argentine. Il n'a aucune nouvelle de sa mère et cela l’inquiète. Elle est peut-être morte. Par conséquent, il vit toujours en se blâmant et en gardant ce silence amer qui l'étouffe.
En ce qui concerne le style de l'auteur, il décrit des événements très bien, d’une manière simple tout en étant profond. Il indique tous les événements par une date précise. Il nous fait penser à chaque question qu'il se pose. Le livre commence avec le point de vue de la troisième personne singulière et finit à la première personne.
Mehrnoosh NAZERI
Atiyeh SAHEBZAMANI

Université Alzhara
NARBERIS Dominique
Un dimanche à ville d'Avray
Édition Arléa (128 pages)

Le dimanche, le jour qui signifiait la solitude, l’inquiétude, la nostalgie, les bonheurs simples de l’enfance pour les deux sœurs de l’histoire. Si on veut choisir une couleur pour ce genre de dimanches, c’est le gris. Un chagrin de la semaine…
Le titre du livre nous rappelle le film Les dimanches de ville d’Avray, un film de Serge Bourguignon en 1962. Aux États-Unis, ce film reçoit l’Oscar du meilleur film étranger en 1963.  
Le film dans lequel Hardy Kruger joue dans le rôle de Pierre, un pilote de guerre qui perd la mémoire. Madeleine, l'infirmière qui l'a recueilli, lui consacre toute sa vie et son amour. Il entretenait une étrange amitié avec une petite fille, Françoise. Tous les dimanches après-midi, Pierre va emmener Françoise en promenade aux étangs de Corot.
À ce propos, Dominique Barberis écrit une histoire parallèle. Il s'agit de deux sœurs, l'une vit dans le centre de Paris et l'autre à Ville d'Avray. Dès le début, nous sentons que les deux sœurs ne sont pas très proches. Et pourtant l’une se confie son secret à l’autre.
Claire Marie qui était toujours plongée dans ses rêves dès l’enfance, mène une vie monotone avec son marie et leur fille. Étant un médecin la plupart de temps, Christian, son mari, n'est pas à ses côtés.
 Claire Marie et sa sœur jouaient des scènes de leur série télévisée préférée à leur enfance. Elle était sous l'influence des séries et des livres romantiques à point qu’elle rêvait d'être à la place des personnages principaux et sa mère la blâme souvent. C'est pourquoi un homme qu'elle rencontre dans le cabinet de son mari a attiré son attention. Elle sort avec cet homme, Herman x, parfois. Il dit que son travail est dans l’import-export mais il ne précise rien. Il dit qu'il est marié mais on ne voit aucune trace de sa femme. Peut-être qu'il l'a dit pour que Claire Marie se sente mieux en trompant son mari, Christian. On voit souvent l’évocation d’un Thierry la Fronde chevaleresque et d’un Edouard Rochester dans Jane Eyre. La narratrice est toujours en train d’imaginer ou bien dire comparer les deux histoires, celle de Jane Eyre et celle de sa famille en considérant elle-même en tant qu’un des personnages.
Quand l’homme bizarre parle au téléphone, à chaque fois que Claire Marie vient, il coupe ses paroles et ce qui intrigue cette dernière. Dans leur quartier, il y a un homme recherché par la police qui a averti tous les habitants. Elle doute que cet homme recherché soit bien Herman mais elle ne veut pas croire cette histoire. Parfois Herman a des exigences indécentes, ce n'est pas mentionné mais peut-être qu'elle les a acceptées parce que de temps en temps elle se sentait coupable. Elle évite le regard de son mari.
 Claire Marie et sa sœur se retrouvent un dimanche à ville d’Avray et elle se confie toute l’histoire de ses rendez-vous avec cet homme bizarre pour sa sœur. Mais on peut dire qu'elle ne raconte pas toute l'histoire. En racontant l'histoire, on voit toujours que Claire Marie est plongée dans ses vagues sentiments. Parfois elle est curieuse et quelquefois elle éprouve de la peur. Sa sœur en l'écoutant la blâme et elle pense que peut-être Claire Marie n'a pas dit toute la vérité.
A propos du style de l'auteur, elle décrit les scènes de leur rencontre. Des rues en pente, des lumières du soir, une voisine qui observe, un mari médecin qui est toujours occupé et qui n’a pas assez de temps pour sa famille, les promenades au bord de l’étang... sont des éléments, entre autres, décrits par l’écrivaine.
Atiyeh Sahebzamani
Mehrnoosh NAZERI

Université Alzahra
ROLIN Olivier
Extérieur monde
Editions Gallimard (304 pages)             

Olivier Rolin, né le 17 mai à Boulogne Billancourt est un écrivain français, qui a passé son enfance au Sénégal. Diplômé en Lettres et Philosophie de l'École Normale Supérieure et engagé politiquement, il devient un dirigeant de la branche militaire de l'organisation maoïste gauche prolétarienne. Membre du mouvement néo conservateur : « Le Cercle de l'Oratoire » qui publie Le Meilleur des mondes, revue à laquelle il a participé, il sera quelques temps journaliste (Libération, Le Nouvel Observateur), puis se lancera dans l'édition (Le Seuil).

En 1994, il a obtenu le prix Femina pour "Port-Soudan", le Prix France Culture pour "Tigre en papier" en 2003 et le prix du Style pour « Le Météorologue » en 2014. Il est un écrivain voyageur qui a beaucoup écrit et publié aux éditions Seuil. C’est aussi un auteur qui dessine sur une infinité de papiers, le monde littéraire, en se basant sur sa propre vie et ses expériences.

Dans le livre intitulé « Extérieur monde », publié en juin 2019 aux éditions Gallimard, l’auteur ne parle pas d’un sujet précis ou d’un seul voyage. Pas d’intrigue, ce sont plutôt des souvenirs qui s’entrecroisent de pays qu’il a découverts (le Liban, la France, l’Afghanistan, la Russie, l’Italie, l’Amérique, la Colombie, le Soudan, …), des personnes qu’il a rencontrées (Jérémy, Jane, Kafka ,Vera ...), des femmes qu’il a aimées (dont les figures restent un souvenir dans ses écrits ), des chanteurs (comme Richard Anthony ), sans oublier ses amis (Serge, Marc, Antoine, Sylvie, Vincent… ) qu’il aime beaucoup. Il raconte l’agonie de son ami Serge en détail, en associant son état désastreux à un livre qu’il a lu « La Recherche ».
Il se montre homme de référence puisqu’il a « fréquenté la géographie des langues ». Son image culturelle nous transmet les livres qu’il lisait d’une manière claire, influencé par les styles d’écriture de Hugo, d’Apollinaire, de Roland, de Flaubert, de Proust … Tout au long du livre, il évoque des écrivains de toutes nationalités (Pierre Dac, Eddie, Georges Perec, Ernesto Sabato, Michaux, Claude Simon, Roger Vailland, Jean Charaud, …), des traducteurs et des professeurs qu’il a rencontrés (Ernesto Sabato, Mexico du Volcan, Joyce …) et aussi des hommes politiques qu’il détestait (Hafez El Assad et son fils Bashar El Asad)
Son travail de bibliothécaire l’a encouragé à enrichir ses ouvrages.     
Comme Olivier Rolin n’a pas de « mémoire infernale », il raconte tous les détails de sa vie en se basant sur ses carnets. Ces derniers sont les témoins d’un temps où il tissait ses souvenirs avec précaution. Cet amas de carnets extériorise un tourbillon d’images de chacun de nous, lecteurs. En effet, nous visitons avec lui des lieux que nous ne visiterions jamais, nous rencontrons grâce à lui les philosophes et les auteurs de ce monde.
La littérature est la grande affaire de sa vie. Et c’est par son biais qu’il nous emporte dans des voyages interminables. Il parcourt le monde comme un vagabond passionné d’aventure, en nous montrant d’une part sa richesse culturelle et d’autre part l’ambiguïté de son écriture. Il n’est pas sûr que tout le monde apprécie son livre : « Je sens que je perds des lecteurs », déclare-t-il à la page 115, dans le même contexte, il ajoute dès l’incipit « Je sais bien qu’on ne doit pas commencer un livre comme ça, comme je le fais », comme s’il nous disait: « Ce livre ne vous plaira sûrement pas ».
Ce livre ressemble à une petite bibliothèque comprenant beaucoup du vécu de son auteur.  Les quatre éléments vitaux sont présents sur la planète de l’écrivain. Les mots vont se mouvoir en fonction de l’action des pages comme dans la mer. L’eau va essayer de couvrir tous les espaces vides du livre : « l’eau, la joie de l’eau », « Rêver, l’eau est le lien des images sans suite, désaccordées, des songes décousus, des bribes de vies possibles, des ravissements du vague » ; « L’âme aime nager », « Je nageais avec volupté dans une page de mon livre ». Donc, l’eau est le lien entre le ciel et la terre, source indispensable de la vie.
L’auteur aborde le thème de l’amour passion invitant chacun à reconstruire une histoire sous la forme d’un moment unique et inoubliable, en omettant souvent le contexte, les préalables, qui basculent l’histoire dans un autre sens « Mon ex-amour russe était une jeune femme très extravagante... », « car l’amour aussi s’en va », « Aujourd’hui, j’aimerais la revoir », « Elle ne m’a pas appelé ». Son livre sert à transmettre des messages au loin. Malgré la distance et le temps perdu, l’écrivain Olivier vise les femmes et leur dédie implicitement ses écrits.
Ce qui m’a beaucoup agacée en lisant ce livre, c’est la multitude des personnages, des endroits, le désordre des évènements. L’auteur se raconte dans 301 pages que nous pourrions diviser en trois parties égales : ses propos entre parenthèses, une digression au milieu d’un paragraphe, un galimatias de voyages incompréhensibles.
 L’écrivain nous a permis de visiter certains pays à travers ses représentations, il nous a donné une vue d’ensemble en se focalisant mieux sur un plan général et détaillé pour présenter toute la réalité. À la différence d’autres écrivains, il ne suit pas l’ordre chronologique, la modification du déroulement de l’histoire continue à nous aider à nous concentrer. Son style réduit le stress, comme si nous étions dans un avion au-delà du monde.
Layla Soueid
Université de Balamand

La part du fils
Jean-Luc Coatalem
Éditions Stock

Paol est né dans une famille finistérienne à Brest en 1894. Les hommes de la région sont généralement employés à l'Arsenal.
Il épousa Jeanne, trois enfants Lucie, Ronan et Pierre.
Il a été mobilisé en 1939 au grade de lieutenant mais en 1er septembre 1943 Paol fut arrêté par la Gestapo. Il sera conduit à la prison de Pontanion puis dans des camps en France et ensuite en Allemagne, mais rien n'arrivera plus jamais à l'en faire sortir.
Jean-Luc Coatalem part à la recherche de Paol, son grand-père. Paol qui n'est plus parmi eux parti trop vite vers son destin sans qu'il puisse vraiment le connaître.
Déterminé à connaître les raisons de son arrestation, il mène tout une enquête sur la disparition de son grand-père en possédant seulement quelques noms et quelques photos.
Rien ne pourra le faire reculer pour amener Paol à la lumière et le faire revivre, il fera tout son possible. Il commencera son enquête par la prison Pontanion et la finira en Allemagne.
Tant d'efforts pour obtenir des réponses, des noms, des documents pour résoudre l'énigme de son arrestation ; mais hélas le temps s'était écoulé et que peut-on faire dans l'absence des faits, des mots et des lieux ? Seulement un mot se répète dans tous les documents : "inconnu". Pierre, le fils de Paol qui avait décidé de se taire et était victime de la guerre pensait que parler d'hier raviverait cette douleur intense qui existait en lui.
Jean-Luc Coatalem qui aurait espéré qu'un jour son père partagera le secret de Paol avec lui, une vérité qui était aussi sa souffrance, qu'il égrenait un peu de la tragédie, de cette douleur qui n'était pas seulement la sienne mais à toutes les membres de la famille, mais hélas il ne l'a jamais fait. Alors Jean-Luc Coatalem décida de remonter l'histoire pour  l’éclaircir, pour  la raconter et en faire un livre. Cette effraction qui était en même temps une floraison.
La part du Fils est l'histoire de la guerre, des victimes, des rescapés, des familles qui ont vécu la guerre, ces traumatismes, mais, elle ne s'arrête pas là et atteindra aussi les générations futures.

                                                                                                    Zeynab Sadough

                                                                                                    Université Alzahra
DUBOIS Jean-Paul 
Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon

Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon, c'est le dernier livre de Jean-Paul Dubois qui a reçu le 117ème prix Goncourt, le plus prestigieux des prix littéraires francophones. On peut le considérer comme un roman nostalgique sur le bonheur passé.

Le roman raconte l'histoire de Paul Hansen qui est emprisonné à Montréal depuis deux ans. Il partage sa cellule de 6 mètre carrés, surnommé « condo », avec Partick Horton, un Hells Angel « un homme et demi » qui est incarcéré pour meurtre. Dans un « monde clos fait de souffrance encagée », il faire revivre ses bien aimés qu'il a perdu : son père, sa femme et son chien. 

Paul fait des allers-retours entre le présent et le passé et raconte sa vie. Il est né à Toulouse. Son père était un pasteur protestant danois qui perd la foi. Sa mère était directrice française d'un cinéma d’art et d’essai. Le pasteur a perdu son poste après que sa femme avait programmé au cinéma le célèbre film pornographique ; alors ils ont divorcé, son père a émigré au Québec et son fils l’a suivi. Quelques années plus tard, Paul devenait superintendant à L'Excelsior, une résidence où il travaillait en tant que concierge, un gardien d'immeuble, même un consulteur. Il a pratiqué son travail avec bienveillance, toujours prêt à aider les autres avec respect. Il a épousé Wimona, une pilote d'aéroplane et il avait une chienne, Nouk, qui comprend tout. "[...] il arrivait que, vers ces heure-ci, Winona, Johanes ou encore Nouk viennent me visiter […]. Depuis toutes ces années ou je les avais perdus, ils allaient et venaient dans mes pensées, ils étaient chez eux, il était en moi" Un jour, un nouveau gérant arrive à L'Excelsior et tout change. C'est là où on comprend la raison pour laquelle il est mis en prison : un conflit s'est produit entre lui et le gérant et Paul n'arrivait pas à contrôler sa colère bien justifiée. Même parlant avec son avocat, Il n'a aucun regret mais il regrette de n'avoir pas eu davantage de temps ou suffisamment de force pour briser tous les os de la carcasse de ce type méprisant. 

L'art de l'auteur c'est de vous attacher immédiatement à ses personnages, et dès les premières lignes, on a envie de savoir comment Paul s'est retrouvé dans la prison. Le personnage principal est quelqu'un qui se révolte contre toutes les formes d'injustice. Pour lui, l'humour est comme un antidote à la dureté de la vie, Il nous fait aussi rire. Il y a les hauts et les bas, dans tous les sens du terme, les bonheurs immenses et les drames dont on ne se console jamais. On découvre un univers touchant, des personnages pittoresques, des phrases ciselées et profondes.


Sadaf Malek Yarand
Université d'Alzahra



APPANAH Natacha
Le ciel par-dessus le toit
Edition Gallimard, (125 pages)

     L’auteure dévoile dans son roman des histoires entendues derrière les hauts murs. Ces murs “qui séparent, qui aliènent, qui protègent et qui ne guérissent pas les cœurs”.
L’action se déroule au sein d’un triangle dont les angles se tournent le dos. Loup, conduit en maison d’arrêt pour avoir emprunté la voiture de sa mère et provoqué un accident. Cet adolescent qui “court pour oublier” voulait rejoindre sa sœur Paloma qui a quitté la maison depuis 10 ans. Le malheureux se trouva en train de contempler le ciel par-dessus le toit dans une cellule noire qui lui faisait rêver du bleu ;
“…Est-ce-que d’autres que moi essaieraient de deviner
Comme dehors on s’allonge sur l’herbe
 et on démasque les nuages
ils diraient je vois je vois
un chien un insecte un serpent
J’aimerais tant que ce soit autre chose
un ciel une étoile un rêve…”
 (Ecrou 16589, Maison d’arrêt de C.) p.9
Paloma contempla aussi le même ciel par sa fenêtre après avoir appris le sort de son petit frère, ce frère qu’elle avait promis un jour de revenir le sauver du “Phénix”, leur mère.
Phénix, une femme de fer, rousse, tatouée, vendeuse de pièces détachées et passionnée –grâce à son ancien amant Noah- par la mécanique, est une mère à deux enfants pétris de sentiments. Elle croyait leur avoir donné des griffes (Loup) et des ailes (Paloma), mais tout ce qu’elle avait transmis était son mal-être qui alourdissait son existence. Tout comme elle leur cacha l’identité de leur père, elle cachait la poupée qu’elle avait mise au feu. Eliette, cette fille âgée de 11 ans “la princesse des princesses” suivait une éduction bien gâtée de ses parents qui agissaient aveuglement pour son “bien”. Etouffée par ces derniers, exposée à des regards malsains et agressée sexuellement, Eliette explosera sa rage assourdissante sur scène au lieu de chanter. Puis,  après avoir incendié la maison familiale, elle déploya les ailes de Phénix loin de sa maisonnette de poupée.
Au fil du roman auquel le titre fait allusion au célèbre poème de Paul Verlaine, c’était la jeunesse de nos protagonistes qui se dégradait silencieusement en chacun d’eux ;
“… Qu’as-tu fais, ô toi que voilà
 Pleurant sans cesse,
Dis, qu’as-tu fais, toi que voilà,
De ta jeunesse?”
(Paul Verlaine, Sagesse 1881)
Cependant, durant l’investigation du juge, un filet de jaune venu de nulle part se faufila au cœur de Loup et témoigna 10 ans d’attente et 8 nuits de prison, par une voix confiante face à sa famille : “… je n’en pouvait plus de ne pas savoir et je suis venu ici parce que parfois il faut savoir pour pouvoir continuer à vivre.”
  L’auteure laisse leur avenir entrouvert sur “la mer, le ciel et la terre” effondrant tous les murs et les remords qui piégeant leur âme. Pourquoi cède-t-on aux barreaux qu’on crée nous-même dans notre vie? Comment se débarrasser des cicatrices indélébiles ?
 Farah Dhaybi
Université Jinan

                

APPANAH Natacha
Le Ciel par-dessus le toit
Editions Gallimard (nrf), (126 pages)

Le Ciel par-dessus le toit de Natacha Appanah, est une histoire familiale qui raconte une triangulaire entre une mère et ses deux enfants auxquels elle refuse l'expression d'une affection.
Le roman commence par l'un de ces enfants, Loup. "L-o-u-p.  Comme le grand méchant […] comme l'animal".  Il est un adolescent étrange, différent, pas malade. "Quand on lui parle, à Loup, il vous regarde dans les yeux mais souvent il ne vous entend pas. Son esprit a des manières étranges de mélanger le temps, les mots, les actes. " Sa sœur aînée Paloma – ça veut dire oiseau - a quitté la famille, il y a 10 ans, après une violente dispute avec leur mère mais malgré sa promesse de revenir un jour le chercher, belle n'est jamais revenue. Un soir, Loup a emprunté la voiture de sa mère, conduit sans le permis   et provoque un accident ; alors il est maintenant dans une prison, particulièrement construite pour les enfants dans ce pays, en attendant l'audience du juge.
Le passé de cette mère justifie l’origine de son mal-être, de son attitude. Avant, elle s'appelait Eliette, une petite fille jolie, talentueuse qui devait chanter, se maquiller et s’habiller pour le bien de ses parents. Un incident dévastateur a bouleversé sa vie ; Eliette s’est révoltée et Phénix est née. Elle pensait que l'amour exclusif de ses parents a détruit sa vie, alors elle a décidé de ne jamais manifester la tendresse, l’amour à l'égard de ses propres enfants. "Elle leur avait donné des griffes et des ailes mais ça n'avait servi à rien. Ses enfants étaient pétris de sentiments [...]. Ils avaient envie d'être pris dans les bras, qu'elle dise des mots d'amour, [...] ".
Natacha Appanah touche le cœur par son style, la façon de raconter ce que chaque personnage a vécu. Le thème abordé par l’auteur, c'est dans un monde de suspense où existe une  frontière entre la réalité et l'imagination.  Chaque chapitre commence par une phrase captivante qui nous pousse à  réfléchir.  Elle nous fait  poser  la question de la responsabilité : Quels drames transmettons-nous à nos enfants ? Comment ne pas reproduire le passé ? Même le titre nous fait à penser. Il nous renvoie au  poème célèbre de Verlaine qui l'avait composé quand il avait été en prison dans l’aspiration à la liberté.
"Le ciel est, par-dessus le toit, Si bleu, si calme !
Un arbre, par-dessus le toit, Berce sa palme.
[…]
– Qu’as-tu fait, ô toi que voilà   Pleurant sans cesse,
Dis, qu’as-tu fait, toi que voilà, De ta jeunesse ?"
Paul Verlaine, Sagesse (1881)
Mais toutes les prisons ne sont pas les mêmes. « Sa mère et sa sœur savent que Loup dort en prison, même si le mot juste c’est maison d’arrêt mais qu’est-ce que ça peut faire les mots justes quand il y a des barreaux aux fenêtres, une porte en métal avec œilleton et toutes ces choses qui ne se trouvent qu’entre les murs. Elles imaginent ce que c’est que de dormir en taule à dix-sept ans mais personne, vraiment, ne peut imaginer les soirs dans ces endroits-là. » la prison dans ce roman, c'est notre choix, notre attitude et notre pensé

Sadaf Malek Yarand, Maedeh Sadat Salehi
Université d’Alzahra



NOTHOMB Amélie
Soif
Édition Albin Michel (152 pages)

L'histoire est à propos de Jésus et la crucifixion qu'il a subie. En effet, le personnage principal est le Jésus d'Amélie Nothomb. Le Jésus d’Amélie Nothomb nous ressemble, L’auteure nous offre un Jésus incroyablement humain, loin de l’image du Messie dont nous avons l’habitude. Il avoue qu’il n’est pas sans défauts. Il a des sentiments humains. Il exprime ses sensations, ses sentiments, l’amour, la peur, le chagrin, la colère et la soif….
Peut-être pour raconter ce qui s'est passé le jour de crucifixion et la veille, elle s'est mise à sa place ; L'auteure écrit à la première personne. La nuit précédent la crucifixion, Jésus est seul dans sa cellule.  Il éprouve la peur de la souffrance qu'il va endurer sur la croix. En fait, son corps lui est important. Ce même corps qui va être torturé cruellement. Cela lui est important parce qu'il a vécu avec ce corps pendant des années. En fait, tous ses souvenirs, tous les sentiments qu'il avait manifestés et tous les sentiments qu'il avait partagés avec son amoureuse, Madeleine, étaient intrinsèques à ce corps. Cette même nuit, étant inquiet il essaie de se calmer en se souvenant du temps qu'il a passé avec Madeleine, en reconnaissant ses propres erreurs et en se rappelant du peu de reconnaissance qu'il a reçue. Ses propres miracles sont les témoins de sa condamnation.  Il se rappelle que les gens étaient vraiment ingrats envers ce qu'il leur avait fait et cela serre son cœur. Pendant le chemin de croix, il voit que les gens le regardent indifféremment, c'est pourquoi il se dresse devant Dieu. Il subit tant de douleur pour ces gens qui sont indifférents et ingrats ! Et il demande pardon à lui-même d'avoir accepté cette mission. Pendant tout le chemin Madeleine l'accompagne et ils se parlent tout en étant silencieux. Le pire est que sa mère l’accompagne aussi. Il se dit que c'est « le comble de la cruauté ». Il se sent un peu mieux en trouvant deux courageux, Simon de Cyrène et Véronique, qui l'ont aidé pendant ce chemin. Il éprouve la fraternité pour ces deux larrons crucifiés. Sur la croix en supportant tant de douleur, il peut encore désirer quelques choses. Et cela n'est qu'un gobelet d'eau. En fait, la soif est si forte et puissante qu'on peut désirer de l'assouvir même quand on est sur la croix et qu'on est en train de subir une telle souffrance. Enfin Jésus meurt tout en étant assoiffé et torturé. Les apôtres, sa mère, son amour lui manquent mais il se sent bien. Il dit qu'ils ne doivent pas m'en vouloir si je ne viens pas dans leurs rêves. C'est une exigence égoïste. S'ils m'aiment ils doivent me laisser tranquille là-bas.
Quelquefois il demande pardon à lui-même d’être crucifié parce qu'il dit que les gens vont le remercier pour ça, ils vont l'admirer pour ça et ils vont croire en lui pour ça.
Il dit qu'il doit accepter tout ça parce qu'il n'a pas d'autre choix. Il aurait pu ne pas l'accepter au cas où il pourrait faire autre chose. Cela ce n'est pas son cas donc il hait sa mission de plus en plus.
A propos du style de l’auteure, on peut dire que les phrases sont simples tout en demandant une forte réflexion. Ce nouveau roman d’Amélie Nothomb est court mais très profond et fort. Pendant toute l’histoire on suit des monologues intérieurs de Jésus. Elle décrit les scènes d'une façon fluide. Elle nous fait penser et nous questionner sur les idées du texte.
Sahar Dabbaghi et Mehrnoosh Nazeri

Université  Alzahra
Santiago Amigorena
Le Ghetto intérieur
POL éditeur, 2019 (191 p)


 Le silence

      Le Ghetto intérieur est un roman inspiré de la réalité, écrit par un écrivain argentin, Santiago Amigorena, dans lequel le narrateur évoque l’histoire d’un homme, polonais juif, qui a fuit son pays natal, sa mère, ses frères et sœurs, et qui s’est réfugié en Argentine.
Des années et des années passent. Un jour, il commence à recevoir des lettres de sa mère, dans lesquelles elle lui dévoile leur souffrance à cause de l’occupation allemande et de l’extermination des juifs.
Vicente cherche à oublier la parole de sa mère, à oublier sa femme et ses enfants.

Le silence l’envahit jusqu’au point de s’oublier. L’enfermement devient son ghetto intérieur.
Cependant, une annonce lui parvient et bouleverse sa vie.
C’est un roman facile à lire. L’histoire est intéressante : c’est le bouleversement d’une famille, une histoire captivante, l’histoire du silence, l’histoire d’une réalité amère.

Si vous aimez les histoires de familles et ses bouleversements, lisez ce roman.


                                                 Leila BAYRAM, Liban

 Université Saint-Joseph, branche de Saida
NOTHOMB Amélie
Soif
Édit. Albin Michel (152 p.)


La révélation du Jésus humain


Soif. C’est l’histoire de la crucifixion de Jésus. C’est l’histoire écrite par la plume d’Amélie Nothomb mais dite par la voix du prophète. C’est une histoire connue par tout le monde, mais réécrite dans un style unique pour un but clairement engagé. Soif : une histoire qui combine amour, passion, sens de la vie et le trajet « éternel » vers la mort.
L’auteure ose donner la voix à Jésus, lui donnant ainsi la possibilité de parler, de raconter ses aventures et d’écrire son propre texte. Elle le pousse donc à penser, à réfléchir, à relater des souvenirs et à se défouler devant le peuple qui n’a jamais entendu ses réelles paroles. Elle lui donne une autre vie qui dure 152 pages. Elle lui donne un vaste espace pour se questionner sur lui et le monde. Par ce récit, on fait la connaissance de ce Jésus humain.
On est dans la tête et dans tout le corps de Jésus : on entend ses paroles intimes et on souffre avec lui.
C’est à l’aide de cette talentueuse auteure qu’on peut le faire : elle ose imaginer ce que fut le monologue intérieur du prophète dans les dernières heures de sa passion.
Chez Nothomb, ce prophète déjà connu par sa divinité et par sa sainteté, est présenté sous la figure d’un être humain, modeste, naturel, « non-omniscient » sentant l’injustice ; un homme qui doute, qui craint, qui se fâche et qui aime la jeune Madeleine. Nothomb pointe, ainsi, le doigt sur la nature banale et commune entre Jésus et les autres hommes.
Cette auteure fait un très bon choix pour son personnage principal. Jésus, le symbole de la souffrance, du sacrifice, de la force et de la patience, est aujourd’hui connu comme un héros extraordinaire. Il est l’archétype de l’homme parfait pouvant intéresser tout le monde.
Par les questions que se pose Jésus, comme un fils qui interroge son père, « Comment le créateur n’aurait-il pas été dépassé par cette création dont il ne comprenait pas l’impact ? » c’est une profonde réflexion imposée par Nothomb autour de la vérité de dieu et de sa nature. Une profonde réflexion sur la présence de Jésus et son envoie sur terre pour souffrir. Quel est donc ce but et comment est représenté le Père aux yeux du fils torturé ?
Dès la première lecture, on trouve que ce roman est un roman à double sens, à double finalité. Le premier sens est le sens direct et clair, c’est raconter l’histoire et rappeler les gens et les nouvelles générations de l’histoire de la passion de Jésus. Le deuxième sens est imposé indirectement dans le roman, ce que Nothomb a su faire parfaitement.
Qui est Jésus ? Quelle est la nature de Dieu ? Pourquoi Jésus est l’élu ? Quel est le but de faire souffrir Jésus ?
Votre lecture pourra y répondre.


Ghada Seifeldine

Université Saint-Joseph, Saïda 


AMIGORENA Santiago H.
Le Ghetto intérieur
Editions P.O.L. (192 pages)

          Influencé par la vie de son grand-père juif, exilé à Buenos Aires depuis la fin des années 1920, à cause de la Deuxième Guerre mondiale et la souffrance de sa mère enfermée dans le ghetto de Varsovie, Santiago H. Amigorena rédige un roman qu’il intitule « Le Ghetto intérieur ». Ce roman donne l’impression d’une autobiographie, un journal intime car il nous semble que l’auteur relate ses propres souffrances mais d’une manière masquée, tout en se cachant derrière des personnages plus ou moins fictifs. La subjectivité de ce roman a pu attirer un très grand nombre de lecteurs intéressés par la situation de vie pénible des Juifs pendant la deuxième guerre mondiale. En 2019, Le Ghetto intérieur a gagné le Prix des libraires de Nancy et il a été l’un des quatre romans finalistes du prix Goncourt.
          Amigorena relate l’histoire d’un jeune homme juif appelé Vicente Rosenberg qui a quitté la Pologne pour partir en Argentine, fuyant la guerre et l’extermination des Juifs en Europe. Arrivé en Argentine, il rencontre Rosita Szapire, crée sa propre famille, obtient un travail et rencontre des amis (Sammy et Ariel). Bien qu’il possède toutes les raisons d’être heureux il se sentait toujours triste, anxieux, même coupable puisqu’il a laissé sa mère, ses frères et sa sœur en Pologne. Le seul moyen de communication avec ses proches en Europe était les lettres qu’il échangeait avec eux. Mais, au lieu de soulager sa peine, les lettres envoyées par sa mère, augmentaient son inquiétude et son sentiment de culpabilité puisqu’elle décrivait le dénuement et la violence auxquels ils font face en Europe. Pour ne plus penser à la souffrance de ses proches et surtout à l’idée de sa mère torturée et par suite morte dans le ghetto de Varsovie, Vicente s'enferme dans le silence, il  décide de se taire.
          Bref, est-ce qu’il pourra surmonter ce sentiment de culpabilité? Va-t-il rompre son silence ? Comment ses proches en Argentine vont se comporter avec le nouvel état de Vicente ? Est-ce-que sa mère survivra ? Est-ce qu’il retournera en Pologne ?

Reina Moussawel.
Université de Balamand
NOTHOMB Amélie,
Soif
Edition Albin Michel (152 pages)

L’histoire de Soif est une révision du « dernier jour de la vie de Jésus Christ ». C’est un long monologue intérieur raconté par un Jésus recréé par Amélie Nothomb ; l’auteur bénéficie non seulement des évènements des évangiles canonique, mais aussi ceux des évangiles non-officieux (comme l’histoire de l’amour de Jésus et Marie de Magdala). Elle ne sort pas de la cadre chronologique présentée pour la vie de Jésus, alors la structure du récit reste la même chose qu’on connaît de sa vie ; mais elle tâche de faire une nouvelle interprétation de la vie de Jésus et c’est là qu’elle fait entrer son imagination ; elle met elle-même à la place de Jésus et elle raconte sa propre interprétation par la bouche de Jésus. Elle n’a pas souci de vraisemblance, elle présente Jésus comme quelqu’un qui est omniscient, quelqu’un qui cite des citations des personnages d’avenir (Paul Valéry, Pascal, Proust, Malherbe etc.) quelqu’un qui utilise des expressions exclusivement françaises (C’est l’hôpital qui se moque de la charité : p.48) ; elle s’efforce pas du tout de cacher sa subjectivité dans la narration ; pendant la narration, Jésus plaisante beaucoup avec les apôtres, il les décrit très sincèrement, il critique leur comportement, il accuse même Jean l’évangéliste de mentir ; et ainsi elle critique implicitement les fondements du christianisme. A partir de la deuxième moitié du livre, la tonalité change d’un ton humoristique à un ton plus sérieux, mystique et philosophique, c’est pourquoi la deuxième moitié se lit un peut plus lentement. Dans la deuxième moitié l’auteur aborde une question principale : « pourquoi Jésus accepte-il d’être crucifié ? » la réponse selon les autorités du christianisme c’est qu’il accepte pour purifier l’homme du péché originel, l’auteur critique cette notion par la bouche de Jésus, et accuse implicitement ceux qui la présentent. Ce polémique et questionnement existe pendant tout au long du livre, parfois avec ironie et parfois tout directement.
En conclusion, Soif est un œuvre d’art engagé, dont l’auteur par sincérité ne ferme pas ses yeux sur la vérité ; même si elle respecte le christianisme, elle n’accepte pas les notions illogiques attribuées à Jésus Christ et au christianisme.
Amirali Zolfaghari Varzaneh

Université de Téhéran

MIANO Léonora
Rouge Impératrice
Editions Grasset, 2019 (603 pages)

Ce roman est écrit par Léonora Miano, écrivaine franco-camerounaise qui a vécu plusieurs années en France.
Le roman est comme un rêve d'avenir puisqu'il prend la forme d'une fable politique dans une Afrique du futur dans lequel se réfugient les sinistrés, alors c'est un roman d’anticipation.
 Nous sommes en 2124, Léonora a choisi ''katiopa'‘, continent africain unifié pour être le refuge pour les sinistrés venant de la vieille Europe.
C'est une histoire d'amour entre Ilunga, le chef de l’Etat, et Boya, enseignante universitaire.
Cette histoire d'amour est considérée comme une union '' contre nature '' puisque Boya est proche du côté des sinistrés et que cela menace l'état car elle est proche d'Ilunga et alors plusieurs personnes essayent de nuire à cette relation entre les deux amoureux, prenant les recherches de Boya sur les sinistrés comme un témoignage de sa trahison.
Toutes les tentatives d'Igazi, responsable de la sécurité intérieure de katiopa, pour l'élimination de Boya ont échoué, il la décrivait comme ''ennemie de l'état'‘.
Katiopa , avançait vers son but qui est de fonder un monde comme l'avaient fait les aînés .
De même, katiopa étant unifié, cherchait à savoir quoi faire avec les marginaux, les gens de Benkos qui refusaient de se mêler aux autres. 
Soulignons que la pensée de Katiopa avait toujours ignoré la race.
Et cela a beaucoup aidé Ilunga qui répétait la phrase « katiopa, tu l'aimes ou tu la quittes » aux sinistrés, sous l'influence de Boya
Malgré tous les problèmes que le continent avait subis, et même les pièges tendus pour nuire à katiopa, à la fin le couple s'apprête pour le mariage et les noces sont annoncées.
Tout au long du roman, nous pouvons remarquer la présence de plusieurs phrases en anglais, beaucoup d'autres mots de langues africaines et de plusieurs cultures, c'est un métissage culturel et ce métissage caractérise le style de l’écrivaine.
Ce métissage est évident puisque cette dernière est née au Cameroun et qu'elle vivait en France donc elle symbolise la diversité culturelle et bien sûr cela a rapport au choix du ''continent africain'' dans son roman. Alors le métissage culturel est pour un monde meilleur et plus avancé.
En fait, nous remarquons que le statut de la femme dans la société selon le point de vue de Léonora est souligné par le choix de l’héroïne, elle est à nouveau une femme.
Une femme qui est liée à la question centrale de la légitimité d'appartenir à katiopa ou d'en être expulsé. 
De même l'écrivaine a réussi de plonger le lecteur dans une atmosphère locale, africaine, grâce à son choix des personnages, des événements, des places et même du statut du continent africain dans ce roman futuriste. Elle a souligné encore la colonisation et les répercussions de la domination européenne et elle a mis sous la loupe, l’héritage culturel symbolisé par la diversité de la religion.
Enfin, Léonora Miano a englobé dans son roman plusieurs thèmes, elle a réussi à appliquer l'universalité des thèmes tels que l'émigration et l’immigration, avec un peu de politique amalgamé avec l’amour. Cette universalité des thèmes marque l'universalité de l'écrivaine elle-même et sa réussite à plonger le lecteur dans son récit, par le biais d'une description minutieuse qui n'ennuie á aucun moment le lecteur impatient de connaître la fin de l’histoire.
Amani Ayman
Université d'Alexandrie



MINGARELLI Hubert
La Terre Invisible,
Éditeur Buchet-Chastel, (182 pages)

Vers un Nouveau Départ

« Une étoile s’alluma, au loin le moteur démarra enfin. Deux bières et tout était mystérieux. » C’est ainsi qu’Hubert Mingarelli achève le premier chapitre de son nouveau livre La Terre Invisible. À la fin de son incipit, l’auteur nous présente un avant-goût de cette aventure mystérieuse et énigmatique qu’est son roman. 

C’est la fin de la Seconde Guerre mondiale. Tout le monde rentre chez lui à l’exception d’un jeune photographe anglais qui ne parvient pas à effacer les images d’un camp de concentration qu’il a vu libérer. Hanté par des souvenirs douloureux, il décide de partir sur les routes de l’Allemagne, dans le but de photographier les gens de ce pays devant leur maison et ainsi comprendre comment ce peuple fut complice de l’une des plus grandes blessures de l’Humanité. Durant son voyage, il est accompagné d’O’Leary, un soldat anglais qui vient juste d’arriver en Allemagne et qui n’a rien vécu de la guerre. Ils vont partir au hasard sur les routes avec quelques jerricans d’essence et des rations alimentaires.

Ce roman n’est pas un récit d’aventure. C’est une quête, une réflexion sur les gens après la guerre : perdus, désorientés, presque vides voire hantés. L’histoire en devient même secondaire. Les personnages sont très énigmatiques, on ne sait que très peu de choses sur leur passé : qui sont-ils ? Quels sont leurs secrets ? Beaucoup de questions sont soulevées mais peu de réponses nous sont données. D’ailleurs, le silence occupe une place importante dans les pages de ce récit. Ce silence se cache derrière les mots, derrière la narration et derrière les actions. Il y a des choses qu’on ne dit pas ou que l’on cache, des choses ineffables.

Ce que nous ne pouvons pas nier, c’est que ce roman est une ode à la photographie. À travers une narration simple et minimaliste, Hubert s’attarde sur des jeux d’ombres et de lumières. La symbolique de capturer des photos révèle le désir de figer l’instant présent.

Ce roman se démarque des autres livres qui parlent de guerre. Ces derniers sont généralement subjectifs alors qu’ici Hubert nous présente un tableau assez objectif de la situation de l’époque. En effet, son personnage principal se cache derrière l’objectif de sa caméra et de cette manière cache sa subjectivité. On a là un regard différent sur la situation de l’époque. Pourtant, il crée une ambiance plutôt calme dans un roman qui aurait pu favoriser des événements graves et tragiques.
C’est un livre à lire avec du recul. Un livre qui ne nous lâche pas, qui nous hante et qui nous pousse à nous poser des questions. Ainsi, chacun de nous devient ce photographe qui est à la recherche de sens.


HOBEIKA Sarah,
Université Saint Joseph de Beyrouth,






BARBÉRIS Dominique
Un dimanche à Ville-d’Avray
Éditions Arléa, 125 pages


Description détaillée


C’est un roman qui aborde un aspect important de la vie et met en évidence la perte d’enfance et de relations familiales, Mais il y a beaucoup de descriptions où le lecteur est perdu, il se sent ennuyé, le désir est à compléter l’histoire et suivre les événements qui attirent l’attention du lecteur.
Ce roman de l’écrivain (Dominique Barbéris) dans la ville – d’Avray, un dimanche, où il y a deux sœurs qui vivent dans une atmosphère parisienne animée. Mais elles ne se sentent pas à l’aise elles recherchent l’amour, le romantisme et la sécurité qui leur font défaut depuis leur enfance.
Elles n’ont pas vécu une enfance normale ou une période de jeunesse comme les autres filles de leur génération. C’est à cause de la domination de leur mère et d’une atmosphère familiale constamment tendue. Elles ont eu une vie difficile et malgré leur séparation en raison de circonstances personnelles et familiales, elles sont impatientes et ont besoin de se rencontrer. Quand elles se rencontrent le dimanche, jour de fête pour tous, elles ont de mauvais souvenirs depuis leur enfance de ce jour, où elles passaient le dimanche à la maison avec les problèmes et cette journée a eu un impact négatif sur elles. Le dimanche passe difficilement.
Cette fois – ci, leur proximité leur permet de commencer à parler de leurs secrets : elles souffrent d’un vide émotionnel et d’un besoin d’amour et romance en permanence. Malgré cela, elles sont satisfaites du choix du destin pour leur vie qui manque de bonheur et de rêve.
Les deux sœurs révèlent deux histoires semées de troubles et d’inquiétudes, C’est un roman donc qui se fait comme un journal quotidien raconte par le narrateur qui incarne ses expériences personnelles, l’auteur raconté son errance dans les impressions quartiers à ville - d’Avray, c’est lui qui raconte ses souvenirs dans cette ville avec ses impressions pour la description qui se fait à travers un homme – écrivain. 


 Hanan Mohammed
Université Al-Mustansiriya  


MIANO Léonora
Rouge Impératrice
Editions Grasset (605 pages)

« L’aventure humaine était faite de disparition, d’évolutions », voilà la phrase représentative de Rouge Impératrice. Elle nous révèle d’emblée les grands thèmes présents dans ce roman incroyable qui nous fait voyager dans le futur, à plus d’un siècle de notre époque.

            Nous sommes en 2124, dans un monde ou le continent africain serait presque entièrement unifié et l’un des plus puissants de la planète. On parle des « États-Unis d’Afrique ». Katiopa n’existe que depuis quatre années, il reste beaucoup de choses à régler pour Ilunga, le chef de l’État (mokonzi). Notamment la question des sinistrés de la vieille Europe, les descendants des Français venus se réfugier en Afrique subsaharienne francophone au XXIe siècle. N’étant plus qu’une minorité sur le continent, ils vivent isolés dans une partie de Katiopa, et repliés sur eux-mêmes. La question qui se pose pour Ilunga et ces hommes d’états est cruciale : Faut-il les expulser ou les intégrer ? Quand l’amour frappera le cœur d’Ilunga, changera-t-il ses orientations politiques et ses décisions ? L’égalité raciale difficilement acquise par les africains au XXIe siècle sera-t-elle enfin définitive ? Sera-t-il question d’un retournement de situation dans ce roman ?

            Tout commence par une grande histoire d’amour entre Boyadishi, qui enseigne à l’université et Ilunga, chef de l’état. C’est donc ici que s’illustrent les thématiques prégnantes de ce roman : l’amour, l’identité, la peur de l’autre et le refus de cette « autre présence » à l’intérieur de soi. Cet amour entre Boya et Ilunga devient rapidement une affaire d’état et la nécessité de séparer ce couple devient cruciale pour leur entourage. La richesse de ce roman se traduit non seulement par ces thématiques diverses qui traitent de « l’être humain » en tant que tel, mais aussi par le style de l’auteure. En effet, ce n’est pas un livre facile à lire mais il n’est pas ennuyeux pour autant. Le style est soigné, les phrases longues et il faut quelques pages pour intégrer les codes (et le vocabulaire africain) de ce monde futur. Ainsi, nous comprenons la richesse de ce long roman afro-futuriste et panafricain.

            Rouge Impératrice représente parfaitement les désirs et rêves de la jeunesse africaine actuelle. Miano montre comment « l’aventure humaine est faite de disparitions et d’évolutions ». Elle montre aussi comment l’amour peut affecter le présent et perturber le futur à jamais. Le retournement de situation évoqué dans ce roman montre que tout est possible. Le plus faible peut rebondir tel un lion dans la savane et le plus fort peut tomber en laissant derrière lui toutes ses années de gloire.

Nathalia WEHBE

Université Saint-Joseph de Beyrouth
Extérieur Monde
Olivier ROLIN
Editions Gallimard, 2019 (304 p.)

Ma vie: Envie de revivre

1.     Préface
Olivier Rolin est né le 17 mai à Boulogne Billancourt, diplômé en Lettres et Philosophie. C’est un écrivain français, voyageur qui a écrit depuis très longtemps au seuil d’excellents livres. Il a gagné plusieurs prix, le dernier était le «Prix Pierre Mac Orlan» en 2017 pour son récit «Baïkal-Amour». Dans son roman «Extérieur Monde» qui est publié en août 2019, il dépasse un sujet précis ou un voyage particulier. Ce sont plutôt des souvenirs qui s’entrecroisent de lieux, de pays qu’il a découverts et qu’il a traversés, de visages qu’il a seulement parfois croisés, de femmes qu’il a aimées. L’auteur est connu avec sa fragilité, durabilité, mais aussi avec son immense culture littéraire qui peut donner un éclairage sur les destinations qui parcourent pour tous qui aiment l’écriture, le voyage et la culture.
2.     Analyse
Olivier Rolin nous a livré dans ce récit les mémoires de ses voyages en forme littéraire. Il retrace sa vie personnelle, ses incroyables rencontres avec des gens qui ont eu de l’importance dans le monde comme le colonel Kadhafi, le commandant Massoud, Borges et d’autres. Ainsi que d’incessantes tribulations géographiques, des femmes passantes, des livres et des lectures à croire que cet homme a passé son temps à voyager et à lire. Le tragique, les guerres et les catastrophes voisinent avec des anecdotes dans ce récit. La description de l’ensemble de tout cela compose un atlas subjectif.
D'abord il y a une écriture élégante et précise, vivante et poétique, bref un style littéraire bien riche. Puis il y a un ton; quelque chose à la fois désenchanté, mélancolique mais qui s'émerveille malgré tout, du monde, qui s'en étonne toujours.
Dans ce roman, on saute de paragraphes en paragraphes, de chapitres en chapitres, de personnes en personnes, de lieux en lieux. Peut-être certains lecteurs n'y trouveront pas leur compte, mais il faut s'accrocher pour le suivre.
À travers ce récit, les femmes et les voyages tiennent une place particulière dans la vie d’Olivier Rolin. Le récit commence aux Açores au Portugal et se termine là aussi, entre temps le lecteur aura suivi l'auteur en différents lieux (en Russie, au Soudan, en Chine, en Belgique, au Canada, en Afghanistan, en Asie,…). L’écrivain avait pérégriné et rencontré des hommes et des femmes vraiment nombreuses, les femmes sont souvent de simples passantes comme chez Baudelaire et Brassens.
L’écrivain a cité dans son récit beaucoup de livres et d’auteurs. Il a aussi parlé de la politique, de la littérature,  de la philosophie, des saisons et de l’Histoire du monde.
La forme certes belle mais qui peu à peu devient tellement alambiquée qu'on en perd le fond. Fond qui de base est annoncé plein de digressions à venir puisque dès le début. Alors, on peut voir le regard mélancolique et nostalgique d'un homme qui se trouve hors de ce temps. Un retour de vie qui aurait pu être intéressant s'il avait été mieux structuré ou plus court.
Ce qui ressort de ce récit; c'est la beauté de la plume d'Olivier Rolin oscillant entre humour, autodérision, poésie et nostalgie.
En résumé, des passages magnifiques, des portraits saisissants, des descriptions épatantes, des confessions touchantes. Bref, un roman surprenant et inattendu, style et une belle forme, certes.
3.     Conclusion
Plus d’une quinzaine de chapitres, on trouve qu’il y a des lectures qui s'avalent d'une traite et d'autres qui nous épuisent. Alors, ce roman impatiente le lecteur malgré sa richesse linguistique. Mais ce qui accroche le lecteur est le style que l'écrivain nous dévoile dans son roman.
Le roman ne représente qu’un voyage littéraire à travers les souvenirs personnels vécus par l’auteur. Ces souvenirs littéraires représentent des voyages, des incroyables rencontres, des lectures d’auteur autour du monde. L’écrivain ramène le monde à nous dans toute sa puissance parfaitement élégante de sa mélancolie.
Selon la vision littéraire d’Olivier Rolin, dans la vie, Il n’y a que d’erreurs de jeunesse. Mais aussi il y a des erreurs de vieillesse. On voit que Rolin est arrivé à un moment de sa vie où on ne parle plus du «temps qui passe» mais «du temps qui reste». Alors, on sent clairement que l’auteur avait un besoin réel de se retourner en arrière et de se souvenir de tout ce qu’il avait vécu. En écrivant ses souvenirs il les couche sur papier.
Bref, l’auteur veut nous transmettre un message que le monde est trop petit pour lui, et que sa vie est tressée de tout ce qu’il a rencontré.
En résumé, ce sera un plaisir de lire ce récit pour tous qui aiment les belles tournures, les digressions poétiques et les rencontres inattendues.

Maha AL-SOUDANI
Irak
Université Al-Mustansiriyah
Faculté des Lettres
Département de Français




AMIGORENA Santiago
Le Ghetto intérieur
P.O.L Éditeur (192 pages)

La tache indélébile de la Shoah et de l’exil

Est-il possible de revivre à nouveau après la mort ? Peut-on imaginer de récupérer sa vie loin du pays natal, après avoir trahi sa propre famille ?

Le Ghetto intérieur raconte la vie de Vicente Rosenberg, juif polonais de trente-huit ans qui vit à Buenos Aires, en Argentine, depuis une douzaine d’années. Il est marié à une femme très affectueuse qui s’appelle Rosita avec qui il a eu trois enfants. L’histoire commence en 1940 et se déroule sur cinq ans, recouvrant toute la durée de la Seconde Guerre mondiale. Dans ce roman on raconte en fait comment il reçoit des lettres de sa mère, Gustawa, qui est restée dans le ghetto à Varsovie et qui lui relate les horreurs de l’antisémitisme en Europe ; en découvrant le projet d’anéantissement des Juifs par les nazis et les conditions de vie dans le ghetto avant leur déportation aux camps d’extermination en Pologne, il entre dans une sorte de mélancolie profonde qui le pousse à se taire. Son silence devient de plus en plus intense à partir de 1943, date à laquelle il découvre que sa mère va bientôt être transférée au camp de Treblinka où elle sera tuée.
Rongé par la culpabilité de ne pas avoir pu sauver sa famille de ce destin effroyable et totalement inhumain, il est empêché de vivre dans le monde réel, de s’occuper de ses enfants, d’aimer sa femme. Il traverse également une crise d’identité : « Qu'est-ce qui fait que parfois nous disons que nous sommes juifs, argentins, polonais, français, anglais, avocats, médecins, professeurs, chanteurs de tango ou joueurs de football ? Qu'est-ce qui fait que parfois nous parlons de nous-mêmes en étant si certains que nous ne sommes qu'une seule chose, une chose simple, figée, immuable, une chose que nous pouvons connaître et définir par un seul mot ? » (p. 30-31).

L’auteur a réussi d’une manière magistrale à nous transmettre ce que lui, en commun avec le protagoniste, son grand-père, ressent, permettant au lecteur, au fil des pages, de s’identifier à cette souffrance. À travers la description émouvante et en même temps angoissante du malaise du protagoniste, l’auteur nous fait comprendre que le silence, le ghetto intérieur dans lequel Vicente est emprisonné, est devenu aussi le sien. C’est la mort intérieure, condition existentielle de laquelle on peut difficilement se sortir. Il s’agit d’un roman porteur d’une charge émotionnelle intense, qui aborde les thèmes universels de la mémoire, de l’exil, du silence, de la culpabilité du survivant, et de l’identité narrative.
Il nous pousse à réfléchir à l’impact que l’Holocauste a eu sur l’histoire de l’humanité, tout en introduisant un autre aspect de ce phénomène que l’on n’arrive même pas encore à affronter aujourd’hui : le poids lourd que l’on est obligé de supporter en vivant l’Holocauste à distance, depuis l’exil, ayant fui sa propre patrie et peut-être échappé à son destin.
Sans conteste, Le Ghetto intérieur est un livre capable de toucher profondément la sensibilité de son lecteur puisqu’il fait référence à des circonstances réelles, à une souffrance réellement vécue par des personnes qui ont vraiment existé. C’est pour cela que je crois qu’il aurait mérité le Prix Goncourt de l’Académie, et qu’il mériterait bien celui du Choix de l’Orient.
Giulia Silvestrini
Université Saint-Joseph de Beyrouth





NOTHOMB Amélie
Soif
Edition Albin Michel (152 pages)
L'écriture est un moyen de transmettre des idées au public, " Soif " est un mot qui a la signification de souffrance, Amélie Nothomb a choisi ce mot comme un titre de son roman biographie, c'est l'histoire qui raconte la vie de Jésus Christ. L'incarnation de la soif, l'image de la mort et la description de la vie éternelle après la mort ; ce sont des indication de la présence de l'esprit religieux chez Nothomb dans les moment difficiles, "la solitude" où elle a résumé la consolation de ses souffrances avec la vie de J.C " Je me regarde dans le miroir"dit-elle à la fin de son roman où le personnage est Jésus Christ et sa mère , par rapport Judas est l'image de mauvaise être dans la vie et l'image de l'amour a incarnée par Madeleine .                                                                   

Dans ce roman, il ya plusieurs thèmes ; l’amour, la mort et soif de l’humanité, c'est pourquoi ce roman mérite le prix, il traite un besoin de notre monde, c'est " l'égalité « un pauvre lieu dans la terre "Cana" où les gens souffrent l'absence de l'humanité, en mêmes temps il ya la description de la vie quotidienne. Le lecteur virtuel va toucher l'esprit réel de la religion, c'est le bonheur et n'est pas le meurtre, autre raison ; chaque lecteur a des moments où il souffre de sa vie et parle avec son Dieu, la présence de Dieu a incarnée par J.C, et ça dépend de l'analyse critique de chaque lecteur…                                                                                   


Zainab Jawad  K.
Université Al-Mustansiriya
Olivier ROLIN
Extérieur Monde.
Gallimard, 2019, (304 p.)  

Pérégrination Spatiale et Littéraire 

Le plus grand voyageur, d’après Gandhi, n’est pas celui qui a fait dix fois le tour du monde, mais celui qui a fait une seule fois le tour de lui-même. Pourtant, il s’avère qu’Olivier Rolin, auteur de renommée, ayant visité les quatre coins de la Terre, a su pénétrer dans les méandres de la littérature.

Ponctué par les récits de rencontres de personnes célèbres, de personnes ayant côtoyé des célébrités ou des personnes inconnues de l’histoire, Extérieur Monde se révèle comme un geste visant à rendre immortelles des personnes qui « [ont] déposé en [Rolin] quelque chose qu’[il] ne saurait nommer »[1]. Ainsi, le lecteur se fait une idée des femmes qu’a côtoyées Rolin, des hommes qu’il a rencontrés dans des pays en guerre, de ses années d’internement à la « Villa Médicine » ou de son enfance à Dakar. Liées par un thème commun ou faisant suite à des réflexions, ces rencontres qui nouent de fil en aiguille la « géographie personnelle » de Rolin, sont agencées aléatoirement. Par conséquent, l’effet du brouillage narratif produit est certain. D’ailleurs, l’ex-journaliste à la Libération et au Nouvel Observateur se flatte, explicitement, de maitriser l’art de la digression.

Au-delà du voyage spatial, le lecteur effectue également un voyage littéraire : chaque souvenir de voyage est lié à un livre ou à une bibliothèque. Ainsi, il se trouve embarqué, à bord de l’œuvre, à la découverte de la bibliothèque personnelle de Rolin, au sein de laquelle les littératures antique et mondiale sont placées sur un piédestal. L’auteur n’hésite pas à épancher sa culture littéraire en citant des traits intrinsèques à chaque écrivain, en comparant des écrivains entre eux ou encore en critiquant certains autres. De surcroît, des théories barthiennes et flaubertiennes sont citées, entre guillemets, dans le but de corroborer ses réflexions sur la littérature.

Olivier Rolin, philosophe de formation, singularise les réflexions philosophiques et la critique au sein de son œuvre. D’un côté, certaines réflexions portant sur l’univers littéraire permettent d’aborder - sous un nouvel angle - le métier d’écrivain, l’acte d’écrire, les subtilités idiomatiques, l’écriture plurilingue ou encore la rhétorique. D’un autre côté, les systèmes politiques, l’architecture ainsi que l’aliénation résultant de la modernité entrent dans la ligne de mire de la critique de Rolin. Notons également que les réflexions métaphysiques sur le temps, la mort et l’amitié n’échappent pas à sa plume. Par ailleurs, la justification de l’acte d’écriture occupe une place importante dans l’œuvre : Rolin dévoile le lieu dans lequel il s’installe pour écrire, les éléments qui lui servent de ressources (les carnets de voyage) et fait au lecteur de nombreux aveux concernant la politique des maisons d’édition etc.

L’ambivalence se révèle comme étant un trait stylistique dominant dans le discours narratif. D’une part, l’auteur a recours à des termes recherchés et érudits pour édifier ses descriptions, tout en étant soucieux de ne pas tomber dans le cliché ; d’autre part, il adopte un registre oral qui trouve extension, à certains moments, dans le champ du vulgaire. Il serait important de signaler, par ailleurs, que l’auteur fait figurer des maximes latines ainsi que des mots étrangers dans son texte. Cet apport de vocables, ayant pour origine des langues mortes ou étrangères, au discours narratif tenu en français, pourrait concrétiser l’admiration de Rolin qui « va à ceux qui ont été capables d’écrire (de faire de la beauté avec des mots) dans une autre langue que celle qui leur a été donnée par la naissance »[2]. Pourtant, malgré cette atmosphère savante, l’ironie et la dérision, qualifiée par Rolin de « pince-sans-rire », marquent ses commentaires méta-narratifs. Il serait impératif de souligner, d’ailleurs, la profusion de ces derniers dans le texte de Rolin, souhaitant commenter certains faits ou accompagner le lecteur au fil de sa lecture.

Récit de voyage regorgeant de références littéraires, Extérieur Monde s’avère comme un moyen économique de découvrir ce que le monde cache comme joyaux et misères tout en élargissant sa culture littéraire !

Joanne Rizk
Université Libanaise
Faculté des Lettres et des Sciences Humaines – Section II
Département de Langue et Littérature Françaises




[1] ROLIN Olivier, Extérieur Monde, Gallimard, Paris 2019, page 298.
[2] ROLIN Olivier, Extérieur Monde, Gallimard, Paris 2019, page 12.  



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